Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
D

désherbage (suite)

La lutte contre les mauvaises herbes

Le désherbage met en œuvre de nombreuses techniques, aux interactions généralement synergiques. L’objectif n’est pas tant de détruire la totalité des mauvaises herbes que d’en dominer l’expansion.


Méthodes non chimiques

• Méthodes physiques ou mécaniques. Le travail manuel, à la houe ou à la faux, reste le seul moyen quand une adventice représente un danger potentiel sans être gênante dans l’immédiat ou possède un recouvrement faible (cas du Chardon dans les prairies). L’un des objectifs du travail du sol (labours, façons superficielles) est la destruction et l’enfouissement des mauvaises herbes. Même si des plantes sont tuées par d’autres moyens, ce travail reste souvent nécessaire. Le sarclage, souvent qualifié de binage, est réalisé par des outils à dents coupantes, dans un plan horizontal, qui sectionnent les racines des adventices. Ces méthodes imposent d’attendre un certain développement des adventices, qui peuvent déjà avoir nui aux cultures.

En maraîchage ou en arboriculture, on utilise la destruction par la chaleur (traitement des sols à la vapeur, lance-flammes) ou par mulching (couverture du sol).

Enfin, deux méthodes imposent une organisation collective ou de très grandes unités de production : la lutte par le feu (feu de brousse), qui détruit les organes aériens mais fort peu les graines et organes souterrains, et l’inondation, hors des périodes de culture ou pendant celles-ci pour certaines plantes cultivées (Riz).

• Méthodes « écologiques ». On recherche une modification durable du milieu, qui le rende moins favorable aux adventices. Ainsi, le chaulage (élévation du pH), le drainage (élimination de l’eau en excès), le travail du sol et d’une manière générale l’élévation de la fertilité sont des méthodes qui modifient les aptitudes à la concurrence des plantes cultivées.

• La lutte biologique « sensu stricto ». On recherche des parasites d’une adventice susceptibles de la détruire sélectivement. Les règles d’application sont :
— de découvrir un parasite spécifique dans un milieu originel ;
— de l’introduire dans un milieu nouveau et de vérifier qu’il y est viable ;
— de s’assurer que la spécificité d’action est conservée.

Cette lutte connaît de grands succès, tels que la destruction de Cactacées australiennes au début de ce siècle par une Mouche californienne. Elle reste d’emploi difficile dans des régions de polyculture ou pour des adventices trop voisines des plantes cultivées ; mais la sélection de parasites spécifiques doit être possible.


Le désherbage chimique

Il est apparu à la fin du siècle dernier, mais s’est développé seulement après 1930, surtout avec l’essor de la biochimie. Les groupes chimiques sont très nombreux.

• Les désherbants et la plante. On classe les désherbants en deux grandes classes :
— les désherbants « de contact » brûlent les tissus par contact (chlorate, colorants nitrés) ; cette action est utilisée aussi pour les défoliants ;
— les désherbants « systémiques » doivent être absorbés et véhiculés par la plante jusqu’au site où ils sont actifs (c’est le cas des hormones, des triazines, des urées substituées...). Ils y bloquent ou y accélèrent certaines réactions : photosynthèse, respiration, division cellulaire... La pénétration se fait par les racines ou à travers l’épiderme des feuilles (quelquefois par les stomates, mais essentiellement au travers de la cuticule) ; puis les désherbants circulent par les vaisseaux libéroligneux.

• Les désherbants et le sol. De nombreux désherbants sont appliqués au sol, d’où ils seront prélevés par les racines. Ils peuvent être apportés à l’état de granulés peu solubles, mais sont plus souvent fixés sur des particules du sol par diverses liaisons physico-chimiques. Leur déplacement se fait essentiellement par l’eau.

Le destin des produits est varié : ils peuvent être détruits (par voie chimique ou microbiologique), absorbés par les plantes (dégradés ou non par elles) ou éliminés (drainage en profondeur ou évaporation).

• Utilisation des produits désherbants. Quand on traite le sol, la question se résume à la quantité de solvant utilisée, en fonction des appareils dont on dispose. Quand on traite la plante, il faut être sûr de l’adhérence du produit à la feuille, parfois difficile (présence de poils, de cire, feuilles longues ou inclinées...). Aussi est-on amené à ajouter à la solution de traitement des « adjuvants » qui améliorent le contact. La qualité du traitement dépend de l’appareil, chaque point traité devant recevoir la même dose de produit. Les principales exigences sont :
a) pour la cuve, le maintien d’une pression constante et le maintien de l’homogénéité de la solution ou de la pseudo-solution ;
b) pour la rampe de traitement, le maintien d’une pression constante en tous points, la conservation en bon état des buses, le réglage précis en hauteur, le parallélisme au sol rigoureux.

La formulation est la préparation d’une matière active sous la forme d’un produit commercial : choix d’une combinaison chimique, choix d’une présentation (liquide ou granulé), choix d’un mélange.

Lorsque le traitement est fait sur la plante, les conditions d’humidité et de température sont essentielles pour sa réussite. Les doses sont faibles (quelques centaines de litres par hectare). Aussi une pluie ou un temps trop sec peuvent-ils rendre un produit inactif.

• Principales propriétés des désherbants.
aLa sélectivité. Un produit idéal doit tout détruire sauf la plante cultivée. Il serait alors totalement sélectif. En fait, une telle propriété est relative ; elle dépend :
— des doses utilisées ;
— du comportement du sol (plus il y a de matières organiques, plus les doses doivent être élevées) ;
— du stade végétatif de la plante cultivée (choix de la période de résistance) ;
— du stade végétatif de l’adventice (choix de périodes sensibles : ce sont très souvent les stades germination, levée ou plantule) ;
— du climat ;
— de la rémanence du produit utilisé.
Elle est obtenue de plus en plus par des mélanges de produits.
bLa rémanence. Elle définit la période de conservation possible dans le sol. Elle dépend des possibilités de dégradation dans le sol et du climat. Longue, elle peut provoquer des accidents (passage de la plante cultivée à une phase sensible) ou être un avantage (spécialisation des parcelles).