Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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faune (suite)

La faune du continent africain

Le continent africain, émergé depuis plus de 300 millions d’années, donne asile à une faune dont l’évolution s’est accomplie pour beaucoup d’espèces sur le continent même. Cette faune est demeurée à l’abri de tout apport extérieur pendant de très longues périodes. Certains groupes, les Antilopes notamment, atteignent une richesse de formes extraordinaire, et des lignées entières de Primates ont pu s’isoler et se différencier. Cet isolement du continent pendant de très longues périodes n’exclut pourtant pas complètement des contacts avec d’autres régions pendant certaines époques géologiques. La distribution des Dinosaures, qui au Jurassique et au Crétacé s’étend au monde entier, ne peut trouver une explication que dans des relations continentales suffisamment durables. On sait que le bouclier africain a été en contact avec l’Inde, mais qu’il a été durablement isolé de l’Eurasie, au nord, par la Mésogée, dont notre actuelle mer Méditerranée est un vestige. Des relations continentales ont probablement existé avec l’Amérique au Jurassique. Mais, dès la fin du Secondaire, l’Afrique avait déjà acquis une forme très voisine de celle qu’elle a actuellement. Le sous-continent malgache est, dès cette époque, séparé de l’Afrique, mais demeure en relation avec l’Inde. L’Arabie, qui, pour certains groupes zoologiques, est africaine, demeure rattachée au continent jusqu’à la formation de la mer Rouge, au Pliocène supérieur. Elle se trouve d’ailleurs isolée de l’Asie jusqu’au Pliocène inférieur, prolongeant l’Afrique au nord-est. L’Afrique du Nord, ou Berbérie, est un domaine géologiquement et biologiquement indépendant du continent africain jusque sur la fin du Tertiaire. Elle apparaît à l’Éocène, puis disparaît presque entièrement pour émerger de nouveau et faire corps avec le continent africain à la fin de l’Oligocène. Elle n’est donc pas africaine, mais méditerranéenne ; son histoire est liée à celle de la Mésogée et non à celle du bouclier africain.

La végétation africaine révèle une certaine symétrie écologique de part et d’autre de l’équateur. La zone équatoriale est occupée en effet par deux blocs forestiers, dont le plus important, le bloc oriental, occupe la majeure partie du bassin du Congo au niveau de l’équateur. La grande forêt se maintient là à la faveur de précipitations importantes (de 1,50 m à plus de 3 m) et d’une température chaude comprise entre 22 et 26 °C. Ce climat est, en outre, relativement constant au cours de l’année et s’oppose en cela à celui des autres régions de l’Afrique. Au nord et au sud de cette zone apparaissent les forêts claires et les savanes, où les précipitations sont moins élevées (de 0,80 à 1,60 m) et où les températures s’élèvent davantage, mais où le climat accuse des variations saisonnières notables. Les forêts claires sont séparées du Sahara, au nord, et du Namib, au sud, par une zone de savanes appauvries (zone sahélienne et Kalahari), qui, d’une certaine manière, font le passage vers le désert. Enfin, une zone de steppes ou de prairies tropicales s’interpose aux deux extrémités du continent entre la région méditerranéenne, au nord, et le maquis du Cap, au sud. Cette symétrie que nous observons dans le climat et la végétation est moins sensible dans le peuplement animal. Elle se remarque surtout dans les types écologiques de groupements. Le Buffle et quelques autres espèces occupent cependant la zone des forêts claires au nord et au sud de l’équateur. Mais des groupes entiers, notamment dans les Insectes, diffèrent de part et d’autre de cette ligne.

Une brève revue des faunes fossiles du continent africain nous permet de comprendre comment la faune actuelle a pu prendre naissance. C’est ainsi que l’on sait qu’il existait déjà au Tertiaire des ancêtres possibles des espèces actuelles. Parmi ces ancêtres, il faut mentionner des Hipparions, des Giraffidés (en particulier le genre Samotherium, qui évoque l’Okapi actuel), des Rhinocéros, des Oryctéropes, des Autruches, des Tortues. Les Zèbres se manifestent dès la fin du Tertiaire. On connaît également des Lémuriens, des Simiens, des Anthropomorphes. Parmi ceux-ci, les Limnopithecus semblent annoncer les Hominiens. Au Quaternaire, la faune africaine est déjà plus qu’esquissée. L’Hippopotame actuel (Hippopotamus amphibius) existe en Afrique du Nord et en Afrique orientale. Les genres Gazella, Oryx, Bubalus ont également fait leur apparition. À cette même époque, Australopithecus africanus, avec un cerveau de 700 cm3, marque sans doute le début de l’humanité.

La faune de l’Afrique des tropiques a pour premier caractère une collection de Poissons d’eau douce incroyablement riche. Cette faune comprend en effet une quinzaine de familles de Poissons propres au continent. Deux remarquables reliques, les Polyptères et les Protoptères, dont l’évolution s’est pour ainsi dire arrêtée il y a des millions d’années si l’on en juge d’après les espèces fossiles que nous connaissons, doivent d’abord être mentionnées. Le groupe des Brachioptérygiens comprend une dizaine d’espèces exclusivement africaines. Celles-ci sont réparties en deux genres : les Polypterus et les Calamoichthys. Parmi les formes intéressantes formant cette faune des Poissons africains, il convient encore de citer les Dipneustes (Protopterus), dont certains ont la possibilité de s’enfoncer dans la vase et d’y survivre lorsque la saison sèche fait son apparition, les Poissons électriques (Gymnarchus niloticus, Malapterurus electricus), les Silures (250 espèces), les Cichlidés (Tilapia, Tylochromis, Haplochromis), les Poissons-Tigres (Hydrocyon goliath), les Tétraodons (Tetraodons mbu), qui, hors de l’eau, se gonflent comme un ballon, le Capitaine (Lates niloticus), Poisson africain le plus connu.


La savane

Le second caractère de la faune africaine réside dans la richesse des espèces de la savane. Ce faciès occupe en Afrique des étendues considérables. Les Antilopes sont, avec les Bovidés, des animaux très typiques de la savane. Les Girafes, les Phacochères, les Hippopotames, les Rhinocéros (Diceros bicornis, ou Rhinocéros noir, et Ceratorhinus simum, ou Rhinocéros blanc), les Zèbres (Dolichohippus Grevyi, Hippotigris quagga et H. zebra) entrent encore dans la biocénose des savanes africaines. Quant aux Éléphants, on semble s’accorder à reconnaître deux espèces : l’Éléphant d’Afrique (Loxodonta africana), forme de savane, et l’Éléphant de forêt (L. cyclotis). Parmi les Damans et les Rongeurs, nous remarquons des Écureuils, le Rat palmiste, le Rat de Gambie, les Heterocephalus — ces derniers présentent la morphologie et la physiologie des espèces inféodées au milieu souterrain —, les Lièvres sauteurs, qui miment les Kangourous, et le véritable Lièvre, Lepus capensis. Les savanes hébergent aussi l’Oryctérope (Orycteropus afer), forme curieusement archaïque qui recherche les Termites. Toute cette faune est maintenue en équilibre par plusieurs carnassiers : le Lion (Panthera leo = Felis leo), la Panthère (Panthera pardus), le Guépard (Acinonyx jubatus), le Lycaon (Lycaon pictus), la Hyène (3 espèces) et divers petits carnassiers, dont le Lynx et le Serval. Les Mangoustes figurent encore parmi les Carnivores de la savane. Tout un peuple d’insectivores habite également ce milieu. Mais un des groupes les plus intéressants des savanes est celui que forment les Primates. De nombreux Singes (Patas [Erythrocebus patas], Grivet [Cercopithecus œthiops], Babouin [Papio papio, etc.], Mandrill [Mandrillus sphinx]) vivent normalement dans les arbres, mais descendent souvent sur le sol. Parmi les Oiseaux, nous citerons l’Autruche (Struthio camelus), le Vautour géant, les Aigles, les Serpentaires et des endémiques que sont le Bec-en-Sabot (Balœniceps rex), l’Ombrette, les Touracos, les Nectarinés, les Pintades... Quant aux Reptiles, mention doit être faite du Python de Seba (Python Sebœ), du Python royal (P. regius), du Naja (Naja melanoleuca, N. nigricollis) et des Dendroaspis, ou Serpents des Bananiers. Les Insectes sont incroyablement nombreux ; parmi eux, des Coléoptères Scarabéidés coprophages sont souvent liés aux grands animaux de la savane, dont ils exploitent les déchets.