Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

allergie (suite)

Les manifestations respiratoires, en dehors de l’asthme, sont dominées par les troubles que détermine l’inhalation des pollens (pollinoses), au premier rang desquels figure ce qu’il est convenu d’appeler le rhume des foins, caractérisé par une triade constituée par les éternuements, l’écoulement et l’obstruction du nez. Une conjonctivite est souvent associée et une réaction fébrile peut s’observer. Surtout, la répétition saisonnière des crises achève de rendre typique ce tableau, dont l’évolution est menacée avant tout par la survenue d’une crise d’asthme. Dans ce chapitre des manifestations respiratoires méritent d’être mentionnées la trachéite spasmodique, véritable équivalent de l’asthme, et les sinusites séreuses, dont la tendance à la chronicité est certaine.

Nous ne pouvons citer que brièvement les manifestations suivantes, certes loin d’être négligeables, mais dont l’importance parait moindre que les précédentes. Il s’agit : de manifestations digestives sous forme de gastrites, d’iléites ou de colites, indépendamment des ulcères gastro-duodénaux, de la rectocolite hémorragique et de la maladie de Crohn, dont l’origine allergique par auto-immunisation a pu être invoquée ; de manifestations rénales (glomérulonéphrites aiguës par allergie infectieuse) et vésicales (cystites) ; de manifestations cardiaques (endocardites pariétales par allergie parasitaire surtout) ; de manifestations sanguines (purpura thrombopénique et anémies hémolytiques) ; de manifestations nerveuses (outre les migraines déjà citées, la sclérose en plaques, dont l’origine allergique auto-immune est une hypothèse avancée récemment) ; de nombreuses manifestations oculaires (conjonctivites, kératites et blépharites). Certaines affections du collagène et l’origine de certains cancers paraissent aujourd’hui difficiles à placer parmi les manifestations allergiques, encore qu’une auto-immunisation ait pu être affirmée à leur égard. De ce polymorphisme clinique, il convient de dégager un aspect fondamentalement propre au sujet allergique, qui est sa sensibilité individuelle, dite encore « idiosyncrasie ». Il ne faut pas davantage oublier la fréquente association de ces manifestations morbides.


Moyens de diagnostic

Un examen clinique soigneux est évidemment nécessaire pour éliminer d’autres affections, mais l’essentiel, qu’il ne faut jamais perdre de vue, est un interrogatoire poursuivi avec ténacité, notamment à la recherche d’une intolérance antérieure, d’une « épine irritative » pouvant expliquer au moins partiellement les troubles présentés.

Sur le plan biologique, quelques stigmates peuvent contribuer à l’orientation du diagnostic : ce sont l’augmentation du nombre des éosinophiles sanguins — déjà signalée —, qui s’accompagne d’une éosinophilie tissulaire, et la diminution du nombre des autres leucocytes, de valeur controversée. On dispose également de l’étude du pouvoir histaminopexique (de fixation de l’histamine) du sérum, rénovée par le test d’agglutination de particules de latex de polystyrène, sur lesquelles a été fixée l’histamine. On constate ainsi que le pouvoir antihistaminique du sérum des allergiques est diminué. Enfin, plus récemment encore, le test de transformation lymphoblastique s’est révélé un élément diagnostique de valeur : les lymphocytes sont capables d’une régénération vers le stade blastique (jeune) lorsqu’ils sont mis en présence de l’agent responsable d’une sensibilisation antérieure. Les dosages d’histamine et de sérotonine restent du domaine de la recherche.

En fait, les moyens les plus courants sont les tests cutanés : soit l’épidermo-réaction (patch-test des Anglo-Saxons), soit la cuti-réaction, soit encore l’intradermo-réaction. On y ajoute le test de Prausnitz-Küstner, application à l’homme de l’anaphylaxie passive expérimentale, les épreuves de suppression et de provocation. L’oculo-réaction y est assimilée. Il est possible de répéter et de mesurer ces tests cutanés, de représenter par une courbe leur intensité et leur durée : cette méthode, appelée allergographie, est plus exacte que la distinction classique entre anergie et hyperergie.


Thérapeutique

L’introduction d’un allergène faisant apparaître des anticorps dans l’organisme, il convient, en premier lieu, de supprimer les contacts avec l’allergène. Cela est facile dans certains cas, mais beaucoup plus difficile s’il s’agit d’une allergie professionnelle.

Des tentatives de désensibilisation spécifique sont ensuite réalisables par contact quotidien avec l’allergène, en commençant par des doses infinitésimales. Cette méthode connaît deux écueils : elle est très longue et souvent mal supportée par le patient ; elle ne met pas à l’abri des polysensibilisations, si fréquentes.

Il existe aussi des méthodes tendant à s’opposer à la libération d’histamine : il peut s’agir de méthodes spécifiques de choc, telle l’autohémothérapie (injection dans les muscles du propre sang du malade), ou de méthodes non spécifiques, consistant en l’administration de peptones, d’hyposulfite de soude, de sels de calcium.

Ce sont essentiellement les procédés s’opposant directement à l’histamine qui sont aujourd’hui employés. Plus que l’adrénaline et ses dérivés, indiqués dans le choc anaphylactique et dans l’œdème de Quincke, sont utilisés couramment les antihistaminiques* de synthèse, introduits dans la pharmacopée par Halpern (1942). Il s’agit le plus souvent de phénothiazines actives, notamment sur l’urticaire par prise orale ou sur l’œdème de Quincke sous forme injectable, permettant la protection des sujets allergiques en dehors des poussées, mais qu’il faut toujours choisir en fonction de la tolérance individuelle. Les anti-sérotonines sont d’utilisation plus récente. Les gammaglobulines ont été employées en association avec l’histamine.

Il reste les méthodes visant à modifier la réaction de l’organisme. Si l’on veut agir sur ce terrain, il faut agir sur le système nerveux central, la régulation diencéphalo-hypophysaire et les systèmes métaboliques. Cette action est surtout le fait des hormones hypophyso-surrénaliennes, A. C. T. H. ou corticoïdes, prescrites systématiquement par voie veineuse dans les cas dramatiques (choc anaphylactique, œdème de Quincke atteignant la glotte, état de mal asthmatique) et par voie orale dans les troubles chroniques, mais le moins souvent et le moins longtemps possible en raison des dangers que ces méthodes comportent. Accessoirement, on peut recourir aux stress tels que saignée ou pyrétothérapie (méthode qui utilise la fièvre provoquée artificiellement) par abcès de fixation.

Cependant, il ne faut pas négliger l’efficacité d’une hygiène de vie, des sédatifs et d’une psychothérapie d’appoint, gage d’une collaboration durable du malade.