Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
F

flamenco (suite)

Les cafés cantantes désertés, le flamenco subsiste dans les tavernes, les juergas, où le duende anime chanteurs, danseurs et guitaristes, dans des coplas (couplets), où les pitos (sifflements et claquements secs des doigts), les palmas (frappements des mains), les golpes (coups portés sur la guitare pour accentuer le rythme) se mêlent aux encouragements (jaleos) des assistants.

Il n’est resté que peu d’œuvres écrites des poètes du flamenco des siècles passés ; aucune transcription manuscrite n’a été faite des milliers d’improvisations de guitare. Peu considérés à leur époque, les premiers artistes flamencos sont oubliés de presque tous. Mais, depuis le xixe s., de nombreux artistes ont chanté l’art andalou, son chant, sa danse, sa guitare, « qui fait pleurer les songes » (F. García Lorca).

Quelques danses et chants flamencos

(Ils sont presque tous de rythme ternaire.)

alegrías, morceaux empreints de noblesse, avec le troisième temps fort (Cadix, Grenade), chantés, dansés ou joués en soli.

bulerías, danses de kermesses, avec des moqueries et des imitations, auxquelles participent les assistants en battant dans leurs mains.

fandango, danse andalouse, sans doute la plus connue, qui a donné naissance aux granadinas, rondeñas, malagueñas, qui peuvent être aussi chantées et jouées.

farruca, danse virile qui mime les gestes du matador face au taureau. (L’artiste se fait remarquer par ses suertes [passes].)

malagueña, danse de Malaga, issue du fandango, où le chant alterne avec la danse.

seguiriya ou séguedille gitane, un des plus typiques chants primitifs andalous, aux formules incantatoires.

sevillana, danse empreinte de bonne humeur et de gaieté, composée de sept couplets dont quatre sont dansés avec accompagnement de guitare et de castagnettes.

soleares, danses solennelles, avec claquements secs des doigts, sur des poèmes évoquant la solitude, les souffrances de l’amour et les angoisses de la mort.

tango, danse bien différente du tango argentin et procédant par taconeos (martèlement des talons) rapides ; par ses poses recherchées, il met la danseuse en valeur.

tanguillo, danse de Cadix, gaie et très bruyante (taconeos et rythmes scandés de la guitare).

zambra, danse mauresque, évoquant le bruit des assemblées gitanes dans la caverne du Sacro Monte.

zapateado, danse très rapide, rythmée par le martèlement des pieds (pointes, talons, semelles), laissant libre cours à la plus grande virtuosité.

Les artistes du flamenco

• Chanteurs et chanteuses : Manuel García (père de la Malibran) don Antonio Chacón, Manuel Torres, Silverio Franconetti y Aguilar, Manolo Caracol, Encarnación López, Tomás Pavón, Pedro de Linares.

• Danseurs et danseuses : José Otero, Juan el Estampío, Paco Ruiz Espinosa, Carmen Amaya (la Capitana), la Faraona, la Chunga, Vicente Escudero (auteur du Décalogue de la danse flamenca, 1951), Juan Magriñá, Antonio, Luisillo, Antonio Gades, Antonia Mercé, dite la Argentina, Trini Borrull (auteur de plusieurs ouvrages sur la danse flamenca), la Joselito, Mariemma, Pilar López, Nieves la Pimienta.

• Guitaristes : Francisco Rodríguez, dit el Murciano, Javier Molina, Ramón Montoya, Román el Granaíno, Niño Ricardo, Cascabel de Jerez, Manitas de Plata, Paco Peña, Pedro Soler.

H. H.

flamingantisme

L’indépendance de la Belgique réalise ce que quinze ans de rattachement aux Pays-Bas n’avaient pu opérer : le réveil de la conscience flamande.


Partageant l’euphorie que suscite la révolution de 1830, les premiers flamingants sont des patriotes enthousiastes, encouragés par le gouvernement, qui exaltent le passé national et travaillent à la renaissance de la culture flamande. L’identité belge, ni française ni hollandaise, sera catholique et flamande. Par ailleurs, le pays légal tout entier est francophone, et l’instauration d’un libéralisme linguistique assure d’autant mieux la prédominance traditionnelle du français que le déclin séculaire de la culture flamande a rabaissé l’usage du flamand au niveau de la masse sans instruction. Langue usuelle de l’élite, le français s’impose sans peine comme langue officielle.

Les flamingants de la première génération ne songent nullement à mettre en cause le bilinguisme de la Flandre, qui assure aux yeux de tous l’unité culturelle du pays. Au contraire, même, ils se réclameront du bilinguisme pour contester l’unilinguisme de nombreux fonctionnaires francophones en Flandre et la francisation qui en résulte. Leur cible principale est la haute bourgeoisie, les fransquillons, Flamands dénaturés méprisant leurs origines. Le flamingantisme se réduit alors à une double exigence : le bilinguisme obligatoire de tous les fonctionnaires de Flandre et une place faite à la langue maternelle dans l’enseignement. Le refus opposé à ces revendications transforme le flamingantisme en un mouvement politique. À partir des années 1840, la multiplication des pétitions élargit l’audience du mouvement, confiné jusque-là dans les cénacles littéraires. Pourtant, seules les classes moyennes seront sensibilisées, car tant que se maintient le régime censitaire, la masse de la population demeure apolitique. Ce système électoral assure également l’homogénéité linguistique du Parlement, où la question linguistique restera longtemps un problème marginal.

Les premières concessions législatives accordées aux Flamands sont dues essentiellement à la constitution, après 1860, de coalitions locales flamingantes, et d’autre part à quelques scandales juridiques retentissants. Mais, en dépit d’une protection juridique au demeurant encore assez timide, les Flamands continuent souvent à être jugés, administrés, commandés et instruits en français. Dans les collèges se crée un mouvement de jeunesse flamand, soutenu par le bas clergé.

Par l’instauration en 1893 du suffrage universel (mitigé jusqu’en 1919 par le vote plural), le mouvement flamand acquiert une base sociale et une représentation parlementaire sensiblement élargies.