Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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feuille (suite)

Les feuilles de Cyprès sont en forme d’aiguille à l’état jeune et en écailles à l’âge adulte ; cela se retrouve aussi chez certains Genévriers et bien d’autres Gymnospermes. À ce propos, la question s’est posée de savoir si les formes de jeunesse, comme les structures embryonnaires, étaient forcément plus primitives que les formes adultes, en application du principe que l’« ontogénie retrace la phylogénie ». Des études ont montré que, dans certains cas d’évolution régressive, on peut trouver des formes de jeunesse d’aspect plus évolué que la forme adulte, à qui la surévolution a donné des caractères primitifs, et que dans d’autres (au début de l’évolution d’un phylum) la forme de jeunesse annonce l’évolution future.


Phyllotaxie

La disposition des feuilles sur la tige est dénommée phyllotaxie ; elle peut être caractéristique de l’espèce considérée. Diverses dispositions sont possibles. Les feuilles opposées sont attachées face à face sur un même nœud ; leur plan de symétrie est alors perpendiculaire à celui du couple de feuilles qui les précède et qui les suit (Œillet, Lilas, Ortie) ; quelquefois, elles se soudent entre elles en formant un petit cornet autour de la tige (Chèvrefeuille). Quand les feuilles sont groupées par trois (Laurier-Rose) ou plus (Gaillet), on dit alors qu’elles sont verticillées, les feuilles opposées n’étant qu’un cas particulier, où le verticille est réduit à deux éléments. Le plus souvent, les feuilles sont isolées (feuilles alternes) ; le plan de symétrie de deux feuilles successives fait alors un certain angle que l’on appelle angle de divergence (180° chez le Hêtre, 120° chez le Bouleau, 135° chez le Lin), et qui est caractéristique de l’espèce. Lorsque l’angle est de 180°, les feuilles se trouvent insérées sur deux génératrices du cylindre qui constitue la tige ; on parle alors d’une disposition alterne-distique.


Durée de vie des feuilles

Chez les plantes annuelles, les feuilles meurent en même temps que toute la plante, généralement en automne ; seules les premières feuilles poussées sur l’individu peuvent parfois se faner, jaunir et tomber plus tôt, laissant les plus jeunes assurer les fonctions normales.

Chez les plantes vivaces, deux cas peuvent se rencontrer : on a affaire ou bien à des végétaux à feuillage persistant (c’est le cas chez la presque totalité des Conifères [Pins, Sapins, Épicéas] et chez quelques Angiospermes, tel le Chêne vert, qui gardent leurs feuilles de deux à cinq ans suivant les espèces) ou bien à des arbres qui perdent toutes leurs feuilles chaque année. Parmi ces derniers, certains gardent leurs feuilles mortes, jaunes et fanées, jusqu’à la nouvelle pousse ; de telles feuilles sont dites « marcescentes » : c’est le cas de nombreux Chênes. D’autres arbres à feuilles caduques perdent leurs feuilles après le jaunissement et passent l’hiver les branches dénudées. C’est encore vivantes que les feuilles atteignent le sol, après s’être séparées de l’arbre au niveau d’une zone d’abscission qui traverse le pétiole ; cette couche apparaît en automne sous l’action de divers facteurs.


Mécanisme de la chute des feuilles

La chute des feuilles, qu’elles appartiennent à des végétaux à feuillage persistant ou à des plantes caduques, est précédée par des modifications chimiques : perte de protides, variations du taux d’auxine, changements de couleur ; en effet, la chlorophylle disparaît pendant que les pigments caroténoïdes augmentent (jaune et orangé) ; parfois on observe également une accumulation de substances anthocyaniques dans les vacuoles, ce qui donne des teintes violacées (Vigne vierge). Une assise génératrice subéro-phellodermique se constitue à la base du pétiole. Elle produit du liège, qui protège la tige après la séparation et obture la cicatrice. Cette zone d’abscission est portée par le pétiole. La formation de ces tissus dépend de plusieurs facteurs ; on a pu montrer que le limbe bien portant inhibe la formation de ces tissus dans son propre pétiole en diffusant une auxine. Par contre, le bourgeon terminal sécrète une autre auxine, qui accélère l’édification de la couche séparatrice. La présence de feuilles âgées dans le voisinage accélère également sa formation. En outre, on a pu mettre en évidence l’existence d’une auxine de sénescence qui active le phénomène. Enfin, certaines cytokinines — véritables élixirs de jeunesse — appliquées sur une feuille en vieillissement lui procurent la possibilité d’attirer vers elle l’eau et les aliments aux dépens de ses voisines ; elle reprend un aspect et une activité de feuille jeune et la formation de la zone d’abscission est inhibée.


Rôle physiologique de la feuille

Les feuilles sont présentes sur les végétaux pendant la phase de vie active des individus. Elles sont, en effet, directement liées aux principales fonctions de la vie de nutrition : assimilation, respiration, transpiration, absorption de l’eau et de substances minérales.


Photosynthèse

La principale fonction de la feuille est l’assimilation du gaz carbonique de l’air, qui, grâce à la lumière et par adjonction d’eau, est transformé en substances organiques. Les glucides sont ainsi synthétisés au niveau des feuilles, et ces éléments, en présence de nitrates, se transforment en protides, alors que d’autres molécules se modifient en lipides. C’est la seule source de carbone utilisée par les plantes vertes.

Cette fonction essentielle se produit lorsqu’un certain nombre de facteurs se trouvent réunis : il faut que la plante possède de la chlorophylle*, dont le parenchyme palissadique des feuilles est riche ; la lumière est indispensable (en effet, l’énergie lumineuse, fixée par les molécules de pigment, est la source énergétique qui permet les synthèses) ; naturellement, l’atmosphère où vit la plante doit contenir du gaz carbonique. L’air normal en possède 0,03 p. 100, alors que les plantes ont leur optimum aux environs de 5 p. 100 ! En outre, la température joue un rôle : le froid (0 °C et en dessous) bloque le phénomène, tandis qu’une élévation de température augmente la production (loi de Van’t Hoff) ; cependant, vers 50-60 °C, il y a arrêt des synthèses et mort du cytoplasme (v. photosynthèse). Ce travail se traduit extérieurement par une absorption de gaz carbonique et un rejet d’oxygène, mouvements de gaz inverses de ceux que l’on observe dans la respiration ; celle-ci est masquée chez les plantes vertes pendant la journée, car la photosynthèse en pleine lumière est plus forte que la respiration.

Outre cette absorption de carbone, la feuille est capable de suppléer ou d’aider plus ou moins les racines dans l’absorption de l’eau (rosée) et de certains sels minéraux.