Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

allergie (suite)

Les différents allergènes

L’allergie survient dans certaines conditions bien individualisées, consécutives au contact avec divers allergènes. La classification que nous proposons de ceux-ci répond plus à leur voie d’introduction qu’à leur nature.

• Les pneumallergènes de l’air ambiant (allergènes dont l’action se manifeste au niveau de l’appareil respiratoire). Ils provoquent après leur inhalation des troubles allergiques de type immédiat. Le plus important d’entre eux est indiscutablement la poussière de maison, responsable d’environ 50 p. 100 des allergies respiratoires. Viennent ensuite les pollens, certes innombrables, mais parmi lesquels il y a lieu de distinguer ceux des Graminacées, des Platanes, du Plantain et de l’Armoise. Les moisissures atmosphériques entretenues dans les lieux humides peuvent être également en cause. Enfin, les squames ou les poils d’animaux, de même que les plumes, occupent une place importante dans cette catégorie d’allergènes. Plus accessoirement, on reconnaît d’autres substances : débris d’insectes, poudre d’os, poussière de tabac, farines, gommes végétales, telle la gomme arabique.

• Les allergènes alimentaires. Charcuterie, fromages fermentés, œufs, chocolat, fraises ont un rôle certain. Par ailleurs, divers insecticides employés pour la protection des aliments et certains colorants peuvent être incriminés.

• Les allergènes médicamenteux. Aucune liste ne saurait en être exhaustive, car tout médicament est potentiellement source de sensibilisation, y compris les antihistaminiques*. Cependant, certains d’entre eux le sont plus particulièrement. Il s’agit tout d’abord des sérums ou vaccins, des extraits hépatiques, des produits iodés, des métaux lourds ou des arsenicaux, de l’insuline, des antalgiques et des antipyrétiques, dont l’acide acétylsalicylique, ou aspirine.

En raison de la gravité possible des manifestations qu’elles peuvent engendrer, les propriétés réactogènes des barbituriques, des sulfamides et de certains antibiotiques méritent d’être soulignées tout particulièrement.

• Les allergènes microbiens et parasitaires. Si les agents microbiens sont des antigènes complexes constitués de protides*, de lipides* et de glucides*, de toxines et d’enzymes*, susceptibles d’entraîner une sensibilisation (tuberculine par exemple), les parasites ont une constitution antigénique plus complexe encore et sont de véritables mosaïques comprenant divers métabolites. Ce pouvoir antigénique est surtout élevé pour les Helminthes, vers parasites du règne animal, tandis que l’antigénicité des Champignons, parasites du règne végétal et responsables des mycoses*, est extrêmement variable (les plus connus sont la trichophytine et la candidine).

• Les allergènes endocriniens. En dehors de leur rôle régulateur éventuel à l’égard des états allergiques, plusieurs hormones peuvent être responsables de manifestations d’hypersensibilité (androgènes*, œstrogènes, progestérone), ce qu’illustre la haute réceptivité de la femme durant la période prémenstruelle.

• Les allergènes de contact. Comme la terminologie l’indique, leur place figure dans l’allergie tissulaire. Nombre de substances chimiques sont provocantes. Citons : parmi les métaux, le chrome, le nickel, le cobalt, le mercure ; parmi les produits à usage domestique, l’eau de Javel, les cosmétiques ; parmi les produits d’origine industrielle, les matières plastiques, colles et vernis, les insecticides, les engrais, les détersifs.

• Enfin, il est permis d’ajouter à cette brève nomenclature des principaux antigènes des agents physiques tels que le froid, la chaleur et surtout la lumière, responsable d’accidents dits « de photosensibilisation ». Il n’est pas jusqu’à l’effort physique intense qui n’ait été considéré à l’origine d’accidents évoquant l’allergie. Il convient d’insister sur la fréquence des allergies croisées (réaction identique à deux substances différentes), qui rend souvent délicat le diagnostic et fort difficile la thérapeutique.


Manifestations cliniques

La réaction allergique déclenche au niveau des tissus atteints une libération d’histamine et de sérotonine responsable de toute une série de manifestations cliniques. On peut ainsi observer des manifestations générales (grand choc* anaphylactique, maladie sérique), cutanées (urticaire, œdème de Quincke, eczéma, dermites), respiratoires (asthme, coryza spasmodique ou rhume des foins, trachéite spasmodique, sinusites), digestives (gastriques, hépatiques), rénales et vésicales, cardiaques, sanguines, nerveuses (migraines) et oculaires (conjonctivites). Ces manifestations morbides très diverses sont à envisager successivement sans qu’il nous soit nécessaire d’aborder dans le cadre de cet article l’asthme*, l’urticaire*, l’eczéma* et la migraine*, traités par ailleurs.

Le choc anaphylactique est un accident général très précoce, suivant de près l’injection de sérum hétérologue ou l’administration, par une autre voie que la voie digestive, de certains antibiotiques. Il se traduit chez l’homme par une brusque sensation de malaise intense avec pertes de connaissance, frissons, chute de la pression artérielle et, fréquemment, une éruption urticarienne diffuse et une accélération du rythme respiratoire. Le plus souvent, sous l’effet du traitement, cet accident dramatique évolue heureusement vers la guérison.

La maladie sérique, accident général tardif, consécutif à une réinjection de sérum, paraît plus fréquente. Les symptômes en sont une éruption érythémateuse, urticarienne le plus souvent, scarlatiniforme ou morbilliforme parfois (comme dans la rougeole), de la fièvre, des douleurs articulaires, des ganglions, enfin et surtout des paralysies périphériques. Sur le plan évolutif, l’amélioration se dessine en trois à dix jours.

Parmi les manifestations cutanées, l’œdème de Quincke, décrit en 1882 et encore appelé œdème angioneurotique, relève de causes très diverses, mais plus spécialement médicamenteuses et alimentaires. Il s’agit de placards œdémateux siégeant aux extrémités, au voisinage des articulations, au visage, notamment sur les lèvres et les paupières, au tronc enfin, sans que la couleur de la peau soit modifiée. Les muqueuses des voies respiratoires supérieures peuvent être touchées, obstruant le larynx. En règle générale, il n’y a pas de fièvre.

Il faut également signaler les dermites de contact, caractérisées localement par des placards eczématiformes, qui peuvent devenir diffus.

Tout à fait à part se situent les toxidermies bulleuses (v. bulle), dont le syndrome de Lyell réalise le tableau le plus caricatural. Cette destruction suraiguë et d’une extrême brutalité de l’épiderme donne au sujet atteint l’aspect d’écorche vif ou de brûlé. L’origine en est le plus souvent médicamenteuse.

Il est enfin permis d’assigner une cause allergique à des affections cutanées telles que l’érythème noueux ou l’érythème polymorphe, notamment lorsque ce dernier s’accompagne d’une éruption siégeant sur les muqueuses.