Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
D

divinatoire (technique)

Moyen de prédire l’avenir.



Classification des techniques divinatoires

La première tentative de classification des procédés mantiques remonte à Cicéron : « Il y a deux espèces de divination, dit-il, l’une est due à l’art, et l’autre à la nature. Indiquez-moi, s’il se peut, une nation, une cité qui ne se gouverne point par des pronostics tirés des intestins des animaux, ou par les interprètes des prodiges ou des éclairs, ou par les prédictions des augures, des astrologues, des sorts (telles sont à peu près les diverses branches de la divination artificielle) ; ou bien montrez-m’en une qui n’ait pas recours aux songes et aux vaticinations qui nous viennent, dit-on, de la nature. » (De divinatione, I, 6.) Les ethnologues et les historiens modernes des religions distinguent, généralement, la divination intuitive ou « inspirée » de la divination inductive ou « raisonnée ». À la première se rapportent, par exemple, les oracles et les prophéties ; à la seconde, les sorts, la divination par les astres ou par les éléments.

On a proposé aussi de classer les techniques divinatoires en fonction des méthodes internes, caractérisées par un changement de l’état de conscience du devin, ou des méthodes externes de l’opération divinatoire quand elle procède par induction à partir de faits extérieurs. Aux premières se rapporteraient les procédés sensoriels, comme la fixation d’une boule de cristal, les automatismes moteurs, tels que l’écriture automatique, la baguette ou le pendule, les impressions mentales, par exemple la divination par les songes, ou oniromancie. En revanche, la consultation du sort par les dés, les osselets (astragalomancie), les viscères des animaux (haruspicine, extispicine), les augures, les présages, l’astrologie, la géomancie constituerait des méthodes externes.

D’autres spécialistes ont divisé les procédés mantiques en cinq groupes : le prophétisme, divination par intuition pure, à l’état de veille, les techniques hallucinatoires, utilisant soit l’ingestion de drogues hallucinogènes, soit des procédés d’hypnose légère du devin, par exemple la divination par le miroir ou catoptromancie, les procédés arithmétiques ou numérologiques, comme le tirage et le classement des combinaisons du pair et de l’impair, les observations des comportements et des formes, telles que celles du vol des oiseaux et de la physionomie, et les systèmes abacomantiques, dont les principes se fondent sur le tirage des réponses et des présages codifiés par des tables de référence.


Consultation divinatoire

Quel que soit l’intérêt de ces classifications, leur caractère abstrait dissimule la complexité concrète des techniques divinatoires et la superposition des niveaux d’interprétation qui s’y trouvent associés et engagés. Dans toute consultation de ce genre interviennent aussi de nombreux phénomènes d’interrelation entre les individus comme entre les groupes sociaux. L’induction et l’intuition s’échangent autant qu’elles s’opposent dans les opérations et les raisonnements du devin. L’inspiration et ce que l’on pourrait nommer la « tendance prophétique » jouent un rôle important même dans les techniques divinatoires le plus rigoureusement codifiées. En ce sens, on comprendra mieux qu’il ne puisse exister aucune divination purement inductive, ni, par conséquent, aucune divination de type scientifique. Les techniques divinatoires sont toujours des arts et, le plus souvent, dans les sociétés primitives, des métiers.

On y observe, de façon constante, trois phases principales :
— la préparation magico-religieuse ;
— la production ou l’apparition des signes ;
— l’interprétation.

Ces trois temps de l’opération divinatoire, dans les sociétés de type traditionnel, sont toujours liés de façon précise à des rites et à des codes, à des mythes et à des modèles ou à des archétypes, établis et fixés par un enseignement ésotérique et initiatique. Aussi est-il légitime de rapprocher le statut social du devin de celui du médecin, du magicien, du chamane ou du féticheur, car on ne constate jamais l’existence d’une technique divinatoire d’origine purement expérimentale et rationnelle, bien que le raisonnement inductif et déductif intervienne dans le classement des signes et l’élaboration des présages.

L’analogie de la fonction du devin et de celle du médecin, dans les sociétés primitives, se fonde aussi sur le fait qu’ils sont l’un et l’autre consultés pendant les périodes critiques de la vie des individus et des sociétés. De ce point de vue, le devin n’est pas considéré seulement comme capable de connaître l’avenir ; on lui demande aussi de préparer les décisions du consultant et de rechercher les formules, les lieux et les temps propices aux actions les plus efficaces. En éliminant l’état d’insécurité, de doute et de crise, en restituant à l’homme sa croyance en la présence et en la volonté du destin et des dieux, le devin traditionnel accomplissait réellement une opération magique et thérapeutique de grande portée : il faisait prévaloir le signifiant sur le non-sens angoissant de l’Univers.

R. A.

➙ Astrologie / Élément / Ésotérisme / Magie / Prophétie / Sorcellerie.

 A. Bouché-Leclercq, Histoire de la divination dans l’Antiquité (Leroux, 1879-182 ; 4 vol. ; réimpr. Culture et civilisation, Bruxelles, 1963). / R. C. Thompson, The Reports of the Magicians and Astrologers of Nineveh and Babylon in the British Museum (Londres, 1900 ; 2 vol.). / W. Hoffmann, Wandel und Herkunft der Sibyllinischen Bücher (Leipzig, 193). / O. Neugebauer, The Exact Sciences in Antiquity (Providence, Rhode Island, 1952 ; nouv. éd., New York, 1969). / T. Fahd, la Divination arabe (Brill, Leyde, 196). / A. Caquot et M. Lebovici (sous la dir. de), la Divination (P. U. F., 1968 ; 2 vol.).

Djāḥiz (Abū ‘Uthmān ‘Amr ibn Baḥr al-)

Écrivain et humaniste arabo-iraqien (Bassora v. 776 - id. 868 ou 869).