Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Frescobaldi (Girolamo) (suite)

Girolamo Frescobaldi est l’élève du Ferrarais Luzzasco Luzzaschi (1545-1607). Ferrare est, à la fin du xvie s., le siège d’une activité musicale très grande, et Luzzaschi, ancien élève de Cyprien de Rore, organiste de la cathédrale et directeur de la chapelle ducale, y joue un rôle important. Dès l’âge de vingt ans, Frescobaldi est un musicien réputé qui s’est fait connaître dans les principales villes d’Italie par ses qualités de chanteur et d’instrumentiste. Au début de 1607, il est organiste à Santa Maria in Trastevere à Rome, où il s’est établi depuis 1604. Puis il quitte son poste pour suivre dans son voyage vers les Flandres celui que le pape venait de nommer comme nonce à Bruxelles, le cardinal Bentivoglio, originaire comme lui de Ferrare. En 1608, il revient en Italie et est nommé sur concours au poste d’organiste de la chapelle Giulia à Saint-Pierre de Rome. En 1615, sollicité par le duc de Mantoue, il envisage d’entrer au service de celui-ci. Il fait alors un bref séjour à Mantoue, mais l’accueil peu chaleureux qu’il y reçoit le décide à retourner à Rome. En 1628, avec l’accord du chapitre de Saint-Pierre, il quitte de nouveau Rome et passe six ans à Florence au service de Ferdinand II de Médicis. En 1634, vraisemblablement pour fuir une ville assaillie par la guerre, la famine et la peste, il reprend son poste à Rome et le garde jusqu’à sa mort en 1643.

Frescobaldi consacra beaucoup de soins et une partie de ses revenus à la publication de recueils de ses œuvres, et c’est sous cette forme que l’essentiel de ce qu’il a composé nous est parvenu (quelques pièces se trouvent dans des recueils collectifs, d’autres sont restées manuscrites).

Sa musique vocale est représentée par un livre de madrigaux (1608), un livre de motets (1627) et deux livres d’airs (1630). Elle ne présente pas un intérêt particulier pour l’époque. Beaucoup plus important est le livre de Canzone paru en 1628 et destiné à « toutes sortes d’instruments ». Ces œuvres sont un jalon essentiel dans la genèse de la sonate à trois.

C’est cependant dans sa musique pour clavier que se trouve l’apport principal de Frescobaldi. Dans leur publication originale, les pièces pour orgue ou clavecin constituent un ensemble de sept livres, repris, parfois augmentés ou regroupés, dans des éditions ultérieures.

Deux livres de toccate et partite (1615 et 1627), reparus ensemble dans une édition augmentée en 1637, contiennent également des danses et des versets d’hymnes.

Les partite sont écrites sur des motifs connus et très utilisés à l’époque comme la romanesca, le ruggiero ou la folia. Les toccate, dont l’allure improvisée ne doit pas cacher la fermeté de l’architecture, utilisent des formules ornementales propres à la technique du clavier et s’enrichissent d’une virtuosité instrumentale nouvelle, qui se trouve toujours subordonnée, cependant, à l’expression musicale. Leur style est plus proche de la mélodie accompagnée que de la polyphonie traditionnelle.

Par contre, dans quatre autres recueils, l’utilisation prédominante du style fugato et le faible ambitus des sujets rappellent plus le style vocal « ancien » : ce sont les Fantasie de 1608, les Ricercari e canzoni de 1615, les Capricci de 1624 (ces deux derniers livres sont regroupés en un seul dans une édition de 1628) et les Canzone posthumes de 1645. D’une construction rigoureuse, ces pièces font preuve d’une grande ingéniosité dans l’utilisation du sujet, qui peut être présenté tronqué, ou modifié par des variations rythmiques ou mélodiques.

Enfin, le recueil des Fiori musicali (1635), le plus connu, réunit des pièces diverses, toccate, versets, canzoni, ricercari, etc., groupées pour leur usage liturgique dans l’ordre déterminé par leur destination au cours de la messe, formant trois « messes » d’orgue.

Dans ces compositions qui possèdent un caractère plus religieux, Frescobaldi utilise fréquemment chromatisme et dissonances.

Frescobaldi n’a donc pas créé de formes nouvelles. Il a utilisé celles du passé en les renouvelant de l’intérieur par un sens profond du caractère propre de l’instrument pour lequel il écrit, une grande invention créatrice dans l’emploi de la variation et une sensibilité harmonique très personnelle.

Bien qu’à la fin de sa vie il soit entouré de nombreux élèves, Frescobaldi n’aura pas de vrais successeurs en Italie, où l’école d’orgue déclinera après lui.

C’est l’Allemagne du Sud qui recueillera son héritage par l’intermédiaire de Froberger*, venu de Vienne pour travailler avec lui de 1637 à 1641. Là, son influence aura un rôle analogue à celui de J. P. Sweelinck* pour l’Allemagne du Nord.

Il appartiendra à J.-S. Bach de porter à leur achèvement ces deux courants musicaux et d’en accomplir la synthèse.

C. D.

 A. Machabey, G. Frescobaldi (La Colombe, 1953).

Fresnel (Augustin)

Physicien français (Chambrais, auj. Broglie, Eure, 1788 - Ville-d’Avray 1827).


Augustin Fresnel est issu d’une vieille famille bourgeoise de Normandie. Son père, Jacques Fresnel, architecte à Caen, avait été appelé au château de Broglie pour en assurer la réfection ; il y épousa la fille du régisseur, François Mérimée, ancien avocat au parlement de Rouen et grand-père de l’écrivain Prosper Mérimée. Augustin aura trois frères, dont deux entreront comme lui à l’École polytechnique mais sans laisser d’œuvre durable. Loin de la tourmente révolutionnaire, la famille va se réfugier à Mathieu, village proche de Caen, où Jacques Fresnel est né.

La santé d’Augustin est fragile, et ses études sont tardives et pénibles. À huit ans, il sait à peine lire ; apprendre le latin lui coûte de durs efforts. Il ne montre d’aptitude que pour les petites inventions, et ses frères le surnomment l’« homme de génie », mais les étrangers le prennent pour un enfant borné. Cependant, mis à treize ans au lycée de Caen, il se révèle en mathématiques et fait des progrès si rapides qu’il entre à seize ans à l’École polytechnique, en 1804.