Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
F

Franco Bahamonde (Francisco) (suite)

Le généralissime gouverne avec l’appui de l’armée, de l’Église, de la Phalange et des grands propriétaires. Il met en place les Cortes (1942), dont les représentants sont nommés par le gouvernement ou élus par les corporations. Le 26 juillet 1947, la loi de succession, stipulant que l’Espagne est une monarchie dont Franco est le chef habilité à nommer son successeur quand il le jugera opportun, est approuvée par référendum. Le général Franco choisit ses ministres en appliquant un habile système de bascule entre les différents groupes.


L’évolution depuis 1953

À partir de 1953, l’Espagne reprend sa place dans le concert des nations. Franco accepte en effet à cette date l’établissement sur le sol espagnol de bases nord-américaines et reçoit en contrepartie une aide substantielle des États-Unis. Cet accord est renouvelé en 1958, puis en 1969, et suivi d’un « accord d’amitié » en 1970. Il signe avec le Vatican un concordat (1953) qui rétablit ce qui avait été aboli par la République et resserre donc les liens entre l’Église et l’État. En 1955, l’O. N. U. accueille l’Espagne parmi ses membres. Il en est de même pour l’O. E. C. E. (1958), et le président Eisenhower se rend en visite officielle à Madrid en 1959.

En 1956, devant le nationalisme grandissant au Maroc, Franco renonce au protectorat espagnol sur ce pays et ne conserve que Ceuta, Melilla, la Guinée équatoriale, indépendante en 1968, et l’enclave d’Ifni, rendue aux Marocains en 1969. Trois ans plus tard, il fait preuve d’un certain esprit de conciliation en déclarant que les exilés et réfugiés politiques peuvent rentrer s’ils le désirent. La loi organique de l’État du 22 novembre 1966 est soumise à référendum en décembre 1966 et promulguée en janvier 1967.

Depuis 1965 environ, le développement économique — rendu possible par des années de paix, la participation à la vie internationale et l’apport des capitaux étrangers — commence à se faire sentir. Le troisième plan de développement, prévu pour quatre ans, commence en 1972. L’émigration a tendance à se stabiliser, et l’afflux des touristes est bien loin de jouer un rôle négligeable. Franco fait de plus en plus appel, au détriment de la Phalange, qui a légalement disparu en 1967, aux technocrates de l’Opus Dei, dont les objectifs essentiels sont précisément l’expansion et l’ouverture sur l’Europe (signature avec le Marché commun d’un accord commercial préférentiel, 1970).

Le 22 juillet 1969, les Cortes approuvent à une majorité écrasante la désignation du prince don Juan Carlos de Bourbon comme successeur du général Franco en qualité de roi.

Le régime que le général Franco incarne est l’un des plus contestés qui soient, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur : le général Franco est, en effet, considéré par les uns comme un dictateur pérennisant des méthodes condamnées par les démocraties modernes, par les autres comme étant le seul homme capable d’assurer à l’Espagne, encore marquée par les séquelles d’une atroce guerre civile, son intégration dans l’Europe.

R. G.-P.

➙ Espagne / Espagne (guerre civile d’) / Maroc.

 J. Arrarás, Franco (Burgos, 1938 ; trad. fr., Éd. de France, 1938). / J. Millám Astray, Franco, el Caudillo (Madrid, 1939). / R. Serrano Súñer, Entre Hendaya y Gibraltar (Madrid, 1947). / E. J. Hugues, l’Espagne de Franco (Éd. du Temps présent, 1948). / F. Mirandet, l’Espagne de Franco (Hachette, 1948). / A. Villers, l’Espagne de Franco (Écran du Monde, Bruxelles, 1956). / C. Martin, Franco, soldat et chef d’État (les Quatre Fils Aymon, 1959). / L. Ramirez, Francisco Franco, hijo de Dios (Ruedo Iberico, 1964 ; trad. fr. Vie de Francisco Franco, régent d’Espagne par la grâce de Dieu, Maspéro, 1966). / G. Hills, Franco, the Man and his Nation (Londres, 1967). / B. Crozier, Franco (Boston, 1968 ; trad. fr., Mercure de France, 1969). / M. Gallo, Histoire de l’Espagne franquiste (Laffont, 1969). / J. Georgel, le Franquisme, histoire et bilan, 1939-1969 (Éd. du Seuil, 1970).

franco-allemande (guerre)

Conflit qui, en 1870, opposa la Prusse, assistée des États allemands, à la France. La défaite de cette dernière détermina en 1871 l’annexion de l’Alsace-Lorraine au nouvel Empire allemand.



Introduction

Depuis Sadowa (1866), il était clair que l’unité allemande était en passe de se faire autour de la Prusse et que la France était directement menacée par la formation d’un empire allemand unitaire. À l’effort militaire de la Prusse, vainement signalé par le colonel Eugène Stoffel (1823-1907), attaché militaire français à Berlin, ne répondirent que les mesures insuffisantes prises en 1868 par le maréchal Niel.

Dès 1867, l’affaire du Luxembourg faillit provoquer le conflit, mais un compromis intervint, et le gouvernement de Napoléon III était dans l’euphorie du plébiscite du 8 mai 1870 quand surgit un nouveau casus belli. La succession au trône d’Espagne, vacant depuis 1868, fut en effet offerte à Léopold de Hohenzollern-Sigmaringen, membre de la branche catholique de la célèbre famille, et il est certain que la présence d’un prince allemand à Madrid constituait un danger pour la France. Aussi la nouvelle de l’acceptation de la candidature Hohenzollern souleva-t-elle l’opinion française, quand elle fut connue, le 1er juillet.

L’affaire sembla pourtant trouver un règlement diplomatique. Le 9 juillet, l’ambassadeur français, le comte Vincent Benedetti (1817-1900), fit une démarche pressante auprès du roi de Prusse Guillaume Ier, qui prenait les eaux à Ems. L’entretien fut favorable ; un accord se fit le 11, et, le 12, la candidature du prince Léopold était retirée. Mais cet heureux résultat n’apparut pas suffisant à l’impératrice et à son entourage, qui souhaitaient donner au régime le prestige d’un succès plus brillant. On exigea donc que notre ambassadeur obtînt l’assurance que les Hohenzollern renonceraient pour toujours au trône d’Espagne. Cette fois, Guillaume Ier se lassa et fit répondre à Benedetti qu’il n’avait pas d’autre communication à lui adresser. Bismarck*, mis au courant de ce petit incident par une dépêche, en altéra volontairement le récit avant de le rendre public dans la soirée du 13 juillet. À vrai dire, la version maquillée de la dépêche ne faisait pas apparaître une grave insulte pour le gouvernement français, mais la sensibilité aux formes diplomatiques était tout autre en 1870 qu’aujourd’hui, et le texte défiguré lui donnait un ton suffisamment acide pour provoquer la fureur de l’opinion. Certes, il y eut quelques opposants lors de la séance du Parlement le 15 juillet, certes Napoléon III ne partageait pas l’optimisme d’Émile Ollivier (« De ce jour, dit-il, commence une grande responsabilité. Nous l’acceptons d’un cœur léger. »), mais la déclaration de guerre n’en fut pas moins signée le 19 juillet.