Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
E

Edison (Thomas Alva) (suite)

S’appuyant sur l’antériorité de ses propres brevets, Edison demande alors des redevances à tous ceux qui utilisent des procédés plus récents. C’est le début d’un long conflit, riche en péripéties diverses et en procès, que l’on a surnommé la « guerre des brevets » (1897-1908). En 1900, un accord — d’ailleurs éphémère — avec la Biograph permet à l’inventeur de génie devenu peu à peu un businessman impitoyable de former un véritable trust. Allié à George Eastman (1854-1932), qui fabriquait la presque totalité de la pellicule aux États-Unis, Edison engage des poursuites contre tous ses adversaires, producteurs, fabricants, exploitants représentant des sociétés étrangères. En 1908, un accord intervient (formation de la Motion Pictures Patent Company). La MPPC contrôle bientôt tout le marché américain. À la guerre des brevets succède une nouvelle passe d’armes entre le monopole d’Edison et certains indépendants (dont Marcus Loew [1870-1927] et William Fox [1879-1952]) rebelles aux conditions imposées par la MPPC. En 1918, après une série d’interdictions diverses (les adversaires d’Edison ayant fait jouer contre lui les lois antitrusts) et à la suite de l’annulation de certains de ses brevets, Edison abandonne toute activité cinématographique et poursuit certaines recherches scientifiques qu’il n’avait d’ailleurs jamais entièrement abandonnées (en effet, en 1914, il met au point un accumulateur alcalin au fer-nickel). En cinquante ans d’activités débordantes, Thomas Alva Edison peut être considéré comme l’archétype du self-made man de la Nouvelle Amérique.

J.-L. P.

 F. A. Jones, Thomas Alva Edison, Sixty Years of an Inventor’s Life (Londres, 1907 ; nouv. éd., 1924). / W. H. Meadowcroft, The Boy’s Life of Edison (New York, 1911 ; trad. fr. Edison, Payot, 1929). / G. S. Bryan, Edison, the Man and his Work (Londres, 1926). / P. Devaux, les Aventuriers de la science (Magnard, 1947). / M. Josephson, Edison (New York, 1959).

édition

Publication, mise au jour d’un ouvrage écrit.


Mettre des œuvres intellectuelles à la disposition du public, cette mission fait de l’édition le plus vieux métier de la communication.

Ce sont les scribes de l’Antiquité, les copistes, les enlumineurs et les « stationnaires » du Moyen Âge (ceux qui faisaient exécuter des copies de manuscrits ou des rédactions nouvelles), puis les libraires et les imprimeurs qui ont joué, des siècles durant, le rôle d’éditeur, en n’en prenant du reste le nom qu’à l’aube du xxe s.

Le principal vecteur de messages depuis la Renaissance étant le livre imprimé, c’est autour de lui que s’est faite toute l’industrie de la communication pendant près de cinq siècles. Avec l’emploi des ondes comme porteurs de messages, le volume doit maintenant partager son monopole avec le disque, la radio, le film et la télévision. Ce partage tournera-t-il à l’effacement de l’édition classique, supplantée par les media audiovisuels ou auditifs, ou bien attribuera-t-il aux presses les territoires déjà acquis en confiant aux ondes l’investissement des nouveaux ?

Mais les moyens audio-visuels, qui ont jusqu’ici véhiculé vers les masses des messages surtout affectifs ou sensoriels, n’ayant pas encore démontré qu’ils pouvaient assurer les communications intellectuelles et abstraites dont le livre a été jusqu’ici l’efficace messager, une discrimination devrait s’opérer, tendant à la collaboration entre media divers, livres y compris, avec pour conséquence l’élargissement souhaitable du marché. On appréciera mieux l’avenir en considérant la trajectoire dans le passé de la culture strictement scripturale.


Historique

La communication scripturale, qu’elle soit manuscrite ou imprimée, a permis durant plusieurs siècles à une minorité sachant lire de rompre un profond isolement moral.

En matière de fidélité, de permanence et de diffusion, le message imprimé surclasse d’emblée la transmission manuscrite ou orale. De plus, méthodologie, grammaire, vocabulaire et typographie s’affinant au fil des temps, la pensée de l’auteur se voit de mieux en mieux rendue, au point que la marge d’interprétation du lecteur s’amenuise beaucoup : nulle aujourd’hui en ce qui concerne les sciences exactes, réduite pour les matières abstraites, elle ne subsiste que dans ce qui relève de l’imagination — romans, essais, poésie — ou de l’appréciation subjective : arts, critique littéraire.

Longtemps objets rares, le manuscrit, puis le livre passent par de nombreuses mains ; on les lit avec lenteur, s’en imprégnant profondément. Peu concurrencé par d’autres moyens de propager nouvelles ou idées, le livre exerce une influence, voire une persuasion qui retiennent très tôt l’attention de l’université ou du pouvoir : dès le début du xvie s., le libraire doit obtenir du roi un privilège pour s’assurer l’exploitation d’un titre, après que celui-ci a subi la censure de l’université.

Avant le xviie s., l’édition, circonscrite à une élite de lecteurs, procède par petits tirages de deux ou trois cents exemplaires. Il s’agit là d’un artisanat, dispensateur de services autant que de produits ; d’importance secondaire par ses effectifs, il touche un public restreint mais socialement privilégié, et son influence s’affirme.

Les livres sont relativement chers ; mais, l’enseignement n’étant pas encore pris en charge par l’État, personne n’envisage d’accéder au domaine réservé de la culture sans y mettre le prix ni faire un long effort d’initiation et de réflexion.

Au xviie s., les éditeurs cherchent encore à instruire plus qu’à distraire, à édifier l’âme plutôt qu’à susciter la curiosité ou le doute. C’est qu’il convient de tendre à une société gourmée — que la lecture contribue néanmoins à faire évoluer — le miroir où elle se retrouve rassurée et à son goût.