Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
E

élection (suite)

Il importe donc de limiter la durée du mandat des gouvernants. Dans l’Antiquité, à Athènes tout particulièrement, la durée de chaque mandat était limitée à une année sans qu’il soit possible à un citoyen de remplir deux fois de suite la même fonction. Dans les États modernes, la durée du mandat parlementaire est généralement de quatre ou cinq ans, chaque élu étant indéfiniment rééligible : il est tenu compte notamment de l’expérience des Constituants de 1791, qui s’étaient interdit toute possibilité d’appartenir à la Législative, cette exclusion étant généralement considérée comme néfaste. Cependant, aux États-Unis, le mandat de la Chambre des représentants a été fixé à deux ans : on fait ainsi, semble-t-il, contrepoids aux pouvoirs du président, lequel est élu pour quatre ans et ne peut être réélu qu’une fois ; toutefois, les inconvénients de cette brièveté (l’élu consacre la majorité de son temps à sa circonscription en vue de préparer sa réélection) sont devenus particulièrement sensibles depuis que les pouvoirs de l’exécutif fédéral se sont accrus et que les États-Unis jouent un rôle de premier plan dans la politique mondiale.

Mais la limitation de la durée du mandat des gouvernants n’est pas le seul problème à résoudre dans un État où le mandat représentatif est la règle. Dans l’espace de temps séparant deux consultations générales peuvent intervenir des consultations partielles, soit par la voie de l’initiative populaire ou du référendum*, soit par celle des élections partielles. Le remplacement par les électeurs des représentants décédés ou démissionnaires permet de suivre l’évolution de l’opinion publique entre deux renouvellements d’une assemblée ; par un curieux paradoxe, les partis de gauche, qui défendent le principe du mandat impératif (et préconisent souvent le système de la révocation populaire), se montrent généralement hostiles aux élections partielles. Dans le cadre de la représentation proportionnelle au scrutin de liste, il est possible, la plupart du temps, de confier le mandat du représentant décédé ou démissionnaire au premier des candidats non élus de sa liste ; dans le cadre du scrutin majoritaire, on prévoit à cet effet la désignation par chaque candidat d’un suppléant qui remplace l’élu s’il vient à ne plus pouvoir remplir ses fonctions : cette pratique, notamment adoptée par la Constitution française de 1958, paraît inspirée du « ticket » présidentiel américain, qui, à l’origine, n’avait guère d’autre objet que celui de régler le problème de la succession du président empêché en cours de mandat et d’éviter la répétition trop rapprochée d’une vaste consultation nationale.

Éligibilité

En France, le Code électoral fixe à vingt-trois ans (trente-cinq ans pour le Sénat) l’âge auquel un électeur ayant satisfait aux obligations de la loi sur le recrutement de l’armée est éligible à une assemblée parlementaire, au conseil général ou au conseil municipal.

Toutefois, un électeur d’origine étrangère n’est éligible que dix ans après sa naturalisation ou l’acquisition définitive de la nationalité française par son mariage (ce délai peut être réduit par décision ministérielle individuelle).

Le droit d’éligibilité est refusé aux personnes frappées d’une peine empêchant leur inscription sur une liste électorale (pendant une période double de la durée de l’empêchement) ainsi qu’aux individus privés de ce droit par décision judiciaire.

Des mesures particulières interdisent l’élection dans une circonscription parlementaire d’un fonctionnaire y exerçant — ou y ayant exercé au cours des trois ans, un an ou six mois précédents (selon les cas) — une fonction d’autorité ou une fonction judiciaire.

Le vote par procuration et par correspondance

Dans certains pays, le vote par procuration est admis pour les électeurs qui ne peuvent pas se déplacer, et le vote par correspondance pour les électeurs qui, le jour du vote, sont éloignés de la commune sur la liste électorale de laquelle ils sont inscrits.

En France, le législateur a toujours été très méfiant en face de ces modalités d’exercice du droit de vote, notamment par crainte, d’une part, de la violation du secret du vote et, d’autre part, des fraudes électorales. Cependant, en 1946, certaines dispositions ont été prises en faveur du vote par procuration et par correspondance.

• Le premier est actuellement admis à titre exceptionnel pour les électeurs que des obligations légalement constatées retiennent éloignés de la commune sur la liste de laquelle ils sont inscrits, notamment les militaires et fonctionnaires de police appelés à se déplacer pendant la période électorale, et les citoyens qui, ne pouvant bénéficier du vote par correspondance, postulent que d’impérieuses raisons les placent dans l’impossibilité d’être présents le jour du scrutin. La procuration est établie sans frais en présence de deux témoins ; sa validité est limitée à un scrutin ou fixée à un an. Le mandataire doit être inscrit dans la même commune que le mandant.

• Jusqu’à la loi du 31 décembre 1975 qui a supprimé cette forme de vote, pouvaient être autorisés à voter par correspondance les militaires, les marins, les voyageurs de commerce, les journalistes, les travailleurs saisonniers, les grands invalides de guerre, les infirmes et les personnes âgées ainsi que les personnes qui les assistent et les malades ayant dû s’absenter de leur domicile pour subir des traitements, une attestation médicale étant, en pareil cas, demandée. Désormais, ces personnes sont autorisées à voter par procuration.


Le scrutin public et le scrutin secret

L’électeur n’a de compte à rendre qu’à lui-même ; c’est pourquoi, dans la plupart des pays, le secret de son vote lui est garanti. Il importe, en effet, de mettre l’électeur à l’abri des pressions des pouvoirs publics, de ses employeurs, des membres des groupes religieux, philosophiques, culturels, politiques ou économiques auxquels il appartient ainsi que des menaces ou des promesses des personnes qui soutiennent les divers candidats. L’expérience des campagnes électorales et des tentatives de corruption qui ont marqué bon nombre d’entre elles semble avoir primé sur l’opinion de Montesquieu, selon lequel le vote public permettrait aux électeurs d’être guidés par l’opinion des notables. Il convient, cependant, de rappeler qu’en période révolutionnaire les « minorités agissantes » s’efforcent toujours de légaliser leur maintien au pouvoir et qu’à cette fin le scrutin à main levée dans les assemblées populaires est souvent instauré (pour Robespierre, « la publicité est la sauvegarde du peuple »). En U. R. S. S., les deux premières Constitutions (1918 et 1924) établirent le scrutin public.