Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
F

froid (suite)

Quand une batterie froide (ensemble de tuyauteries parcourues par un fluide froid), à température inférieure à 0 °C, est placée dans l’air, elle se couvre plus ou moins rapidement de givre, dont l’accumulation réduit les échanges thermiques, donc l’efficacité de la batterie. Il faut alors dégivrer périodiquement les tuyauteries par arrosage d’eau, par chauffage électrique ou encore par « gaz chauds » en envoyant momentanément dans l’évaporateur le fluide frigorigène chaud. Pour des raisons évidentes d’économie, on s’efforce de conserver au mieux le froid produit en isolant thermiquement les enceintes (réfrigérateur, chambre froide, véhicule) ou les appareils refroidis.

À tout produit contenant de l’eau et plus particulièrement aux produits alimentaires, la technique frigorifique peut s’appliquer sous trois formes :
— le refroidissement n’atteignant pas le point de congélation (réfrigération) ;
— l’abaissement de température au-dessous de ce point (congélation) ;
— la déshydratation à partir de l’état congelé (lyophilisation).


Applications du froid

Les très multiples utilisations du froid relèvent de plusieurs principes.

• Ralentissement des réactions chimiques quand la température s’abaisse (ce ralentissement pouvant aller jusqu’à l’arrêt total). C’est ainsi que les altérations des aliments et des substances biologiques sont ralenties ou suspendues par abaissement de température, ce qui ouvre au froid l’immense domaine de la préservation des aliments et aussi d’autres produits d’origine organique : par exemple des produits agricoles non alimentaires (fleurs, graines, cuirs et peaux, etc.) et de très nombreuses substances fragiles utilisées en médecine humaine ou vétérinaire (sang, plasma et tissus pour greffes conservés dans des « banques » par congélation ou lyophilisation ; sperme animal pour l’insémination artificielle, maintenu à – 195 °C dans l’azote liquide ; produits pharmaceutiques de toutes sortes). La lyophilisation, c’est-à-dire la dessiccation par passage direct de la glace à la vapeur d’eau, le produit demeurant à l’état congelé, est l’exemple type d’une opération qu’on peut faire subir à basse température à une substance très altérable, alors que la même opération à température ordinaire l’endommagerait.

Par application du même principe, le froid est utilisé pour maîtriser des réactions chimiques très diverses, rendant possibles des réactions qui ne se produiraient pas à température plus élevée, comme les polymérisations, ou qui seraient explosives à température ambiante, permettant de conserver des produits chimiques altérables à température ordinaire, provoquant dans les métaux certaines transformations recherchées, ralentissant le durcissement de certains alliages, etc. C’est le ralentissement d’un processus chimique qu’on exploite en refroidissant le béton des barrages pour diminuer son retrait au durcissement. C’est encore sur ce principe qu’on se fonde quand on climatise un atelier où l’on fabrique des produits dont les caractéristiques physico-chimiques sont fonction de la température et de l’humidité (textiles, imprimerie, produits photographiques).

• Variation de l’activité des êtres vivants avec la température. Ce principe s’applique aussi bien aux microorganismes qu’aux végétaux et animaux hautement organisés. Un abaissement suffisant de la température bloque complètement l’activité microbienne, permettant une conservation de longue durée, par congélation, d’aliments aussi bien que de vaccins ou de ferments. L’inactivation ou la destruction par le froid de certains insectes est mise à profit pour assurer la conservation de certains produits infestés à température ordinaire, comme les fourrures par les mites, les céréales, les fruits secs par les charançons et des insectes divers.

À l’inverse de ces actions léthales ou retardatrices, le refroidissement provoqué d’une atmosphère trop chaude permet de créer, pour un être vivant, des conditions optimales : c’est l’immense domaine du conditionnement de l’air, essentiellement appliqué pour favoriser le travail, le repos, le confort de l’homme et, dans quelques cas, la production des animaux domestiques. Plus rarement, en médecine, on réduit volontairement par le froid l’activité de l’homme (hibernation artificielle) ou de certains de ses organes en vue de soigner (cryothérapie) ou d’opérer (cryochirurgie).

• Changement d’état. C’est dans les industries chimiques ou connexes que les changements d’état provoqués par le froid (liquéfaction d’un gaz, solidification d’un liquide) sont le plus largement exploités. L’industrie de la liquéfaction des gaz a divers objets : soit préparer des produits de base pour l’industrie chimique (chlore, éthylène) ou des agents de réaction (oxygène), soit concentrer des substances énergétiques sous une forme aisément transportable et stockable (oxygène et hydrogène utilisés comme propergols de fusées ; gaz pétroliers et gaz naturel liquéfiés), ou bien encore préparer des liquides dont la vaporisation ultérieure fournira du froid à très basse température (azote, hydrogène, hélium). À ce dernier point se rattache la solidification du gaz carbonique pour préparer la glace carbonique, utilisée comme agent de refroidissement. L’industrie chimique sépare des mélanges de liquides par congélation (déparaffinage des huiles de pétrole), récupère par liquéfaction des solvants volatils ou dégazoline le gaz naturel. Un des procédés du dessalement de l’eau de mer consiste à congeler l’eau pour en séparer le sel.

Dans des domaines très différents, la solidification obtenue par le froid vise à modifier la texture physique : par exemple congélation de terrains humides en vue d’y creuser une galerie ou un puits de mine. Les patinoires se rattachent à cette catégorie. Le durcissement par refroidissement de substances liquides ou pâteuses est couramment employé dans diverses industries agricoles : beurrerie, margarinerie, chocolaterie, etc.