Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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France (suite)

• 1787-88 : Loménie de Brienne* ne peut plus rien d’efficace, car il se heurte violemment aux puissants parlements. Il pousse la réforme de Lamoignon* (8 mai 1788), dissociant les pouvoirs politiques et judiciaires des parlements ; violente opposition (émeutes à Rennes et Grenoble surtout). Si bien que la réunion des États généraux, réclamée par l’opinion, est accordée (8 août 1788).

• 25 août 1788 : renvoi de Loménie de Brienne. Retour acclamé de Necker ; sa popularité s’accroît quand il accorde le doublement du tiers état pour la représentation aux États généraux.


La révolution* française (1789-1799)


Causes et forces de la Révolution

Pourquoi la révolution ?
La cause essentielle de la Révolution est l’inadaptation du féodalisme à la société moderne et l’incapacité du régime à se réformer.
Le féodalisme se présente sous diverses formes ; possession d’un tiers du sol par les privilégiés (noblesse, clergé) ; survivance des droits féodaux et seigneuriaux qui grèvent la terre et alourdissent une vie économique dominée par les rythmes oppressants d’une économie de subsistance ; refoulement social du bourgeois par une hiérarchie d’ordres.
L’inachèvement du système étatique de la monarchie absolue (enchevêtrement des circonscriptions), la lourdeur et l’inégale répartition de la fiscalité d’État, le durcissement de la noblesse et du haut clergé (réaction seigneuriale et nobiliaire à la fin de l’Ancien Régime) face à la montée des roturiers riches et éclairés sont aussi à l’origine de la Révolution.

Les forces d’attaque
En 1789, la collusion de la monarchie absolutiste avec l’aristocratie nobiliaire est flagrante aux yeux des deux forces d’attaque de la Révolution : la paysannerie et la bourgeoisie.
La paysannerie vit en général dans la gêne à une époque où monte la courbe d’un long mouvement de hausse des prix, où l’explosion démographique et les progrès techniques trouvent des structures de production agricole inchangées.
La bourgeoisie — multiple — est constituée essentiellement par les forces productrices de la nation (négociants, commerçants, artisans...) et par les forces de pensée, les professions libérales, la bourgeoisie de service (avocats, notaires, médecins...). C’est dans ce milieu que la philosophie des lumières est la plus répandue et se réduit en idées-forces (liberté, égalité, fraternité...) qui vont donner son sens à la Révolution.
C’est la crise économique grossie au cours des années 80 qui sert de catalyseur aux mécontentements enracinés ; le traité de commerce franco-anglais de 1786 — qui affecte l’industrie touchée par la concurrence — et la récolte désastreuse de 1788 précipitent le mouvement de révolte. La crise sociale amplifie la crise politique, nouée autour de la coalition des parlements, qui se déchaîne surtout en Béarn, en Bretagne et dans le Dauphiné (Vizille).


États généraux et Assemblée nationale constituante* (1789-1791)

• Les États généraux se réunissent à Versailles le 5 mai 1789. Les partisans des réformes (tiers, bas clergé et quelques nobles) sont numériquement les plus nombreux et souhaitent le vote par tête. Le roi ne décidant rien, le tiers se déclare Assemblée nationale et s’engage par le serment du Jeu de paume (20 juin) à donner une constitution au pays. Louis XVI cède, et, le 9 juillet, les États généraux deviennent Assemblée nationale constituante. Le renvoi de Necker (11 juill.) et la prise de la Bastille par les Parisiens (14 juill.) relancent le conflit.

• Une municipalité révolutionnaire et une garde nationale s’installent à Paris, bientôt imité par les villes de province. L’ancienne administration s’effondre tandis que la révolte agraire arme les campagnes contre leurs seigneurs et les privilèges. Cette révolte se mue (seconde quinzaine de juillet) en un mouvement plus vaste et déroutant, panique collective qu’on appelle la Grande Peur et qui déconcerte l’Assemblée bourgeoise ; celle-ci va désormais contrôler et diriger la Révolution populaire. Dans la nuit du 4 août, elle abolit les privilèges et les droits féodaux avant de voter la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen (26 août).

• Le rappel de quelques troupes à Versailles mécontente les Parisiens, qui, les 5 et 6 octobre, envahissent Versailles et ramènent de force la famille royale à Paris. C’est la capitale et ses clubs qui seront désormais au cœur de la Révolution.

• Avant même l’achèvement du texte constitutionnel, la pression des besoins financiers entraîne la Révolution à mettre à la disposition de la nation les biens du clergé (2 nov. 1789). Les acquéreurs de ces biens nationaux (1/10 du territoire) seront surtout des bourgeois ou des paysans aisés qui vont former une masse (3 millions d’individus) naturellement attachée aux réalisations de la Révolution.

• Cette nationalisation est inséparable de la fonctionnarisation qu’entreprend la Constitution civile du clergé (12 juill. 1790) : celle-ci provoque une cassure entre prêtres ayant prêté le serment civique (jureurs) et les réfractaires et bouleverse en fait la vie chrétienne en France.

• La Constituante remplace toutes les structures administratives de l’Ancien Régime, souvent incohérentes : les 83 départements servent de cadre aux institutions et fonctions judiciaires, religieuses, financière de la France contemporaine.

• Ces mesures apparaissent tellement fondamentales que l’on songe à consacrer l’achèvement de la Révolution par la célébration de la Fédération (14 juill. 1790).

• La fuite de Louis XVI et son arrestation à Varennes (nuit du 20 au 21 juin 1791) provoquent un grand trouble. Alors que des pétitionnaires, animés par le club des Cordeliers, réclament la déchéance du roi, La Fayette, commandant la garde nationale, fait tirer sur eux (17 juill. 1791). Et, tandis que l’émigration alimente à l’extérieur des complots contre la France révolutionnaire, nombre de provinces (Ouest et Midi surtout) sont travaillées par un fort mouvement contre-révolutionnaire, auquel s’oppose, à Paris et dans les villes, un mouvement de sans-culottes fortement politisé et qui pousse à la chute de la royauté.

• La Constitution de septembre 1791 maintient une monarchie héréditaire jouissant d’un veto suspensif face à une Assemblée législative unique ; elle consacre la distinction entre citoyens actifs et citoyens passifs, distinction contraire à l’esprit d’égalité prônée par la Déclaration des droits de l’homme.