Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
F

Fou-kien (suite)

Le Fujian est montagneux. Les montagnes ne sont pas très élevées, inférieures à 2 000 m, mais elles sont très abruptes : le mont Gushan (Kou-chan) se dresse d’un coup à 900 m au-dessus de la petite plaine de Fuzhou. Plaines et vallées n’occupent que 5 p. 100 de la superficie. Les montagnes dessinent deux alignements principaux orientés S.-O. - N.-E. : les Daiyunshan (Tai-yun-chan) à l’est, les Wuyishan (Wou-yi-chan) à l’ouest, dont la ligne de crête forme la limite avec le Jiangxi. Les vallées sont très encaissées. Elles dessinent un réseau à angles droits, la rivière principale, le Min, étant perpendiculaire aux lignes de relief (donc N.-O. - S.-E.), cependant que ses affluents, le Dongxi (Tong-si) et le Shaxi (Cha-si), sont parallèles aux crêtes.

Ce relief mouvementé s’enfonce sous la mer : de là une côte de subsidence extrêmement découpée avec une multitude d’estuaires et de caps. Cette côte est frangée de très nombreuses îles, parmi lesquelles les archipels de Quemoy (Jinmen) et de Matsu (Mazu). Les sites portuaires sont très nombreux : malheureusement, les ports n’ont pas d’arrière-pays, car les rivières et même le Min (577 km) ne sont navigables que dans leur cours tout à fait inférieur, étant en amont coupés de rapides.

Le Fujian est presque tropical. L’été est chaud, encore que tempéré sur la côte par des brises marines. L’hiver n’est pas froid : la moyenne de janvier est supérieure à 10 °C, et il y a plus de dix mois sans gel. Par ailleurs, les pluies sont abondantes, supérieures à 1 500 mm ; ce sont surtout des pluies d’été, apportées par la mousson, mais aucun mois ne reçoit moins de 30 mm de pluies, novembre étant le mois le plus sec. En septembre et en octobre, la côte du Fujian est ravagée par des typhons (quatre ou cinq par an en moyenne) qui atteignent une vigueur inégalée ailleurs, sauf au Japon.

En dépit de sa violence, ce climat permet une magnifique végétation, que les hommes, ici, n’ont pas complètement détruite. Sur les basses pentes poussent des plantes d’affinités tropicales, à feuilles persistantes (Ficus religiosa, camphrier) ou à feuilles caduques (laquier, aleurite et surtout bambous), entremêlées de lianes tempérées (chèvrefeuille, glycine) et dominant myrtes et azalées ; en altitude, les conifères tempérés l’emportent (pins et cèdres).

Les conditions de l’agriculture sont difficiles. Dans les plaines et les vallées, les hommes ont développé de longue date une riziculture très intensive : deux récoltes de riz hâtifs (de mai à juillet et de juillet à octobre) pendant l’été, suivies de cultures de légumes ou d’engrais verts en automne et d’une culture de blé ou de soja, semé en février et récolté en mai, avant le repiquage du riz ; la double récolte de riz atteindrait localement 75 quintaux à l’hectare ; la canne à sucre s’est parfois substituée au riz ; les vergers produisent oranges, mandarines, pamplemousses et surtout longanes et litchis. Les pentes ont été quelque peu mises en valeur par des champs, souvent en terrasses, de maïs, de millets et de patates douces ; ailleurs, un conifère, Cunninghamia, est systématiquement planté et coupé à vingt ans ; les hautes pentes, notamment celles des Wuyishan, portent des théiers. Ici le théier est presque une monoculture (il faut importer le riz). C’est une culture très minutieuse : les arbustes ont été plantés sur des terrasses au sol légèrement en pente, retenu par des murettes de pierres ; ce sol est retourné trois fois l’an à la houe et sarclé cinq fois ; il est soigneusement fumé ; les feuilles sont cueillies à quatre reprises, d’avril (« thé d’avant les pluies ») à septembre ; elles sont séparées de leur pédoncule, triées avant d’être torréfiées dans des bassines. Un hectare de théiers exigerait plus de 2 000 journées de travail. Les thés des Wuyishan sont les plus renommés de la Chine, et le mot thé serait d’ailleurs un mot du dialecte du Fujian ; au milieu du siècle dernier, jusque vers 1870, les exportations de thé par les « tea clippers » assurèrent une grande prospérité aux ports commerciaux du Fujian : Amoy (Xiamen) et Fuzhou.

L’activité de ceux-ci est aujourd’hui très réduite, en dehors d’une pêche maritime active, qui anime aussi de très nombreux ports de pêche. L’activité commerciale est presque nulle, d’autant que la Chine nationaliste tient les îles Matsu, face à Fuzhou (500 000 hab. environ), et les îles Quemoy, face à Amoy. Les deux ports, cependant, sont reliés par voie ferrée à la grande ligne de Canton à Shanghai. Une centrale hydro-électrique a été aménagée sur le Min à Gutian (Kou-t’ien), et, dans le cadre de la politique de décentralisation industrielle, quelques industries ont été implantées à Fuzhou. À l’abri des Wuyishan, le Fujian a gardé ses dialectes très vivants (trois dialectes principaux). Ceux-ci sont parlés aussi à Taiwan et dans une grande partie de l’Asie du Sud-Est, et en particulier à Singapour. Le Fujian a été une grande région d’émigration vers les « mers du Sud », conséquence de l’esprit dynamique de ses habitants et aussi des densités très élevées des zones basses (parfois 2 000 hab. au km2).

J. D.

foule

Type particulier d’agrégat social dont les membres sont réunis en un même endroit, de façon purement fortuite ou bien de propos délibéré.


La foule est caractérisée par cette contagion affective dans laquelle risquent de tomber à chaque instant les individus qui la composent. Dans la première moitié du xxe s., les sociologues, à la suite de Gustave Le Bon (1841-1931), ont mis l’accent sur l’irresponsabilité de la foule, sur son sentiment irrésistible de puissance et sur ce qu’ils ont appelé sa nature féminine, c’est-à-dire le caractère déraisonnable de ses actions et de ses sentiments.

Les observations de ces dernières années ont fait justice de telles interprétations, et, si l’on admet encore que l’individu dans une foule ne se conduit pas exactement comme il le ferait s’il était pris isolément, on estime que ses prédispositions sont seulement facilitées ou, si l’on préfère, « catalysées » par la foule. Les observations montrent notamment que les actes posés par les individus de la foule ne sont jamais en contradiction avec ce à quoi les inclinent ordinairement leur tempérament et leur conviction préalable.

F. B.

➙ Groupe.