Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

Algérie (suite)

Le 20 août 1955, le F. L. N. fait preuve de sa force en provoquant, à l’occasion du second anniversaire de la déposition de Muḥammad V, un soulèvement général dans le Nord-Constantinois. À la suite de cette démonstration de force, certains partis politiques intègrent le F. L. N. En janvier 1956, ‘Abbās déclare que l’U. D. M. A. est prête à soutenir le F. L. N. Et, au mois d’avril suivant, il arrive au Caire avec Ahmed Francis pour se mettre à la disposition de ce mouvement. Les ulémas font de même, et le Parti communiste algérien (P. C. A.) manifeste aussi son désir d’entrer, en tant que parti, dans les rangs du F. L. N. Seul le Mouvement national algérien (M. N. A.), fondé par Messali au début de 1955, reste à l’écart. Le vieux leader n’admet pas de suivre une action qui échappe à son autorité. Il constitue ses propres groupes de combat, dirigés plus contre le F. L. N. que contre les Français. En 1957, le commandant de ces groupes, Mohammed Bellounis, passe pour un temps au service de la France pour lutter contre l’A. L. N. Cela finit par compromettre le M. N. A., dont l’audience en Algérie est d’ailleurs très limitée. Dès 1956, le monopole politique appartient incontestablement au F. L. N.


Le congrès de la Soummam et la restructuration du F. L. N.

Pour assurer une meilleure coordination des diverses willaya, les dirigeants de l’A. L. N. sentent le besoin de doter le mouvement de structures nouvelles. C’est la tâche que se propose le congrès de la Soummam, tenu au mois d’août 1956. Animé par Ramdane Abane, le chef de la willaya III, ce coupes affirme l’aspect progressiste de la révolution algérienne, qui constitue une « lutte pour la renaissance d’un État algérien sous la forme d’une république sociale et démocratique, et non la restauration d’une monarchie ou d’une théocratie dépassée ». Il établit le caractère collégial de la direction, la primauté du point de vue politique sur le point de vue militaire et aussi des combattants de l’intérieur sur les membres de la Délégation extérieure. De plus, une sixième willaya est créée dans les territoires du Sud. C’est sur cette base que le congrès de la Soummam met sur pied les nouvelles structures du F. L. N. La direction du mouvement est confiée au Conseil national de la révolution algérienne (C. N. R. A.), composé de 34 membres et de 17 suppléants, et groupant les chefs de willaya et leurs adjoints, les « chefs historiques » et les ralliés de marque comme ‘Abbās. Le C. N. R. A. se réunit une fois par an, sauf convocation extraordinaire. Il délègue le pouvoir exécutif à un Comité de coordination et d’exécution (C. C. E.) de cinq membres, tous résidant sur le territoire algérien.


Le C. C. E. et le G. P. R. A.

Le C. C. E. se substitue à la Délégation extérieure pour la direction du F. L. N. Deux mois plus tard, en octobre 1956, les principaux membres de cet organisme sont arrêtés, l’avion qui doit les conduire de Rabat à Tunis étant détourné sur Alger à la demande des autorités françaises d’Algérie. L’année suivante, le C. C. E. quitte Alger pour Tunis, où il rejoint la Délégation extérieure, qui, depuis le 17 avril, siège dans la capitale tunisienne. Le C. N. R. A. est alors convoqué au Caire pour apporter des modifications dans la direction du mouvement. Il porte le nombre de ses membres de 34 à 54, les vingt nouveaux devant être désignés par le C. C. E. Ce dernier comprend désormais 9 membres, qui se partagent les tâches à la manière des ministres. Le 19 septembre 1958, il se transforme en gouvernement provisoire de la République algérienne (G. P. R. A.), au sein duquel toutes les tendances du F. L. N. sont représentées. La présidence de cet organisme est confiée à l’ancien chef de l’U. D. M. A., ‘Abbās. Au mois d’août 1961, le G. P. R. A. est remanié. Les « ralliés » de l’U. D. M. A. et des ulémas sont évincés du gouvernement, dont la présidence passe à Youssef Ben Khedda, ancien secrétaire général du M. T. L. D. et membre du premier C. C. E. C’est ce cabinet qui, en 1962, mènera avec le gouvernement français des négociations qui conduiront l’Algérie vers l’indépendance.


La France face à la révolution algérienne

Au début de la révolution, les cabinets Mendès France et Edgar Faure affirment solennellement le caractère français de l’Algérie. Nommé au gouvernement général en janvier 1955, Jacques Soustelle préconise une politique d’intégration qui, précise-t-il, tienne compte de « l’originalité ethnique, linguistique, religieuse de l’Algérie ». Pour désarmer le F. L. N., Jacques Soustelle compte sur des réformes économiques et surtout administratives, qui favorisent l’entrée de l’élite musulmane dans la fonction publique.

C’est, avec quelques nuances, la politique adoptée par Guy Mollet, qui affirme, peu de temps après son accession à la présidence du gouvernement, que « les liens unissant la France métropolitaine et l’Algérie sont indispensables ». Le 12 mars 1956, l’Assemblée nationale adopte à une très forte majorité, comprenant les communistes, une loi lui accordant des pouvoirs spéciaux pour son action en Algérie. Le ministre résidant Robert Lacoste met l’accent sur les réformes, dont les plus importantes concernent l’accession de l’élite musulmane à la fonction publique et des paysans à la propriété. Parallèlement, le gouvernement Guy Mollet entreprend de mettre un terme à l’activité de l’A. L. N. À cet effet, des réservistes sont rappelés, et l’effectif des troupes stationnées en Algérie est porté de 200 000 en mars 1956 à plus de 400 000 en août.

• La loi-cadre de 1958. En 1957, le cabinet Bourgès-Maunoury soumet à l’Assemblée nationale un projet de loi-cadre pour l’Algérie. Rejeté en septembre 1957, ce projet est repris par le cabinet Félix Gaillard et adopté en février 1958. La nouvelle loi affirme que l’Algérie est « partie intégrante de la République française », mais que la « personnalité algérienne » serait respectée. Elle donne aux diverses communautés algériennes le droit d’être représentées à toutes les assemblées de la République. Elle groupe les départements algériens en cinq territoires (Oran, Chélif, Alger, Kabylie et Constantinois), appelés à « gérer librement et démocratiquement leurs propres affaires » par le moyen d’une assemblée territoriale et d’un « gouvernement responsable devant elle » ; elle crée un Conseil territorial des communautés, composé par moitié d’Européens et de musulmans. Un « ministre dépositaire des pouvoirs de la République » représente la France en Algérie. Il a sous son autorité des représentants du gouvernement français, nommés dans chaque territoire par le président de la République.