féodalité (suite)
Ce type de garde, s’avérant particulièrement lucratif pour celui qui l’exerce, est adopté notamment en Normandie et en Angleterre par les Plantagenêts, auxquels Philippe II Auguste l’emprunte à partir de 1186. Quant au droit de mariage, c’est-à-dire au droit de choisir l’époux de l’héritière d’un fief, il s’explique par la nécessité où se trouve le sire de s’assurer de la fidélité de celui qui doit en remplir le service militaire aux lieu et place de sa femme, originellement exclue de la succession féodale en raison de son inaptitude naturelle à l’accomplir. Ce droit, exercé dès la fin du xe s. en France méridionale, se pratique couramment en Angleterre à la fin du xie s., en France du Nord et en Lotharingie au xiie s. et en Allemagne au xiiie s.
• Fille de l’hérédité, l’aliénabilité du fief porte une ultime atteinte à la nature même des liens vassaliques, qui sont des liens d’homme à homme. Ne pouvant s’opposer à cette revendication justifiée par les besoins financiers de leurs vassaux, les seigneurs imposent à ces derniers le respect de certaines règles : reconnaissance du droit de préemption du seigneur sur les biens et droits qu’il a concédés en fiefs (c’est le droit de retrait féodal) ; octroi par le seigneur d’une coûteuse autorisation préalable en cas de vente à un tiers ; obligation imposée à l’acheteur de faire hommage au seigneur avant d’en recevoir l’investiture au cours d’une cérémonie dite « de report de fief » aux Pays-Bas ; perception de lourds droits de mutation (quint ou quinta-denier en Île-de-France, représentant 20 p. 100 de la valeur vénale du fief) ; taxe dite « de mainmorte », d’un montant encore plus élevé en cas d’aliénation en faveur d’un établissement religieux qui refuse le service du fief ; droit enfin du seigneur de s’opposer à tout abrègement qui entraîne une réduction de ce même service.
Sans doute une telle pratique ne porte-t-elle pas atteinte à la mystique même de l’hommage. Mais, en favorisant le passage de nombreux fiefs entre des mains non nobles, en minorisant le service militaire des vassaux au profit de leurs devoirs fiscaux, l’aliénabilité des fiefs porte atteinte à ce qui fait l’originalité même de la féodalité.