Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
F

filiation

Série des intermédiaires qui rattachent une personne à un ancêtre déterminé.
Plus précisément, sur le plan juridique, rapport d’un individu avec ses auteurs immédiats : son père et sa mère.



Introduction

La filiation peut être légitime, naturelle ou adoptive (pour l’étude de cette dernière, v. adoption).

Le droit de la filiation a subi en France d’importantes modifications depuis la loi du 3 janvier 1972, qui rapproche la situation des enfants* naturels de celle des enfants légitimes en les faisant entrer notamment dans la famille de leur auteur, consacrant ainsi une conception singulièrement élargie de la famille. Cette même loi, si elle conserve la distinction anciennement faite entre les enfants naturels simples et les enfants adultérins, améliore considérablement le sort de ces derniers : désormais qualifiés d’« enfants dont, au temps de la conception, le père ou la mère était engagé dans les liens du mariage* avec une autre personne », ils peuvent être reconnus par leur auteur, être légitimés dans tous les cas, succéder au parent « engagé dans les liens du mariage » et même, avec l’accord du conjoint, s’introduire au domicile conjugal.

Pour déterminer si une filiation est légitime ou naturelle (et, dans ce cas, naturelle simple ou adultérine), le droit se réfère à trois dates : la date du mariage entre les deux auteurs, lorsqu’il y en a un, et la date de la naissance, d’où découle celle de la conception. Si les deux premières sont faciles à déterminer, la troisième l’est beaucoup moins. Aussi, la loi établit-elle une présomption selon laquelle l’enfant a été conçu pendant la période qui s’étend du 300e au 180e jour inclusivement avant la date de la naissance. À l’intérieur de cette période, l’enfant pourra placer sa conception à la date qui lui sera le plus favorable.


La filiation légitime


Présomption de paternité et action en désaveu

Si un enfant est conçu pendant le mariage de sa mère, il est présumé avoir pour père le mari de sa mère : il est légitime. Le mari de la mère peut, néanmoins, désavouer l’enfant en justice, en justifiant de faits propres à démontrer qu’il ne peut pas être le père (adultère, vieillesse du mari, couleur de peau de l’enfant, etc.).

La présomption ne joue pas dans les cas suivants :

• lorsque, en cas de jugement ou même de demande soit de divorce, soit de séparation de corps, l’enfant est né plus de 300 jours après l’ordonnance autorisant les époux à résider séparément et moins de 180 jours depuis le rejet définitif de la demande ou la réconciliation, la présomption de paternité retrouvant néanmoins de plein droit sa force si l’enfant a, à l’égard des époux, la possession d’état d’enfant légitime ;

• lorsque l’enfant, inscrit sans l’indication du nom du mari, n’a de possession d’état qu’à l’égard de la mère.

Dans ces deux cas, la filiation de l’enfant est établie à l’égard de la seule mère comme s’il y avait désaveu admis en justice. Chacun des époux pourra demander que les effets de la présomption de paternité soient rétablis, en justifiant que, pendant la période légale de la conception, une réunion de fait a eu lieu entre eux.

L’enfant né avant le 180e jour du mariage est réputé légitime, mais il pourra être désavoué, et, dans ce cas, le mari pourra non seulement justifier de faits propres à démontrer qu’il ne peut pas en être le père, mais aussi invoquer la seule preuve de la date de l’accouchement, à moins qu’il n’ait connu la grossesse avant le mariage ou qu’il ne se soit, après la naissance, comporté comme le père.

L’action en désaveu doit être formée par le mari dans les six mois de la naissance lorsqu’il se trouve sur les lieux, sinon dans les six mois de son retour ou dans les six mois qui suivent la découverte de la fraude si la naissance de l’enfant lui avait été cachée.

Si le mari est mort avant d’avoir formé l’action dans les délais utiles pour le faire, ses héritiers auront qualité pour contester la légitimité de l’enfant, et ce dans un délai de six mois après que l’enfant se sera mis en possession des biens de son prétendu père ou que les héritiers auront été troublés dans leur possession.

En l’absence de désaveu du père, la mère pourra contester la paternité du mari, mais seulement aux fins de légitimation de l’enfant, quand elle se sera, après dissolution du mariage, remariée avec le véritable père de l’enfant. L’action sera alors introduite par elle et son nouveau conjoint dans les six mois de leur mariage et avant que l’enfant ait atteint l’âge de sept ans.


Preuve de la filiation légitime

Elle est établie par les actes de naissance et, à défaut, par la possession d’état d’enfant légitime, c’est-à-dire une réunion suffisante de faits indiquant le rapport de filiation (nom, fait d’être traité comme enfant, fait que les père et mère ont pourvu à l’éducation de l’enfant, fait que celui-ci est reconnu comme tel par la société, par la famille, par l’autorité publique). Il n’y a de possession d’état d’enfant légitime que lorsqu’elle rattache l’enfant indivisiblement à ses père et mère.

Nul ne pourra contester son état si sa possession d’état est conforme à son acte de naissance, et personne ne pourra le lui contester, sauf cas de supposition ou de substitution d’enfant.

À défaut de titre ou de possession d’état, la preuve de sa filiation pourra se faire par témoins s’il existe un commencement de preuve par écrit (titres de famille, papiers domestiques, etc.) ou des présomptions et des indices graves.

La preuve contraire pourra se faire par tous les moyens propres à établir que le réclamant n’est pas l’enfant de la mère qu’il prétend avoir ou, la maternité prouvée, qu’il n’est pas l’enfant du mari de la mère.


La légitimation

La même situation que celle des enfants légitimes pourra bénéficier à tous les enfants naturels dont les parents se sont mariés après leur naissance si leur filiation a été légalement établie soit, avant le mariage, par reconnaissance ou jugement, soit, au moment du mariage, par reconnaissance. Si la filiation d’un enfant naturel n’a été établie qu’après le mariage, un jugement sera nécessaire pour qu’il y ait légitimation ; ce jugement constatera que l’enfant a, depuis la célébration du mariage, la possession d’état d’enfant commun. La légitimation prend effet à la date du mariage.