Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
E

Europe (suite)

En particulier, les échanges entre la C. E. E. et les pays de l’Est ont considérablement augmenté : de 1958 à 1970, les importations de la C. E. E. ont augmenté de 230 p. 100 (tandis que les importations des pays tiers en général augmentaient de 110 p. 100) ; ses exportations vers l’Est ont augmenté de 260 p. 100 (augmentation de l’ensemble des exportations : environ 105 p. 100). Au total, les échanges avec l’Est sont passés de 4,8 p. 100 du commerce de la C. E. E. à 7 p. 100 : ce n’est plus un commerce marginal.

La C. E. E. fait partie du GATT (General Agreement on Tariffs and Trade, ou Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce) [v. échanges internationaux], qui réunit tous les pays industrialisés occidentaux pour un abaissement des barrières douanières, et pour l’aide aux pays en voie de développement ; le GATT reconnaît pourtant la validité des unions douanières. Deux réunions importantes ont eu lieu depuis la création de la C. E. E., où des représentants de la Commission communautaire furent les seuls représentants de la politique commune des Six : le Dillon Round, clos le 7 mars 1962, et le Kennedy Round (du 4 mai 1964 au 30 juin 1967), qui aboutit à une baisse moyenne des tarifs de l’ordre de 35 à 40 p. 100 et à un accord mondial sur les céréales, que la C. E. E. devrait avoir intégralement appliqués en 1972.

Pour les pays en voie de développement autres que les pays africains et malgache, la Communauté a décidé (30 mars 1971) de mettre en vigueur le 1er juillet 1971 une offre de préférences tarifaires généralisées, dont bénéficieront les pays du groupe dit « des 77 » de la C. N. U. C. E. D. (organisme des Nations unies pour le développement), en réalité aujourd’hui plus nombreux.

La C. E. E. a passé d’autres accords préférentiels, ou non uniquement commerciaux, avec l’Espagne, Israël, le Liban, la Yougoslavie ; des négociations sont en cours avec l’Égypte. En effet, l’article 113 du traité de Rome stipule : « Après l’expiration de la période de transition, la politique commerciale commune est fondée sur des principes uniformes, notamment en ce qui concerne les modifications tarifaires et commerciales, l’uniformisation des mesures de libération, la politique d’exportation... »

• L’association à la Communauté est prévue, elle aussi, à l’article 238 du traité : « La Communauté peut conclure avec un État tiers, une union d’États ou une organisation internationale, des accords créant une association caractérisée par des droits et des obligations réciproques, des actions en commun et des procédures particulières... »

Les traités d’association avec la Grèce et la Turquie sont semblables, prévoyant une phase préparatoire plus ou moins longue et une éventuelle adhésion à la Communauté. Ils établissent entre ces pays et la C. E. E. une union douanière, l’harmonisation des politiques économiques et le développement d’actions communes.

L’association du Maroc, de la Tunisie, de Malte et des trois pays du marché commun est-africain (Tanzanie, Ouganda, Kenya) avec la C. E. E. est plus lâche : l’union douanière ne s’applique que sur certains produits, et il n’est pas question d’adhésion ; il s’agit finalement d’accords commerciaux assez poussés et extrêmement solides.

L’association avec les États africains et malgache et les pays et territoires d’outre-mer mérite par contre une attention particulière. La première convention d’association avait été élaborée en même temps que les traités de Rome. De nombreux pays étant devenus indépendants, elle fut renouvelée par tous (sauf la Guinée) à Yaoundé par deux fois déjà. L’association réglemente les échanges commerciaux (libération, protection) et assure une importante coopération technique et financière (pour laquelle fut fondé le Fonds européen de développement, mais à laquelle participe aussi la B. E. I. [Banque européenne d’investissement]).

• En Europe même, la politique communautaire est plus complexe et plus délicate à mener. Les pays tiers européens peuvent se ranger en trois catégories : ceux qui ont posé une candidature d’adhésion (Royaume-Uni, Irlande, Danemark et Norvège), ceux qui sont candidats à l’association (Autriche, Espagne, Suisse, Suède, Finlande, Islande, Portugal) et les autres. De nombreux accords commerciaux ont été passés avec les uns ou les autres, mais le problème majeur, qui a bloqué jusqu’en 1971 toute évolution possible, est celui que posait l’entrée de la Grande-Bretagne dans le Marché commun.


L’échéance de 1973

Il y avait problème parce que la Grande-Bretagne entendait garder la maîtrise de ses décisions économiques et n’était guère désireuse de se rapprocher de l’Allemagne. Elle était « encombrée » d’un énorme Commonwealth et nantie d’une solide monnaie de réserve ; elle devait tenir compte enfin de son partenaire américain. Dans une seconde étape, la Grande-Bretagne réalisa que le Commonwealth se désagrégeait et que l’Europe était, toute réflexion faite, attirante ; en outre, les États-Unis lui conseillaient une demande d’adhésion. Mais la Grande-Bretagne se présenta aux négociations avec des exigences assez lourdes, et la France, en la personne du général de Gaulle, refusa ce « cheval de Troie de l’Amérique » (conférence de presse du 14 janv. 1963). Une nouvelle fois, le Royaume-Uni s’obstina : les problèmes soulevés par ses liens économiques et monétaires avec les États-Unis et le Commonwealth, par l’intégration du système agricole britannique dans la Communauté, par sa situation déflationniste et le déséquilibre de sa balance des paiements motivèrent de nouveau une attitude négative de la France, qui invoquait aussi les problèmes institutionnels d’une Europe des Dix et craignait sans doute qu’un troisième « Grand » serve d’arbitre entre elle et l’Allemagne. L’arrivée de Georges Pompidou à la tête de l’État français permit qu’en décembre 1969 les Six soient, enfin, d’accord. Après un an de laborieuses négociations et l’accord de la Chambre des communes du 28 octobre 1971, l’entrée de la Grande-Bretagne dans le Marché commun s’est effectuée le 1er janvier 1973. Des référendums en France, en Irlande et au Danemark ont approuvé l’élargissement communautaire, alors que la Norvège a rejeté par référendum (24-25 sept. 1972) l’entrée dans le Marché commun.

M.-A. L.