Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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distribution (suite)

D’après une enquête effectuée auprès de plusieurs entreprises, il semble qu’au premier rang doive figurer le secteur automobile, puisque 50 p. 100 de son chiffre d’affaires, soit 6,2 milliards de francs en 1968, proviennent de commandes prises à l’occasion ou à la suite d’un contact direct chez le client. Le secteur automobile représente d’ailleurs plus de 70 p. 100 du chiffre d’affaires de la vente à domicile. L’équipement électroménager occupe la deuxième place, avec 1,536 milliard de francs de chiffre d’affaires, soit 30 p. 100 du chiffre total de la branche. La moitié des ventes de machines à coudre et à tricoter résulte aussi de la vente à domicile. La place prise par les autres secteurs est plus réduite, mais, pour les différents produits, les ventes à domicile ne sont pas toujours marginales, comme en témoigne l’exemple du marché des encyclopédies, dont 70 p. 100 du chiffre d’affaires sont réalisés de cette manière. Les produits de beauté, malgré leur apparition relativement récente, doivent déjà par cette méthode 12 p. 100 de leurs ventes, soit 101 millions de francs en 1968. Le succès de la vente à domicile dans certains secteurs tient au fait que celle-ci apparaît, en raison de l’évolution actuelle, particulièrement bien adaptée aux besoins et aux goûts des consommateurs.

Pour les entreprises, le démarchage à domicile représente de nombreux avantages. Il leur permet de conquérir de nouveaux marchés. En effet, il remédie au sous-équipement commercial dû aux récentes migrations de la population française vers la périphérie des villes : les centres commerciaux traditionnels sont presque toujours situés au centre des villes et restent inabordables en raison des difficultés de circulation et de stationnement pour les automobiles. Un autre avantage considérable, pour les firmes qui utilisent cette formule, est de s’adresser directement aux femmes qui, retenues à leur domicile par de jeunes enfants ou des tâches ménagères, ne possèdent pas les loisirs ni le temps nécessaire pour s’intéresser ailleurs que chez elles aux produits qui leur sont proposés. Les meilleures conditions de réceptivité sont alors réunies, la résistance des consommatrices devant une offre de produits étant d’autant plus faible que le milieu dans lequel ceux-ci sont proposés est plus familier. Il convient de noter que, même si les ventes n’ont pas lieu au moment de la visite, elles ont été déterminées par elle. Ainsi, sur dix ventes réalisées par la vente à domicile, six au moins n’auraient pu être conclues avant un délai minimal de deux ans si elles n’avaient pas été précédées d’une démonstration à domicile.

Pour améliorer encore la rentabilité du procédé, certaines entreprises eurent l’idée de remplacer le démarcheur traditionnel, qui fait du simple porte-à-porte, par une nouvelle formule qui semble avoir eu pour certains produits une efficacité remarquable. C’est ainsi qu’une firme vendant des récipients en plastique destinés à conserver les aliments dans les réfrigérateurs a mis en place un système qui repose sur des réunions entre amies auxquelles participe une démonstratrice qui explique le maniement et les avantages du matériel. Les femmes ainsi sollicitées se laissent plus facilement convaincre et achètent plus vite en raison des rivalités inconscientes qui naissent entre elles. D’autres entreprises, qui vendent des cosmétiques, des parfums, des perruques ou des robes, utilisent une forme de vente assez semblable fondée sur les relations de voisinage.

Du point de vue économique, les avantages de ces différentes formules sont considérables, car elles permettent, pour les entreprises, de supprimer une partie des frais salariaux. Au niveau de la production, la vente à domicile convient particulièrement bien, de même que la vente par correspondance, à la production de masse ; elle est pour l’entreprise un facteur de stabilité du chiffre d’affaires, elle régularise la production et, jouant en faveur de la fabrication de longues séries, permet un certain abaissement des coûts de revient. En fait, par rapport aux autres méthodes de vente, le démarchage n’est pas toujours dans une situation de concurrence, mais plutôt de complémentarité, car, mieux adapté aux nécessités horaires de la vie quotidienne moderne, il provoque des phénomènes de transfert et suscite un appétit général de consommation qui profite à tous. C’est pourquoi de nombreux concessionnaires distributeurs de marque qui vendent en magasin font aussi contacter leur clientèle éventuelle par des visiteurs à domicile. Enfin, le service avant et après vente pose moins de problèmes pour les entreprises qui ont un réseau de représentants à domicile.


La vente par correspondance

Quant à la vente par correspondance, elle pourrait être définie comme un système commercial où le catalogue est l’unique véhicule pour offrir les produits à la clientèle et où la poste et le chemin de fer sont les seuls traits d’union entre l’acheteur et le vendeur. Jusqu’à présent, les définitions ont varié d’un pays à l’autre. En France, l’organisation professionnelle de la branche considère elle aussi comme vente par correspondance toute vente où le catalogue constitue l’unique véhicule pour offrir des produits à la clientèle ; cependant, cette formule englobe non seulement les ventes directes par catalogue, mais aussi les ventes par catalogue avec intermédiaires, représentants, groupeurs de commandes. Sont exclues les ventes de porte-à-porte, sans catalogues, par courtiers.

En fait, il ne s’agit pas d’une formule nouvelle de vente, puisque la plus ancienne maison française pratiquant la formule a été créée en 1831 (Manufacture d’armes et cycles de Saint-Étienne). Mais, à partir de 1959, la croissance de la vente par correspondance a été sensible : entre 1965 et 1970, le phénomène s’est accentué puisque l’on a vu certaines entreprises progresser à un taux dépassant 35 p. 100 par an, doubler ainsi leur chiffre d’affaires en trois ans et procéder à des investissements importants. À l’étranger, la formule représente, par rapport à l’ensemble du chiffre d’affaires de la distribution, 0,70 p. 100 en Belgique, 1,5 p. 100 en Suisse, 3,5 p. 100 en Grande-Bretagne et aux États-Unis, 7 p. 100 en Allemagne. Sous la pression d’ailleurs de la concurrence européenne (des firmes allemandes par exemple prospectent le marché), la vente par correspondance a conquis de nouvelles positions en France. À côté des bourgs et des campagnes, terrain traditionnel de prospection des maisons de vente par correspondance, les agglomérations urbaines qui se développent sans toujours disposer d’un appareil commercial suffisant offrent un nouveau champ d’expansion à ce type, de distribution.