Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
F

Foucault (Michel) (suite)

Quatre critères sont immédiatement disponibles pour spécifier les ensembles énonciatifs : unité de l’objet comme point de référence de certains énoncés, unité du type d’énonciation utilisé, unité de concepts permanents et cohérents entre eux, identité d’opinion ; autant de critères que M. Foucault va redoubler pour leur substituer des principes d’individualisation autrement contrôlés. Le « référentiel » définit l’unité d’un discours par la règle de formation de tous ses « objets », l’« écart énonciatif » précise l’unité d’un discours par la règle de formation de tous ses « types syntaxiques », le « réseau théorique » rend compte de l’unité d’un discours par la règle de formation de tous ses « éléments sémantiques », le « champ de possibilités stratégiques » reconnaît l’unité d’un discours dans la règle de formation de toutes ses « éventualités opératoires ».

Il suffit de repérer dans un groupe d’énoncés ces quatre critères pour être sûr d’être en présence d’une formation discursive qui se distingue par sa positivité. Ce sont des unités d’une nature différente de la science, car elles sont « épistémologiquement neutres ».

M. K.

➙ Folie.

Les œuvres de Michel Foucault

1961

Histoire de la folie à l’âge classique, folie et déraison.

1962

Kant : Anthropologie. Introduction, traduction et notes.

1963

Naissance de la clinique, une archéologie du regard médical. Raymond Roussel.

1966

les Mots et les choses, une archéologie des sciences humaines.

1968

Archéologie des sciences : réponse au Cercle d’épistémologie. Cahiers pour l’analyse no 9.

1969

l’Archéologie du savoir.

1976

Histoire de la sexualité. I, la Volonté de savoir.

Fouché (Joseph)

Homme politique français (Le Pellerin, près de Nantes, 1759 - Trieste 1820).



Le révolutionnaire

Entré en 1781 au séminaire de l’Oratoire, à Paris, il se montre élève pieux et studieux, puis (1782-1790) devient professeur — non-prêtre — aux collèges de Niort, de Saumur, de Vendôme, de Juilly, d’Arras : dans cette dernière ville, il se lie avec Robespierre* et Lazare Carnot*, et, sous leur influence, il évolue vers les idées nouvelles.

Après avoir enseigné à l’oratoire de Nantes, il est élu (sept. 1792) député de la Loire-Inférieure. Il siège d’abord à droite de la Convention*, mais vote la mort du roi (janv. 1793) et passe brusquement à l’extrême gauche par crainte de ne pas faire partie de la majorité. Il est alors envoyé en mission en province, où, partisan de la « Révolution intégrale », il affiche un jacobinisme fervent. À Nevers, notamment, il attaque les « mauvais riches », « les accapareurs et les monopoleurs », monte en chaire pour exalter les vertus de Brutus, déclare la guerre au christianisme et signe un célèbre arrêté (9 oct. 1793) qui se termine par ces mots : « La mort est un sommeil éternel. » À Moulins, il fait brûler les objets du culte et peut orgueilleusement écrire au Comité de salut public : « Le fanatisme est foudroyé. »

Le 10 novembre 1793, il rejoint Col-lot d’Herbois à Lyon pour organiser la répression d’une ville qui a osé renverser la municipalité terroriste et guillotiner son chef Joseph Chalier (1747-1793). Les représailles sont atroces, les mitraillades de la plaine des Brotteaux, les fusillades et la guillotine déciment la population. « Il faut que les cadavres ensanglantés [...] offrent [...] l’impression de l’épouvante et l’image de la toute-puissance du peuple », proclament les deux proconsuls.

Mais ces excès déplaisent à Robespierre, qui, par ailleurs, est irrité de la politique antireligieuse de Fouché. Ce dernier est rappelé à Paris (mars 1794) : élu président des Jacobins*, il est en butte aux attaques de l’Incorruptible et exclu du club. Du coup, se jugeant menacé, il s’allie aux adversaires de Robespierre. « Attisant en secret les peurs et les haines », il contribue au succès de la journée du 9 thermidor. Mais la réaction ne lui pardonne pas ses crimes passés : décrété d’accusation (9 août 1795), Fouché disparaît de la scène politique et connaît avec sa famille des années de misère ; il vit d’expédients, notamment de rapports de police secrète pour le compte de Barras. Celui-ci, en effet, inquiet des progrès des menées royalistes, cherche à s’appuyer sur des éléments jacobins. Aussi, Fouché, sortant de l’oubli, est-il envoyé (oct. 1798) comme ministre plénipotentiaire à Turin, puis à La Haye. En juillet 1799, il apprend qu’il est nommé par le Directoire ministre de la Police.


Fouché, ministre de la Police

À peine au ministère, Fouché lance une proclamation : « J’ai pris l’engagement de rétablir la tranquillité intérieure, de mettre un terme aux massacres comme à l’oppression des républicains, d’arrêter les complots des traîtres et de ravir à l’étranger jusqu’à l’espoir d’un complice. » S’attelant à sa tâche, il frappe à gauche et à droite : il ferme le club des Jacobins de la rue du Bac et en jugule la presse ; en même temps, il fait saisir les journaux et les brochures royalistes. Par ces mesures, il s’attire la sympathie des « partis d’ordre ».

Mais sa perspicacité lui fait deviner que le régime va s’effondrer. Il se tourne alors vers Bonaparte, l’étoile montante. Au 18-Brumaire, il se charge d’« endormir le gouvernement dictatorial ». En récompense de sa complicité au coup d’État, il se voit maintenu au ministère. « La police, écrit-il, n’a pour but que le maintien de l’ordre social. » Fouché pratique donc une politique modérée, quoique ferme, à l’égard des éléments de droite. S’il ne sait empêcher l’explosion de la machine infernale (24 déc. 1800), il arrive vite à prouver au Premier consul que les royalistes sont les véritables auteurs de l’attentat et non les Jacobins. Avec ses fiches, ses indicateurs recrutés dans les milieux les plus divers, ses observateurs placés aussi bien dans les cabarets de Paris que dans les salons du faubourg Saint-Germain, il a entre les mains un instrument remarquablement organisé, malgré les « contre-polices » mises en place par Bonaparte. Celui-ci n’est pas sans s’inquiéter d’une telle puissance. Ne voulant pas renvoyer Fouché, il supprime le ministère (15 sept. 1802). En compensation, l’ex-ministre devient sénateur et reçoit la riche sénatorerie d’Aix : c’est la disgrâce dorée. Mais, après le départ de son chef, la police est dans une telle anarchie — Fouché en souligne d’ailleurs complaisamment les fautes — que, l’Empire proclamé, l’habile personnage retrouve son portefeuille (10 juill. 1804).