Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
E

Empire colonial italien (suite)

L’Empire mussolinien

Une fois le fascisme* instauré en Italie sur une base nettement nationaliste en politique étrangère, les organes officieux du régime s’abandonnèrent à un impérialisme de plus en plus délirant à mesure que le pays se détachait de l’alliance franco-anglaise et se rapprochait de l’Allemagne hitlérienne. Ils voyaient déjà les possessions italiennes de l’Est africain et de Libye rapprochées à travers le Soudan ou Tripoli rejoignant l’Afrique occidentale aux dépens de la France. Plus réaliste, Mussolini se contenta d’obtenir de Laval en 1935 ce qu’il considéra comme un blanc-seing pour attaquer l’Abyssinie et venger la défaite d’Adoua en conquérant ce pays, malgré la condamnation inopérante de la Société des Nations. Sans même un prétexte pour ouvrir les hostilités, 400 000 hommes de troupe, une aviation puissante, des dizaines de milliers de terrassiers propres à construire des routes carrossables débarquèrent en Érythrée, mais y obtinrent peu de succès sous un chef politicien aussi incapable que le maréchal De Bono (1866-1944).

Le négus Hailé Sélassié, cousin de Ménélik, avait, plus facilement encore que celui-ci, pu regrouper autour de lui les principaux féodaux éthiopiens, qui commandaient ses armées, concentrées au centre autour du massif montagneux de l’Amba Aradam et au nord sur les hauteurs rocheuses du Tigré. À la mi-novembre 1935, le maréchal Badoglio (1871-1956) remplaçait De Bono, et, dès lors, selon les nouvelles méthodes de combat qu’appliqueront quelques années plus tard les Américains dans la Seconde Guerre mondiale (première et deuxième bataille du Tembien, 20-30 janv. et 27 févr.-2 mars 1936), des mouvements en tenaille encerclaient et détruisaient les forces ennemies, ouvraient la route de Dessié, seconde ville d’Abyssinie, où l’armée Badoglio entrait le 15 avril, après une victoire sur le négus lui-même. Le 5 mai, elle était à Addis-Abeba, d’où Hailé Sélassié s’était retiré pour s’embarquer à Djibouti sur un croiseur anglais.

L’écrasement de Hitler et de son allié italien allait, toutefois, rendre singulièrement précaires ces succès. Les Américains eussent peut-être consenti à laisser aux Italiens la possession de la Libye, et il en fut question lors des premières négociations de paix, où l’Italie était représentée par le comte Sforza (1872-1952) ; le cabinet anglais lui-même s’y montrait assez favorable, et l’on sait que ces deux puissances rendirent à leur ex-ennemi la part de sa flotte qui leur était assignée. Mais les Russes se montrèrent intraitables, et Sforza lui-même jugea inutile de se dépenser beaucoup pour conserver des territoires africains.

M. V.

➙ Crispi (F.) / Éthiopie / Fascisme / Giolitti (G.) / Italie / Italo-éthiopienne (guerre) / Libye / Mussolini (B.) / Somalie.

Empire colonial néerlandais

Ensemble des pays et des territoires colonisés par les Hollandais.



Les débuts

• À partir de 1590 : des navires hollandais sillonnent les côtes de la Guinée, du Brésil et de la Guyane (comptoirs à l’embouchure de l’Essequibo).

• 1594-1597 : des navigateurs hollandais organisent successivement trois expéditions infructueuses en vue d’atteindre l’Inde par le nord-est (W. Barents).

• 1595-1597 : au même moment, des armateurs d’Amsterdam équipent une flotte qui atteint Java (Bantam) en 1596 et en ramène une cargaison de poivre.

• 1595-1602 : 14 expéditions néerlandaises, totalisant 65 navires, font le voyage de l’Inde, vérifiant ainsi l’impuissance des Ibériques à maintenir leur monopole autant que la rentabilité du commerce des épices. Les Hollandais visitent l’Inde, Ceylan, Sumatra, Java, les Moluques, Bornéo, les Philippines, l’Indochine, la Chine, le Japon. Ils établissent en plusieurs points (Java, Banda, Ternate, Amboine) des comptoirs assurant le commerce du poivre et des épices, et ils résistent avec succès aux Portugais. Gagnant Java par le détroit de Magellan et rentrant par Le Cap, Olivier Van Noort (v. 1558-1627) est le premier Hollandais à réaliser de 1598 à 1601 le tour du monde.


Du comptoir commercial à la vocation coloniale (1602-1621)

• 1602 : fondation de la Compagnie des Indes orientales (Vereenigde Oost-Indische Compagnie).

• 1602-1609 : les Portugais sont évincés des Moluques, mais les Espagnols prennent la relève à Tidore et à Ternate. Les Hollandais, de leur côté, tiennent Amboine (première fortification hollandaise, 1605) et les îles Banda. L’établissement de comptoirs hollandais en Inde, au Japon, en Malaisie jette les bases d’un commerce asiatique florissant. Découverte de l’Australie (1606).

• 1609 : le navigateur Henry Hudson entreprend pour le compte de la Compagnie des Indes orientales une expédition visant à la découverte de la route de l’Inde par le nord-ouest.

• 1609-1621 : la trêve de Douze Ans, conclue entre l’Espagne et les Provinces-Unies, se limite à l’Europe. Les Hollandais tentent vainement d’ébranler les positions portugaises (Goa, Malacca) et espagnoles (Tidore, Manille). En revanche, la Compagnie inflige à sa rivale anglaise une défaite navale, lui interdisant l’accès aux îles d’épices : Djakarta, dépendance de Bantam, alliée aux Anglais, est rasée ; sur ces ruines s’élève Batavia (1619), siège du gouverneur général de la Compagnie des Indes orientales. La même année, pourtant, un accord est conclu entre les Compagnies anglaise et néerlandaise des Indes orientales.

• 1614-1617 : établissements en Nouvelle-Néerlande, et érection d’un fort sur l’Hudson. Établissements hollandais sur l’île africaine de Gorée (cap Vert), et à l’embouchure de l’Essequibo en Guyane.


La conquête des possessions ibériques (1621-1644)

• 1621 : fondation de la Compagnie des Indes occidentales (West-Indische Compagnie), héritant de la Nouvelle-Néerlande, de l’Essequibo et de Gorée.

• 1621-1629 : la Compagnie se distingue par un coup de force contre Bahia (1624), par la fondation, en 1625, de La Nouvelle-Amsterdam (New York) sur l’île de Manhattan, mais surtout par la prise, en 1627, des galions espagnols ramenant d’Amérique les métaux précieux (Piet Heyn [ou Hein]). En Asie, sous le gouvernement de Jan Pieterszoon Coen (1618-1623), la disproportion des forces permet d’éliminer du commerce de la muscade la concurrence anglaise. Prenant prétexte de l’exécution de conspirateurs anglais à Amboine en 1623, les Anglais évacuent les Moluques. En 1628, ils transfèrent leur comptoir de Batavia à Bantam, ce qui est un nouveau recul. Assaillie à trois reprises par la puissance javanaise de Mataram, Batavia résiste en 1629 avec le même succès qu’en 1619 contre Bantam. Par ailleurs, les Hollandais élargissent leur commerce asiatique par l’ouverture de comptoirs à Bandar ‘Abbās, dans le golfe d’Ormuz (Perse), en 1623 et à Formose (Chine) en 1624.

• 1630-1644 : dans les Caraïbes, en 1634, la Compagnie des Indes occidentales enlève à l’Espagne Aruba, Curaçao et Bonaire (au large du Venezuela), puis Saint-Eustache, Saba et Saint-Martin (partagée avec la France). D’autres îles des Petites Antilles sont bientôt reperdues (Saint-Thomas, Saint-Jean, Sainte-Croix au Danemark ; Tobago à la France).