Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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France (campagne de) [1940] (suite)

Alors que les meilleures et surtout les mieux équipées des unités françaises sont ainsi éliminées de la bataille, ce fut un tour de force pour Weygand de constituer avec des divisions prélevées sur le front est et en Algérie de nouvelles armées (Xe Altmayer, VIIe Frère, VIe Touchon) sur les coupures de la Somme et de l’Aisne, où, malheureusement, faute d’effectifs, les réserves sont inexistantes. Face à 150 divisions allemandes, sur un front de près de 550 km, Weygand ne dispose plus que d’environ 50 divisions, dont il exigera et obtiendra un immense effort. Du 27 au 30 mai, un groupement blindé où combat la 4e division cuirassée (de Gaulle) réduit de 14 km la tête de pont allemande au sud d’Abbeville, mais ne parvient pas à rejeter l’ennemi au nord de la Somme.

Dès le 5 juin commence l’ultime bataille de France par une violente attaque de 6 Panzerdivisionen sur la Somme en direction de Rouen, qui est atteint le 9. Le même jour, l’offensive de la Wehrmacht s’étend au front de l’Aisne : après deux jours de très durs combats, les Allemands sont sur la Marne le 11, jour où l’Italie déclare la guerre à la France.

La veille, le gouvernement, où le maréchal Pétain est vice-président du Conseil depuis le 18 mai, a quitté Paris pour Tours. Au même moment, 8 Panzerdivisionen aux ordres de Guderian sont lancées en direction de Langres et de Belfort pour encercler le groupe d’armées français de l’Est. Le 12, Weygand prescrit la retraite générale des troupes de la ligne Maginot et de l’ensemble de ses forces sur la ligne Caen-Tours-Morvan-Dijon et le Doubs, et demande au gouvernement la conclusion d’un armistice. Paris, déclaré ville ouverte, est occupé le 14 par la Wehrmacht, tandis que le gouvernement doit de nouveau se replier sur Bordeaux. Le 17, les Allemands sont à Orléans, le 18 au Mans, le 19 à Rennes et à Nantes, le 20 à Brest. Dans l’Est, après une vaine tentative d’attaque vers le sud, les unités de forteresse forment dans les Vosges des îlots de résistance, qui, isolés de tout, sont contraints de cesser le combat. Lyon est occupé depuis le 20, et, malgré l’héroïque résistance des cadets à Saumur, les Allemands franchissent la Loire et atteignent La Rochelle le 22. Aux unités en retraite se mêle l’immense et lamentable cortège des populations, qui, fuyant l’invasion allemande, encombrent les routes et paralysent l’action du commandement.

Toutefois, l’armée des Alpes du général René Olry (1880-1944), qui, avec 6 divisions, contient facilement l’attaque des 40 divisions italiennes, réussit à freiner au nord l’avance allemande au-delà du Rhône. Après la démission, le 16, du cabinet Reynaud, Pétain, devenu président du Conseil, avait aussitôt demandé l’armistice le 17 juin. La délégation française, présidée par le général Huntziger, fut reçue le 21 par Hitler à Rethondes, dans le wagon même où avait été scellée la défaite du IIe Reich en novembre 1918 ; après d’âpres et vaines discussions, l’armistice est signé le 22 juin, mais le feu ne doit cesser qu’après la conclusion d’un armistice distinct avec l’Italie, qui sera conclu à Rome le 24. Les hostilités s’arrêteront le 25 juin.

Après celui de la Pologne, l’effondrement de la France en six semaines et son occupation par la Wehrmacht aura sur le plan politique des conséquences incalculables pour ce pays. Sur le plan extérieur, il donne à l’Allemagne le contrôle de toute la façade maritime de l’Europe occidentale et bouleverse ainsi les données du conflit.

Dunkerque 27 mai - 4 juin 1940

Dès qu’est consommé l’échec du plan Weygand, auquel ils n’ont guère cru ni coopéré, les Anglais consacrent tous leurs efforts à l’évacuation de leurs troupes par Dunkerque. L’opération, baptisée Dynamo, est confiée à l’amiral Bretram Ramsay (1883-1945). Churchill, qui tient à tout prix à récupérer les divisions de Gort (elles constituent l’essentiel de son armée), en informe Paul Reynaud le 26 mai ; les embarquements commencent le lendemain (7 700 hommes), mais l’amiral Abrial, commandant français de Dunkerque, et le général Blanchard, qui, depuis la mort de Billotte, a pris la tête du 1er groupe d’armées, n’en sont avisés que le 29. À cette date, la situation du front terrestre allié est devenue dramatique : la capitulation belge a brutalement découvert sa face nord, reportée sur l’Yser, tandis que les 4e et 5e corps français, qui défendront Lille jusqu’au 31, sont coupés de Dunkerque par les Allemands. Le 30, la défense est réduite au seul périmètre du camp retranché de Dunkerque, qui suit les canaux de Mardyck et de la Colme. À cette date, 126 000 Anglais et seulement 6 000 Français ont embarqué. Après les vigoureuses interventions de Paul Reynaud et de Darlan à Londres, l’opération Dynamo est poursuivie sur les plages les 2, 3 et 4 juin, où 64 000 Français s’embarquent sous un déluge de bombes et de feu. Le succès de l’opération est inespéré, puisque celle-ci a permis en neuf jours le passage en Angleterre de 338 000 hommes (218 000 Britanniques et 120 000 Français). 861 bâtiments de tous types (693 anglais et 168 français) ont participé à la bataille de Dunkerque : 243 (dont 226 anglais) furent coulés en grande partie du fait des attaques incessantes de la Luftwaffe. C’est le 31 mai et le 1er juin que les marines alliées accompliront leurs plus hautes performances, en embarquant durant ces quarante-huit heures 132 000 hommes.

M. D. et P. D.

➙ Aviation / Blindé / Guerre mondiale (Seconde).

 M. Bloch, l’Étrange Défaite (Éd. Franc-Tireur, 1946). / G. Roton, Années cruciales. La course aux armements, 1933-1939, la campagne 1939-1940 (Charles-Lavauzelle, 1947). / M. Weygand, Rappelé au service (Flammarion, 1950). / R. de Belot, la Marine française pendant la campagne 1939-1940 (Plon, 1954). / A. Goutard, 1940. La guerre des occasions perdues (Hachette, 1956). / L. Koeltz, Comment s’est joué notre destin, Hitler et l’offensive du 10 mai 1940 (Hachette, 1957). / A. Beaufre, le Drame de 1940 (Plon, 1965). / H. Michel, la Drôle de guerre (Hachette, 1971). / M. Launay, l’Armistice de 1940 (P. U. F., 1972).