Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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fissuration (suite)

Causes de fissuration


Ambiance

C’est le cas des mortiers et des bétons de ciment, quand le retrait, consécutif à une période de sécheresse, subit une croissance trop rapide ou quand il atteint une valeur excessive ; c’est encore le cas de constructions en bois non protégé, édifiées dans une région à hygrométrie trop basse.


Nature et état des constituants

Ce type de causes de fissuration s’applique particulièrement aux constructions en béton de ciment et aux parties d’ouvrages comportant des enduits.

• Excès de ciment. Dans les mortiers et les bétons, le ciment est l’élément actif qui, en faisant prise et en durcissant, subit un retrait normal à l’air ambiant, le retrait hygrométrique. En cinq ans, les pâtes pures de ciment subissent un retrait global d’environ 0,5 mm/m, dont la moitié est atteinte au bout d’un an. Le retrait des mortiers est le tiers de celui des pâtes pures, et celui des bétons est la moitié de celui des mortiers. S’il y a trop de ciment (plus de 400 kg/m3 de béton) ou si l’atmosphère est trop desséchante, le retrait s’accélère, s’accentue et augmente le danger de fissuration.

• Emploi d’un sable souillé. La fissuration des enduits de mortier et des bétons de ciment peut aussi être due non à l’excès de ciment, mais à l’emploi d’un sable souillé (sable argileux) ou d’un sable contenant des éléments expansifs, notamment du gypse.

• Alcali-réaction. Certains granulats (calcédoine, opale commune, certaines variétés de silex) à base de silice sont dits « réactifs », provoquant l’expansion et la fissuration du béton au contact des alcalis du ciment ; ce phénomène, qui s’est surtout présenté aux États-Unis, est connu sous le nom d’alcali-réaction.

• Granulats à arêtes vives. La fissuration interne du béton peut encore être provoquée par l’utilisation de graviers à arêtes très vives, tels que les silex concassés.

• Éléments expansifs. D’autres produits, contenus dans les granulats des bétons, ont une réaction expansive, donc fissurante : tels sont les pyrites et les mâchefers provenant de l’incinération des ordures ménagères.


Conception du béton ou du type de mortier

La fissuration peut être due à un béton ou à un mortier gâchés avec trop d’eau ; le poids de l’eau ne doit pas dépasser en général la moitié du poids du ciment. La fissuration peut résulter aussi du choix d’un type de ciment inadéquat.

Sous les climats froids et sous les climats secs, il faut des ciments à durcissement rapide. Les ciments riches en laitier ou en pouzzolanes ne conviennent pas aux climats secs et froids, mais ils donnent de bons résultats sous des climats suffisamment chauds et humides.


Mise en œuvre des bétons et des mortiers

Il ne faut pas appliquer les mortiers par journée chaude, sèche et ensoleillée. Pour éviter les déperditions d’eau et maintenir humide le béton durant les trois premières semaines, on doit soigner les coffrages, ou, mieux, pulvériser en surface un vernis temporaire, appelé produit de cure ou curing compound.


Contraintes excessives

Il faut un béton très compact, bien vibré et dosé à 350 kg de ciment en moyenne par mètre cube de béton. On obtient ainsi un matériau homogène, ayant une bonne adhérence aux armatures d’acier et, en même temps, une protection contre la rouille expansive, capable d’occuper un volume décuple de celui du fer-métal. Soumise à des contraintes excessives, une pièce peut se fissurer et même s’effondrer.

Si les fissures apparaissent dans une pièce tendue, c’est que les contraintes imposées à l’acier sont trop élevées pour le béton ou que ce dernier présente une résistance ou une adhérence insuffisantes. Pour y parer, il faut multiplier le nombre des armatures ou réaliser un béton spécialement résistant à la traction.

Les fissures fines normales aux barres ne sont pas dangereuses au point de vue de la stabilité de l’ouvrage, mais elles peuvent entraîner la corrosion de l’acier par pénétration capillaire de l’eau. Quand les fissures apparaissent perpendiculairement à la partie inférieure d’une poutre armée, c’est l’indice d’une insuffisance des armatures tendues, qu’il faut alors renforcer. Si, au contraire, des fissures apparaissent longitudinalement à la partie supérieure du béton de la poutre, c’est l’indice d’une résistance trop faible du béton à la compression.

Dans le béton précontraint, les fissures sont rares ; quand elles apparaissent, elles sont toujours très fines et elles se referment sous l’effet de la précontrainte ou se colmatent par formation de calcite.


Altération du béton ou corrosion des armatures

La fissuration peut survenir par expansion due soit à l’action de granulats siliceux réactifs ou d’eaux séléniteuses avec formation d’un sel expansif dit « sel de Candlot », soit à la présence de chaux libre surcuite ou de magnésie cristallisée anhydre (périclase). Le béton armé se fissure souvent par formation de rouille expansive provoquée par un mauvais recouvrement des fers (moins de 2,5 cm) ou par suite d’un béton trop poreux, de même que par l’emploi d’adjuvants à base de chlorures salins : il y a attaque électrolytique. Il faut se méfier des embruns salés le long du littoral. Le remède contre la rouille consiste à pratiquer une bonne hydrofugation de la surface du béton avec du silicate de potassium ou du fluosilicate de magnésium.


Conception même de l’ouvrage


Absence des joints nécessaires

Quand les pièces sont minces, le retrait se produit plus rapidement que dans le cas de pièces massives. Quand, le long d’une pièce, existent des variations de dimensions, des rétrécissements, des élargissements, il se produit des variations de retrait qui créent des tensions internes, lesquelles sont des facteurs de fissuration ; des angles rentrants très aigus amorcent l’effet d’entaille, cause d’une sorte de « déchirement » du béton. Les variations de forme exigent l’emploi d’étriers jouant un rôle de renforcement.