Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Europe (suite)

Les massifs et bassins hercyniens

Ils occupent le nord-ouest et une partie de l’Europe centrale. Le relief y est beaucoup plus morcelé et varié. Des fragments de socle et leur couverture sédimentaire ont été disloqués, morcelés, relevés sous la forme de horsts, séparés par des fossés tectoniques, limités par des failles, mais les sommets ne dépassent jamais 2 000 m, sauf dans la péninsule scandinave. Ainsi s’individualisent des formes qu’on retrouve de l’Écosse à la Bohême : plateaux étagés, creusés par des vallées formant des gorges dans les roches plus dures ; reliefs appalachiens ; blocs basculés dissymétriques comme les Vosges et la Forêt-Noire ; massifs volcaniques (Dôme, Dore, Cantal et Aubrac, Vogelsberg en Allemagne). Entre ces massifs s’étendent de vastes bassins sédimentaires réguliers, marqués par de belles lignes de cuestas et un réseau hydrographique composé de branches orthogonales (bassins de Londres, de Paris, de Souabe et de Franconie), ou des fossés d’effondrement, les uns internes (Lowlands d’Écosse, plaine d’Alsace et de Bade, Limagne), les autres au contact avec une chaîne alpine (le couloir de la Saône et du Rhône). Les massifs les plus septentrionaux (Norvège, Écosse) ou les plus élevés (Vosges, Auvergne) ont conservé des empreintes de la dernière glaciation, sous la forme de cirques, de vallées surcreusées (les fjords et les firths) et d’un épais feutrage périglaciaire (les fagnes, les tourbières). Les paysages sont partout les mêmes : la vieille forêt (Hercynia silva en Allemagne) couvre les hautes pentes, essartée de clairières, de pâturages (les Hautes Chaumes des Vosges) et de cultures. Elle a entretenu les industries du bois, toujours vivantes, la verrerie et la céramique (Vosges, Bohême), alors que les minerais non ferreux contenus dans les roches anciennes et les filons (étain de Cornouailles, plomb, zinc et cuivre en Allemagne, minerais d’uranium en Saxe et dans les monts Métallifères de Bohême) ont entretenu une activité métallurgique, favorisée, d’autre part, par la présence de bassins charbonniers aux réserves importantes, au pied même des massifs anciens : bassins houillers de Grande-Bretagne, bassin franco-belge, d’Aix-la-Chapelle, Sarre, Ruhr, Silésie, bassins de lignite de Saxe et de Thuringe en Allemagne orientale. Mais les massifs se sont fortement dépeuplés au profit des bassins et des villes du pourtour. La plupart d’entre eux ont été équipés en vue de la fourniture d’électricité (l’équipement en barrages et centrales hydrauliques du Massif central français offre un modèle) ou des eaux industrielles et urbaines (les réservoirs du Massif schisteux rhénan alimentent les villes de Rhénanie et la Ruhr). Le tourisme populaire ou social a été favorisé par l’implantation de nombreuses stations, de moyenne ou faible importance toutefois, comparées à celles des Alpes.


Le monde alpin

Il forme l’ossature de la partie méridionale de l’Europe et se compose de chaînes arquées, moulées sur des morceaux de socle comprenant des massifs anciens incorporés, comme les massifs centraux alpins, des nappes de charriage empilées les unes sur les autres, des chaînes plissées autochtones, des piémonts étendus. Ces chaînes résultent d’efforts orogéniques puissants à partir de géosynclinaux profonds comme la plaine actuelle du Pô ; certains ont atteint leur paroxysme au Crétacé ou au début du Tertiaire (mouvements pyrénéen et provençal), d’autres à la fin du Tertiaire (Alpes occidentales). Ces mouvements ont été suivis d’un mouvement épirogénique antérieur à la première glaciation ; d’autres se sont accompagnés de manifestations volcaniques : à l’intérieur de la courbe des Carpates, dans la zone de Bolzano en Italie, en plusieurs points de la Méditerranée, où des volcans célèbres sont toujours en activité. La puissance et la répétition de ces mouvements expliquent non seulement les altitudes atteintes (4 807 m au mont Blanc, 2 663 m à la Gerlachovka, point culminant des Carpates ; 3 404 m dans les Pyrénées ; 3 478 m dans la sierra Nevada), mais aussi la vigueur de l’entaille pratiquée par l’érosion glaciaire, qui a creusé des cirques, découpé des crêtes et des pics, enfoncé des vallées en auge, déposé sur les avant-pays des dépôts morainiques.

Ainsi, par leurs caractères orographiques et morphologiques, les chaînes alpines offrent des possibilités plus grandes à l’exploitation économique. Les dénivellations importantes entraînent l’étagement caractéristique de la végétation et des cultures : les termes alpin, alpestre sont couramment appliqués, dans le monde entier, à ce type de succession altitudinale. Par la présence de vastes glaciers et de névés, ces montagnes sont un réservoir d’énergie électrique. Les Pyrénées et les Alpes sont presque totalement équipées, tandis que le potentiel des Carpates, de l’Apennin et des chaînes Dinariques est encore loin d’avoir été entièrement aménagé. Les vallées profondes s’enfonçant à l’intérieur de la chaîne alpine permettent le franchissement : les premiers grands tunnels ferroviaires et routiers ont été percés dans les Alpes. Les Carpates sont aisément franchissables grâce à des abaissements d’axe, alors que les difficultés sont plus grandes dans les Pyrénées, l’Apennin et les chaînes Dinariques, dont le relief est moins élevé, mais plus compact. Enfin, la haute montagne est par excellence la grande région touristique d’Europe, par la profusion des sites de villégiature d’été et de sports d’hiver, qui ne sont pas encore tous aménagés.

Entre le monde hercynien et le monde alpin s’allongent de profondes dépressions, des couloirs comblés de dépôts récents, qui facilitent la circulation européenne : le couloir de la Saône et du Rhône, le Bassin aquitain ; le Mittelland suisse, le plateau bavarois et la vallée du Danube ; la trouée de Moravie-Silésie. La plaine pannonienne s’étend entre trois chaînes de caractère alpin et des massifs anciens composant la dorsale hongroise. La plaine du Pô s’allonge entre les Alpes et l’Apennin. Enfin, le pied des chaînes alpines est un lieu privilégié du développement de grandes villes, situées sur les axes de communication qui les traversent : Lyon, Milan et Turin ; Munich, Zurich et Vienne ; Venise et Trieste...