Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
F

Frères mineurs (suite)

Ainsi débuta, dans l’élan retrouvé du groupe des premiers apôtres et des communautés chrétiennes primitives, une vie fraternelle fondée sur l’Evangile : ils priaient, ils s’aimaient, ils aidaient les gens, ils prêchaient et voulaient par là témoigner sur terre que « le Royaume est déjà parmi nous » (visée eschatologique) et que le ciel s’élabore ici-bas (visée éthique).


Aujourd’hui

Avec toute l’Église, l’ordre franciscain participe à l’entreprise de revitalisation générale, d’aggiornamento, promue par le concile Vatican II. Il retrouve, en particulier, la mobilité de ses effectifs et la diversité des tâches. À la différence des autres ordres, en effet, il ne se donne pour but aucun travail spécialisé ni exclusif : les fils de saint François sont comme les « plombiers-zingueurs de la chrétienté », disponibles pour répondre aux appels des évêques là où apparaissent des urgences. Mais toujours l’agent de l’apostolat franciscain sera non pas tel individu, mais une fraternité.

Actuellement, des activités anciennes sont remises en valeur, des formules nouvelles sont proposées, par exemple la dissémination de fraternités réduites, axées soit sur le travail (en usine, aux champs ou à l’université), soit sur la prière (ermitages comme à la Cordelle près de Vézelay). Mais les activités traditionnelles ne sont pas délaissées pour autant.

La tradition missionnaire est toujours en honneur, avec prise en charge de territoires sur tous les continents, organisation de paroisses, d’écoles, d’hôpitaux et de séminaires, et implantation de formes de vie religieuse adaptées au génie et à la culture de chaque région.

La tradition théologique est maintenue aussi, surtout dans les grands centres de Rome, New York, Cologne et Jérusalem. La contribution des théologiens de l’ordre est appréciable surtout en christologie. La Bible est un autre de leurs domaines favoris, témoin cette Bible en chinois parue en 1969, œuvre du Centre franciscain de Hongkong, à laquelle ont travaillé pendant vingt-trois ans quatre pères chinois, un allemand, un français et un italien.

L’aide au clergé séculier, enfin, mobilise le plus gros des troupes : soit pour le suppléer en prenant en charge des paroisses dans les diocèses sans prêtres ; soit pour l’épauler dans les tâches de la prédication, de la catéchèse et de l’administration des sacrements ; ou encore pour le décharger en s’occupant de l’assistance spirituelle des communautés masculines ou féminines et des aumôneries de lycées, d’action catholique, d’hôpitaux ou d’universités.

Ainsi donc est maintenue, quelles que soient les formes que revêtent ses diverses activités et les mutations sociologiques, la vocation séculaire de l’institution : faire rencontrer aux hommes Jésus-Christ, et cela dans un climat où règnent les trois constantes de l’histoire de l’ordre : la simplicité, l’amour fraternel et la joie.

La postérité de saint François

• Appellation canonique : Frères mineurs.

• Appellations populaires : en France, cordeliers (à cause de la corde dont ils se ceignent) ; en Angleterre, grey friars (à cause de la couleur de l’habit) ; en Allemagne, Barfüsser (à cause de leurs pieds nus).

• Réformes successives :
— au xiiie s., tendances déviationnistes des spirituels et des fraticelles, condamnées par Jean XXII en 1317 ;
— au xive s., réforme des observants, avec saint Bernardin de Sienne, approuvés comme branche autonome de l’ordre par le concile de Constance en 1415, le reste de l’ordre étant désigné sous le terme de conventuels ;
— au xve s., réformes des colettans en France (sainte Colette [Corbie 1381 - Gand 1447]), des amadéens (bienheureux Amédée de Savoie [Turin 1845 - id. 1890]), des déchaussés en Espagne (Juan de la Puebla [1453-1495]) ; toutes trois sont réunies aux observants par Léon X en 1517 ;
— au xvie s., réforme des capucins (Matteo da Bascio [1495-1552]), qui deviendront complètement autonomes en 1619. Réformes des alcantarins en Espagne, des récollets en France, des réformés en Italie ; toutes trois seront regroupées avec les observants par Léon XIII en 1897.

Actuellement subsistent trois branches de l’ordre. Effectifs en 1971 :
franciscains 23 484
capucins 14 127
conventuels 4 590.

• Le deuxième ordre (les Clarisses, ainsi appelées du nom de sainte Claire) compte 17 463 religieuses, dont 1 332 en France, réparties en 54 monastères.

• Le troisième ordre comporte des chrétiens menant chez eux la vie professionnelle et familiale selon la spiritualité franciscaine ; c’est le tiers ordre, ou fraternité séculière de saint François. Il comporte, en outre, des instituts, surtout féminins, regroupant leurs membres en fraternités régulières stables aux engagements apostoliques bien définis ; il y a dans le monde 189 congrégations franciscaines féminines, avec 103 042 membres.

Les ordres dits « mendiants »

L’ordre des Frères mineurs fait partie de ce que l’on appelle les ordres mendiants (avec les Dominicains*, les Carmes* et les ermites de Saint-Augustin*). Ce titre risque de donner le change : l’idéal de François d’Assise n’est pas la mendicité, mais le travail. L’aumône n’est légitime que faute de travail, ou faute de salaire après travail : alors seulement on peut « mendier pour soi et pour ses frères ». Encore était-il interdit de recevoir une offrande en espèces ; seule l’aumône en nature était primitivement permise.

D. V.

➙ Église catholique ou romaine / Religieux.

 1. SAINT FRANÇOIS D’ASSISE. P. Sabatier, Vie de saint François (Fischbacher, 1894 ; nouv. éd., 1931). / J. Joergensen, Saint François d’Assise (en danois, Copenhague, 1907 ; trad. fr., Perrin, 1913 ; nouv. éd., 1961). / O. Englebert, Vie de saint François (A. Michel, 1947). / V. M. Breton, la Spiritualité franciscaine (Éd. franciscaines, 1948). / E. Longpré, Saint François d’Assise (Beauchesne, 1966). / T. Desbonnets et D. Vorreux, Saint François d’Assise, documents (Éd. franciscaines, 1968). / S. Piat, Saint François d’Assise (Éd. franciscaines, 1968). / E. Leclerc, le Cantique des créatures ou les Symboles de l’union (Fayard, 1970).
2. SON ORDRE. H. Holzapfel, Handbuch der Geschichte des Franziskaner Ordens (Fribourg-en-Brisgau, 1909). / P. Gratien, Histoire de la fondation et de l’évolution de l’ordre des Frères mineurs au xiiie siècle (Libr. Saint-François, 1927). / F. de Sessevalle, Histoire générale de l’ordre de saint François (Éd. de la revue d’Hist. franciscaine, Le Puy, 1935-1937 ; 2 vol.). / J. R. H. Moorman, A History of the Franciscan Order from its Origin to the Year 1517 (Oxford, 1968).