Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

alliage (suite)

Les cristaux de métaux purs et de solutions solides se développent, au cours de la solidification, à partir de germes, ou centres, de cristallisation suivant des axes orthogonaux sous forme de rameaux, qui constituent des dendrites. Les conditions de solidification influent sur la forme, l’orientation et la dimension des cristaux. Lorsque les deux métaux, totalement solubles à l’état solide, forment une solution solide pour toutes les concentrations, les courbes de solidification constituent un fuseau soit de forme simple, soit avec un maximum ou un minimum. Les deux métaux peuvent ne présenter qu’une solubilité partielle à l’état solide, et, dans ce cas, deux diagrammes se rencontrent le plus fréquemment, correspondant à la réaction eutectique et à la réaction péritectique.

Le diagramme à eutectique est caractérisé par l’existence d’un alliage dit « eutectique », dont le point de fusion, semblable à celui d’un métal pur, ne présente aucun intervalle de solidification. Ainsi, dans les alliages cuivre-argent, l’alliage eutectique à 72 p. 100 d’argent fond à 780 °C, alors que le point de fusion des métaux constitutifs est de 1 083 °C pour le cuivre et 960 °C pour l’argent. La réaction eutectique, dite « invariante », puisqu’elle ne se produit qu’à la température eutectique θE pour la composition eutectique E, est réversible au refroidissement et au chauffage, et peut s’écrire, pour les alliages considérés de cuivre et d’argent, suivant l’équilibre

En raison de leur solidification congruente, les agrégats eutectiques ont une structure caractéristique lamellaire ou globulaire, résultant du dépôt alterné ou simultané des phases α et β. Pour les alliages de composition comprise entre a et b, dits eutectifères, la solidification commence par le dépôt du constituant proeutectique, phase α pour les alliages hypoeutectiques de composition comprise entre a et E, et phase β pour les alliages hypereutectiques de composition comprise entre E et b.

L’une des méthodes les plus utilisées pour la construction des courbes du liquidus et du solidus est l’analyse thermique, créée vers 1880 par Floris Osmond (1849-1912) et Jean Werth (1856-1924) ; elle consiste à enregistrer la variation de température de l’alliage au cours de son refroidissement à partir de l’état liquide. Toute transformation se traduit sur la courbe par une anomalie correspondant à un dégagement calorifique (changement de pente ou palier). Il est ainsi possible de construire l’allure du diagramme en enregistrant les courbes d’analyse thermique d’un certain nombre d’alliages.

La réaction péritectique ou du point de transition du liquidus, également invariante, s’effectue à la température θT pour l’alliage de composition correspondant au point P. À cette température, la phase α, déjà déposée au cours du refroidissement, réagit avec le liquide restant pour donner naissance à une nouvelle phase β, ce qui caractérise cette transformation suivant la réaction d’équilibre

En raison de la complexité de cette transformation, qui nécessite une diffusion mutuelle parfaite entre les constituants, la réaction est souvent incomplète ; les alliages de fonderie subissant cette réaction présentent de ce fait des structures anormales hors d’équilibre, qui obligent à un recuit d’homogénéisation des pièces moulées.

Le diagramme des alliages magnésium-zinc est un exemple de diagramme d’équilibre plus complexe, présentant plusieurs réactions à partir de l’état liquide. On peut noter l’existence d’une phase intermédiaire γ issue du composé défini MgZn2 et dont le point de fusion correspond au maximum de la courbe du liquidus ; pour certains alliages, le point de fusion d’un composé défini est supérieur à celui des deux métaux de l’alliage. Le composé défini MgZn ainsi que la phase intermédiaire ε (MgZn5) se décomposent avant fusion suivant une réaction péritectique.

Pour certains métaux, la solubilité à l’état liquide n’est pas totale, et il se forme une lacune de miscibilité pour un domaine de températures ; c’est le cas du diagramme cuivre-plomb, pour lequel il se forme des pseudo-alliages après refroidissement, puisque le cuivre et le plomb ne sont pratiquement pas alliés, mais juxtaposés dans un agrégat.


Réactions à l’état solide

À l’état solide, les métaux et alliages sont également le siège de nombreuses transformations de phases telles que : transformation allotropique de métaux purs et de solutions solides, variation de solubilité d’une phase en fonction de la température, décomposition d’une phase intermédiaire ou d’un composé défini, transformation eutectoïde et transformation péritectoïde. Ces deux dernières transformations sont semblables aux transformations eutectique et péritectique, mais la phase liquide est remplacée par une phase solide. La réaction eutectoïde type est celle des aciers* (alliages fer - carbone), qui se produit à 720 °C pour une teneur de 0,85 p. 100 en carbone, le constituant eutectoïde de structure fine lamellaire étant la perlite :

De même, dans les alliages cuivre-aluminium, il se forme un eutectoïde pour une teneur de 11,9 p. 100 en aluminium.


Diagrammes d’équilibre ternaires

L’étude des alliages plus complexes à trois ou à quatre éléments conduit à l’établissement de diagrammes d’équilibre ternaires ou quaternaires. Pour les diagrammes ternaires, par exemple, plusieurs représentations sont possibles à partir d’une surface de base, triangle équilatéral représentatif de la composition chimique, chaque sommet définissant un métal pur et la température étant portée verticalement : soit diagramme spatial, soit coupe triangulaire isotherme, soit coupe pseudo-binaire verticale ou projection sur le triangle de base. On représente ainsi les transformations plus complexes de solutions solides : phases intermédiaires, composés définis, eutectiques ternaires, etc.


Propriétés, traitements et méthodes d’étude

L’une des caractéristiques essentielles des alliages est de posséder des propriétés qui peuvent être très différentes de celles des métaux constituants : d’où leur intérêt. Ces propriétés sont en relation avec la constitution physico-chimique des alliages et rarement avec leur composition chimique immédiate. Ainsi, les propriétés physiques et mécaniques peuvent être classées en deux groupes :
— les propriétés spécifiques de la nature des phases et, de ce fait, peu influencées par la perfection cristalline et la structure micrographique : la masse volumique, la chaleur spécifique, le coefficient de dilatation, la température de fusion, les propriétés d’élasticité et d’anélasticité, les conductibilités électrique et thermique, le point de Curie du ferromagnétisme et le pouvoir thermo-électrique ;
— les propriétés influencées à la fois par la structure micrographique avec la répartition des constituants, la nature des phases, les imperfections des cristaux et leur finesse ; ces propriétés sont également sensibles aux états hors d’équilibre : les propriétés mécaniques mettant en évidence la déformation plastique, des propriétés de ferromagnétisme, la conductibilité des semi-conducteurs à basse température.

Les propriétés de certains alliages, très caractéristiques, placés en condition isotherme à température ambiante, varient notablement en fonction de la composition chimique.