Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Galilée (Galileo Galilei, dit) (suite)

En parcourant au bout de sa chaîne un arc de cercle, le lustre possède le même mouvement que s’il tombait le long d’un chemin incurvé. Puisque la durée de cette chute ne dépend pas du poids du lustre, Galilée en déduit que tous les corps doivent tomber avec la même vitesse, si du moins la résistance de l’air ne vient pas freiner par trop fortement leur mouvement. On raconte — mais le fait est contesté — qu’il monte alors en haut de la tour de Pise, dont l’inclinaison va faciliter son expérience, et laisse tomber des billes de différentes matières, mais toutes suffisamment denses, cependant que des camarades, restés en bas, peuvent observer que les billes lâchées simultanément arrivent au sol au même instant.

Ces résultats d’une merveilleuse simplicité battent en brèche l’enseignement traditionnel, car, sans souci de la moindre vérification expérimentale, on pensait que les corps tombaient avec une vitesse liée à leur lourdeur ou à leur légèreté. Aussi Galilée se crée-t-il de solides inimitiés ; à Pise, où il enseigne les mathématiques depuis 1589, sa position devient difficile. Par chance, la république de Venise lui offre, en 1592, une chaire de mathématiques à l’université de Padoue.

C’est donc dans cette ville qu’il va accomplir ses principaux travaux. Il poursuit notamment son étude de ce qu’on nomme alors la « chute des graves », car il se préoccupe de découvrir la loi exacte de ce mouvement. Mais celui-ci est bien trop rapide pour permettre des mesures directes, et Galilée a l’idée d’observer une chute ralentie par l’emploi d’un plan incliné. C’est en 1602 qu’il réalise sa fameuse expérience. Il fait rouler une bille dans une rainure de bois bien lisse et détermine les durées de chute correspondant à diverses longueurs en pesant l’eau qui s’écoule d’un robinet à débit constant. Il trouve ainsi que les espaces parcourus sont proportionnels aux carrés des temps ; autrement dit, le mouvement de chute est uniformément accéléré. Ce résultat reste valable quand il fait varier la pente du plan incliné ; lorsque ce dernier atteint la verticale, la chute devient libre, et Galilée étend à ce cas limite la loi précédente.

De la même époque datent sans doute bien d’autres observations, dont l’ensemble permet de voir en Galilée le créateur de la dynamique. Mais leur relation ne sera publiée que quatre années avant sa mort, dans ses Discorsi e dimostrazioni matematiche intorno a due nuove scienze attenenti alla meccanica e i movimenti locali (1638). Il établit dans cet ouvrage le mouvement parabolique des projectiles dans le vide ; il y énonce aussi le principe de l’inertie et la loi de composition des vitesses, dont le mouvement parabolique n’est à vrai dire qu’une conséquence. C’est encore dans cette publication qu’il attribue la hauteur des sons aux fréquences des vibrations, caractérise les intervalles musicaux par le rapport de celles-ci, étudie les cordes vibrantes, le phénomène de résonance et met en évidence les ondes stationnaires.

Les leçons de mécanique qu’il donne ont un succès extraordinaire ; mais elles ne seront bien connues en France que lorsque le P. Mersenne publiera, en 1634, les Mécaniques de Galilée.


Opticien et astronome

Cependant, Galilée porte son attention sur bien d’autres domaines de la physique. C’est ainsi qu’il est l’un des premiers à faire usage de thermomètres à liquides. Mais c’est surtout en optique que ses travaux ont une importance primordiale.

On rapporte qu’il construit, vers 1612, le premier microscope, mais cette affirmation est sujette à caution. En tout cas, c’est en 1609, alors qu’il réside à Venise, ville la plus réputée d’Europe dans l’industrie du verre, qu’il réalise la lunette à objectif convergent et oculaire divergent, à laquelle son nom est resté attaché. Sans doute n’en est-il pas exactement l’inventeur, car des instruments de même sorte ont été conçus aux Pays-Bas, mais les qualités de cette lunette, son grossissement, qui atteint 30, la font largement surclasser ses contemporaines.

Tout aussitôt, il braque cette lunette non vers des objets terrestres, mais vers le ciel, ce que personne n’avait encore fait ; et il annonce immédiatement une foule de découvertes. Ses observations se portent d’abord sur la Lune ; il constate que celle-ci nous présente toujours la même face, il observe ses montagnes, dont il évalue les hauteurs, et il signale ses librations ; il pense même qu’elle peut recéler des êtres vivants. Puis il découvre ou retrouve les satellites de Jupiter, dont il étudie les mouvements. Il découvre aussi l’anneau de Saturne, les taches et la rotation du Soleil sur son axe, les phases de Vénus, les variations du diamètre apparent des planètes ; toutes nouveautés qui viennent confirmer sa présomption en faveur du système de Copernic*, en infirmant celui de Ptolémée.

En 1610, Galilée se rend aux instances du grand-duc Cosme II de Médicis, qui le rappelle en Toscane pour le combler de faveurs. Il est nommé premier mathématicien de l’université de Pise et philosophe du grand-duc, sans être obligé de professer ni même de résider dans cette ville. Mais bientôt, ayant suscité des envieux en grand nombre, il est dénoncé au Saint-Siège. Les doctrines de Copernic, qu’il ne cesse d’enseigner, ont été, en son temps, agréées par le pape Paul III ; mais elles ont alors pour adversaires la plupart des érudits d’Europe, qui ne jurent que par Aristote. Aussi les juges de Rome déclarent-ils en 1616 ce système « absurde » en même temps qu’« hérétique ». Galilée reçoit l’ordre de ne plus le professer et retourne à Florence.


Le procès de Galilée

Mais l’apparition de trois comètes, en 1618, le ramène à l’astronomie. Il reprend en 1632, timidement, la défense du nouveau système dans son ouvrage : Dialogo sopra i due massimi sistemi del mondo, Tolemaico e Copernicano. Le pape Urbain VIII croit se reconnaître dans un personnage de ce dialogue, Simplicio, défenseur parfois ridicule et toujours malheureux du système de Ptolémée. L’ouvrage est déféré à l’Inquisition, devant le tribunal de laquelle Galilée, âgé de soixante-neuf ans, doit comparaître en 1633. Le procès dure vingt jours ; Galilée se défend à peine ; il doit prononcer à genoux l’abjuration de sa doctrine. La tradition veut qu’en se relevant il ait frappé du pied la terre et se soit écrié : « Eppur, si muove » (« Et pourtant, elle se meut »).