Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
E

élection (suite)

Cooptation, nomination, tirage au sort

La cooptation

Alors que l’élection consiste pour un collège à choisir en son sein ceux qui le gouverneront ou ceux qui le représenteront à un organisme délibératif ou consultatif, la cooptation consiste pour un collège à choisir à l’extérieur du groupe qui le forme ceux qu’il juge les plus dignes ou les plus capables de le compléter, soit qu’il s’agisse de remplacer un membre démissionnaire, exclu ou décédé, ou bien qu’il s’agisse d’étendre le collège. La cooptation est un système classique pour les organismes dont l’objet n’est pas de diriger un corps social, mais d’en représenter les membres supposés être les plus éminents (telles les diverses assemblées de l’Institut) ou d’attribuer une distinction particulière (par exemple le prix Goncourt ou le prix Fémina), ou de recruter des fonctionnaires (concours d’agrégation), voire de nommer des administrateurs dans les sociétés anonymes.

Cependant, la cooptation a joué un rôle politique, notamment pour le renouvellement du sénat romain, du sénat du premier Empire ainsi que des soixante-quinze sénateurs inamovibles institués par une des lois constitutionnelles de 1875. Elle fonctionne même encore en France, les sénateurs représentant les Français de l’étranger étant cooptés par les membres du Sénat. En Grande-Bretagne, une fraction de certains conseils municipaux sont recrutés par cooptation (les conseillers élus complètent le conseil en choisissant les aldermen).

Par ailleurs, d’une manière générale, la cooptation joue un rôle important dans la vie des partis politiques ; en U. R. S. S., les membres du Praesidium et du Comité central du parti communiste sont pratiquement le plus souvent cooptés. Dans les démocraties parlementaires, il en est toujours ainsi pour les dirigeants des partis de droite et du centre, dont le fonctionnement se résume généralement aux délibérations de petits comités, ainsi que, souvent, pour les partis de gauche, dont le fonctionnement repose apparemment sur les délibérations des sections ou cellules de base, mais où, en fait, les éléments dirigeants constituent fréquemment eux-mêmes les organismes directeurs en tenant plus ou moins compte des tendances dégagées par les délibérations des congrès.

La nomination

Alors que l’élection est un choix collectif, la nomination proprement dite émane d’une seule autorité, le plus souvent une personne, plus rarement un collège très réduit.

Lorsque certains empereurs romains, les rois mérovingiens et les premiers rois capétiens associaient de leur vivant leur fils aîné au trône, ils assuraient la succession héréditaire de leurs fonctions par une nomination.

Lorsqu’un chef d’État parlementaire désigne un Premier ministre ou un président du Conseil, il procède à une nomination. Dans certains pays, ce choix est — en principe — arbitraire ; toutefois, il est guidé par le souci de constituer en fait un gouvernement susceptible de réunir une majorité parlementaire, et ce souci limite en quelque sorte l’arbitraire de la désignation. Dans d’autres pays (Grande-Bretagne, monarchies scandinaves, etc.), le choix du chef d’État est limité par la coutume ou même par un texte constitutionnel qui lui impose de désigner le chef de la majorité parlementaire, c’est-à-dire, en général, le chef du parti qui détient la majorité absolue au Parlement.

Le Premier ministre (ou président du Conseil) choisit généralement lui-même à son tour ses ministres, mais c’est le chef d’État qui, le plus souvent, procède à leur nomination ; il s’agit, il est vrai, d’une simple formalité, le pouvoir de décision appartenant effectivement au chef du gouvernement.

Chef d’État, ministres, présidents des Assemblées se choisissent un cabinet dont ils nomment les membres.

Dans un grand nombre de pays, notamment en France, la totalité des fonctionnaires et les membres de certains conseils font l’objet d’une nomination par le chef de l’État, le Premier ministre, un ministre, un préfet, un maire ou l’autorité responsable d’une administration ou d’un organisme semi-public. Le choix de l’autorité ayant le pouvoir de nomination peut être discrétionnaire ; cependant, le plus souvent, il est limité par une réglementation préétablie qui peut notamment prévoir l’organisation préalable d’un concours sur titres ou sur épreuves. Dès lors qu’il y a réglementation, la régularité des nominations est soumise au contrôle du juge.

Le pouvoir de nomination à un emploi, exercé par les chefs d’entreprises privées, est la plupart du temps beaucoup plus arbitraire ; en fait, comme le choix des autorités publiques, il arrive que leur choix soit limité par le petit nombre de postulants ou, tout au moins, de postulants aptes à la fonction qu’il convient de pourvoir.

La nomination à un emploi public ou privé est fréquemment préparée par les collaborateurs de l’autorité qui détient nominalement le pouvoir. C’est ainsi que la formation des états-majors des administrations et des entreprises résulte au fond plus d’une cooptation que d’une nomination proprement dite.

Il arrive que la désignation de certains représentants du peuple ou de représentants de catégories sociales données procède simultanément de l’élection et de la nomination. En France, la Constitution de l’an VIII — sous l’influence de Sieyès, selon lequel « la confiance doit venir d’en bas et l’autorité doit venir d’en haut » — prévoyait l’établissement par voie d’élection de listes d’éligibilité, ou listes de confiance, sur lesquelles le gouvernement choisissait les fonctionnaires nationaux, départementaux et locaux ; le système ainsi prévu ne fonctionna jamais, car un sénatus-consulte de l’an X lui substitua celui des collèges électoraux de cantons, d’arrondissements et de départements, système dans lequel les deux derniers types de collèges étaient partiellement issus de l’élection et partiellement de la nomination, leur rôle étant uniquement de constituer — à raison de deux candidats chacun — des listes nationales pour chaque Assemblée législative, listes sur lesquelles étaient choisis les membres de ces Assemblées. En Suède, encore aujourd’hui, le gouvernement choisit les bourgmestres sur des listes de trois noms, établis par les conseils municipaux intéressés.