Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Florence (suite)

Les architectes de la seconde période restent fidèles à ces principes de construction : façades rythmiques, aménagement de la cour intérieure, le cortile, qui rachète par la grâce de ses colonnes l’aspect encore guerrier des demeures, ouvertures plus accueillantes. Giuliano da Sangallo* construit la villa de Poggio a Caiano, pour Laurent de Médicis, et la sacristie de Santo Spirito. Benedetto da Maiano (1442-1497) et Simone del Pollaiolo, dit il Cronaca (1457-1508), édifient le palazzo Strozzi. Mais c’est surtout dans des édicules tels que chaires, tombeaux, autels..., que se manifeste la délicatesse de cette période.


Sculpture

L’esprit médiéval est encore présent dans l’œuvre monumentale d’un Nanni di Banco (v. 1373-1421), tandis que la sculpture polychrome sur bois prolonge le souvenir de Nino Pisano, le fils d’Andrea. Vainqueur, au concours de 1401 pour la seconde porte du baptistère, de rivaux tels que Brunelleschi et Iacopo* della Quercia, chargé de la troisième en 1425, Lorenzo Ghiberti* y enrichit d’emprunts à l’Antiquité l’art harmonieux des Pisano et de Giotto. Dans ces panneaux étonnants, qui unissent naturalisme et élégance sensuelle, tous les problèmes de la perspective sont abordés.

Donatello*, sculpteur favori de Cosme l’Ancien, est une personnalité d’exception qui agit sur tous les aspects de l’art. Il travaille tout d’abord pour les chantiers de la cathédrale et d’Orsammichele, exécute des figures isolées de prophètes et de saints, suivis du célèbre David. Dans la cantoria de Santa Maria del Fiore (1433-1438), il allie plus intimement la sculpture à l’architecture et réinterprète l’antique. À partir de 1456, il se consacre à des compositions religieuses à caractère pathétique : Madeleine pénitente, scènes de la Passion de San Lorenzo. L’étonnement des contemporains devant son œuvre montre bien ce que son génie a de révolutionnaire.

Élèves de ces grands maîtres, les sculpteurs de Florence vont diffuser le thème des Madones à l’Enfant entourées de chérubins : Bernardo (1409-1464) et Antonio (1427-1479) Rossellino, Desiderio da Settignano (1428-1464), Mino da Fiesole (v. 1430-1484), Agostino di Duccio (1418-1481), Benedetto da Maiano, déjà cité comme architecte, Luca Della Robbia* dans la technique de la terre cuite vernissée. Antonio Pollaiolo* et Andrea Verrocchio*, également peintres, aboutissent dans la seconde moitié du siècle, par leur sens de la réalité et leur lyrisme, à des effets théâtraux qui témoignent d’une nouvelle évolution.


Peinture

Alors que l’Ombrien Gentile da Fabriano peint à Florence l’Adoration des Mages (1423), chef-d’œuvre du style gothique international, deux grands artistes vont être les véritables descendants de Giotto. Fra Angelico*, épris de tons purs à la suite de sa formation de miniaturiste, garde cette technique pour les tableaux d’autel. Dans ses compositions murales, il oriente ses recherches vers une organisation spatiale animée d’architectures légères. Masaccio*, élève de Masolino da Panicale, compose avec celui-ci, vers 1425, les fresques de la chapelle Brancacci à Santa Maria del Carmine. Ici, la figure humaine tourne et se meut dans l’espace, le modelé joue dans l’ombre et la lumière, l’air circule, la matière s’anime pour devenir pensée ; par son art réaliste et puissant, Masaccio inaugure vraiment la peinture de la Renaissance. Pour Paolo Uccello*, Domenico* Veneziano et Andrea* del Castagno, l’art est d’abord une question d’intelligence ; ils résolvent des problèmes d’anatomie et de géométrie, expérimentent passionnément les possibilités de la perspective scientifique et portent ainsi la peinture vers l’abstraction plastique. Parallèlement, Fra Filippo Lippi* établit un heureux compromis entre les pures valeurs picturales et le goût narratif.

Durant la seconde moitié du xve s. apparaît une nouvelle génération de peintres que l’on peut, par commodité, répartir en deux groupes. D’une part, ceux qui vont représenter l’univers réel : Benozzo Gozzoli*, qui multiplie les effigies de ses contemporains dans les fresques de la chapelle du palazzo Medici, Cosimo Rosselli (1439-1507) et surtout Domenico Ghirlandaio*, dont l’Histoire de la Vierge et de saint Jean-Baptiste à Santa Maria Novella est aussi une galerie de portraits. D’autre part, ceux qui vont évoquer un univers rêvé, guidés par l’intellectualisme de Laurent le Magnifique : Alessio Baldovinetti (1425-1499), puis Sandro Botticelli*, élève de Filippo Lippi et protégé des Médicis, qui le choisissent pour peindre des allégories d’un classicisme mélodieux et subtil : le Printemps, Minerve et le centaure, la Naissance de Vénus ; au tournant du siècle, l’artiste connaîtra une crise morale et religieuse sous l’influence de Savonarole.


La haute Renaissance (fin xve - xvie s.)

Après la mort de Laurent de Médicis (1492), Florence tombe dans l’agitation, les contradictions et l’anarchie politique. La fin du xve s. est dominée par l’apparition de deux artistes, Léonard* de Vinci et Michel-Ange*, enfants de Florence et de ce siècle éblouissant. À l’aube des Temps modernes, ils vont porter l’art à l’un de ses points les plus sublimes. Étude de la nature et étude de l’Antiquité leur permettent d’atteindre une quintessence de la beauté et, dans la représentation plastique de l’être humain, un point de perfection et d’exaltation qui ne fut égalé, en Occident, que par la Grèce.

Léonard de Vinci, esprit universel, règne sur les deux âges de la Renaissance. Formé à Florence dans l’atelier de Verrocchio, il voyage et travaille beaucoup au dehors. En 1503, à son retour, il est confronté avec Michel-Ange dans la grande salle du Palazzo Vecchio, pour laquelle il peint la bataille d’Anghiari, en face de la bataille de Cascina de Michel-Ange (toutes deux disparues). La confrontation de ces deux géants, dont l’un représentait le génie intellectuel et l’autre le génie plastique de Florence, fut sans lendemain, mais, même loin de leur ville, ils ne cessèrent d’orienter son art. À la suite de Léonard, Fra Bartolomeo (1472-1517) inaugure le style dévot de Savonarole et se laisse séduire par les tamisés du clair-obscur. Andrea del Sarto (1486-1530), fidèle au quattrocento dans les fresques de la Santissima Annunziata (1510), laisse des portraits d’une persuasive intuition psychologique. Raphaël*, né à Urbino, gagne Florence au moment où Michel-Ange et Léonard s’affrontent ; à ce carrefour d’influences, il établit les bases d’un rare équilibre classique.