Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
E

Égypte (suite)

• Les aménagements ultérieurs. En 1958 et surtout en 1961, des amendements furent apportés à la loi de 1952 : le plafond fut ramené à 42 ha avec 21 ha supplémentaires pour la famille. La dette des nouveaux propriétaires fut réduite de moitié (payable en quarante ans), et l’intérêt baissé à 1,5 % ; en mars 1964, elle fut même réduite des trois quarts avec exemption de tous les intérêts. En outre, toutes les terres appartenant à des étrangers furent confisquées, et une loi de 1963 réserva la propriété agricole aux ressortissants égyptiens. Enfin, un décret-loi de mars 1964 édicta que la propriété des terres expropriées était acquise à l’État sans indemnisation.

Les réformes successives ont donc maintenu le principe de la propriété privée. Elles ont conservé de grandes propriétés de plus de 50 ha et multiplié le nombre des petites et moyennes propriétés.

À l’automne de 1964, l’organisme de la réforme agraire était entré en possession de 400 000 ha, soit 18 p. 100 de la superficie cultivable. Sur ce total, 220 000 ha seulement (en partie faute d’acheteurs) ont été distribués à 210 658 familles.

• Les résultats. La réforme a permis l’amélioration des rendements. En effet, le cultivateur, devenu propriétaire, a mieux préservé les sols et, grâce à l’épargne forcée retenue par les coopératives, il a dû consacrer une partie de ses nouveaux revenus à la modernisation et à la mécanisation.

Sur le plan social, les résultats sont plus discutables. Certes, la réforme a aboli l’endettement agraire, qui était considérable, et amélioré la situation de quelques centaines de milliers de paysans (10 p. 100 de la masse) qui appartenaient déjà à une catégorie relativement privilégiée. Mais pour les 80 p. 100 de la masse rurale, ouvriers agricoles et paysans démunis, la situation a peu changé, et elle a même plutôt empiré du fait de la pression démographique et de la baisse effective des salaires. Au total, la réforme agraire a eu surtout pour effet d’émietter la propriété terrienne et de modifier la répartition des terres données en fermage. Le faire-valoir direct des grandes propriétés, qui était l’exception, s’est développé, mais, en sens inverse, une grande partie des petits propriétaires de moins de 2,1 ha, qui n’ont pas assez de terres pour vivre, louent leurs propres terres ou en prennent en location.

C’est pour faire face à cette situation que le gouvernement a mis en place un dispositif coopératif dont les effets sont positifs. Tous les efforts déployés tendent à diversifier les récoltes et à ne plus compter sur le seul coton pour l’exportation. L’industrie agricole, qui permet d’enrayer le chômage saisonnier, a également fait l’objet de beaucoup de soins.

Des plans ont été établis en vue d’augmenter le rendement de la superficie cultivable et d’obtenir une production maximale par les moyens suivants : classification des terres, amélioration du système d’irrigation et de drainage, amélioration et distribution des semences sélectionnées à tous les cultivateurs, diversification des récoltes de vergers, amélioration de la richesse animale par la protection du bétail et des végétaux contre les maladies et les épidémies.

L’État a augmenté la production des semences sélectionnées de haute productivité et de résistance aux épidémies. Elles remplacent les espèces dégradées et sont utilisées périodiquement tous les trois ans pour l’augmentation des récoltes sur toute la superficie cultivable. Le coton constitue à cet égard une exception, car ses semences sont renouvelées tous les ans. Les semences sélectionnées ainsi que les meilleurs semis de fruits et de légumes sont distribués aux cultivateurs à des prix réduits.

En raison du danger que les fléaux agricoles constituent pour l’économie, des groupes entraînés, munis d’un matériel adéquat, parcourent la campagne. Les insecticides, les appareils et leurs pièces de rechange sont importés en grande quantité. L’État pourvoit aux besoins des cultivateurs en insecticides et fournit le matériel nécessaire durant tout le cycle agricole annuel. De plus, on crée des centres d’entraînement dans le dessein de familiariser les cultivateurs avec l’usage des insecticides et la lutte contre les épidémies, sous la direction d’experts. Il a été procédé à la production et à la distribution des engrais bactériologiques, qui améliorent la fertilité du sol. Les soins vétérinaires gratuits ont été généralisés, les sérums et les vaccins contre les épidémies et les parasites, utilisés. Les plans d’engraissement ont été exécutés et les organismes spécialisés dans l’élevage du bétail et des animaux de basse-cour, créés. L’approvisionnement en fourrages et sa répartition équitable sont assurés.

Mais le progrès agricole ne peut porter ses fruits que si les cultivateurs sont pleinement conscients de leurs devoirs. Aussi l’État a-t-il déployé tous ses efforts pour la création de nombreuses unités agricoles destinées à montrer aux paysans les procédés scientifiques en matière d’agriculture et les moyens de se protéger contre les épidémies et les insectes.

Soucieux de mettre les cultivateurs à l’abri de toute exploitation et de tout monopole, l’État a consolidé, par tous les moyens, le mouvement coopératif. Il prête aux coopératives des sommes d’argent et leur vend, aux prix courants, les semences et les engrais.

À la suite du morcellement des grandes propriétés, les nouveaux petits propriétaires se sont souvent montrés incapables de suivre les procédés efficaces dans la production, ce qui a entraîné une augmentation des frais. L’État a pris alors l’initiative de regrouper les petites propriétés de manière à permettre de cultiver collectivement des superficies, sans toutefois affecter le droit de propriété du cultivateur.

• Les coopératives. La coopération agricole a suivi deux chemins distincts. Il y eut d’abord les coopératives traditionnelles, qui remontent au premier quart du siècle. Il y eut ensuite les coopératives de la réforme agraire. C’est surtout à l’influence de ces dernières que le mouvement coopératif actuel doit ses traits.

Les coopératives de la réforme agraire. En un premier temps, une loi fut promulguée en 1956 dans le dessein de lever tous les obstacles administratifs de l’ancienne législation et d’encourager la création de sociétés coopératives de types variés.

Cependant, il apparut que la mise en place de ce réseau n’était guère suffisante pour enrayer l’émiettement des terres. C’est ainsi que, dès 1960, il fut décidé de grouper les petites propriétés sous forme de grandes unités d’exploitation, sans toucher au principe de la propriété privée de la terre.