Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
D

délire (suite)

3. Le délire d’imagination, ou paraphrénie, consiste en une sorte de fabulation fantastique faite de souvenirs et d’événements déformés ou créés de toutes pièces par une imagination débordante. Les idées de ces malades sont extravagantes, avec des croyances en des phénomènes surnaturels bizarres, de dimension cosmique. Les malades imaginent des scénarios extraordinaires, des situations qui défient tout bon sens : délires mégalomaniaques de filiation, d’identification à des personnages illustres, de métempsycose, délires politiques ou métaphysiques extravagants. Malgré la richesse des idées délirantes, les malades continuent à mener une existence quotidienne apparemment normale. Le contraste entre un délire fantastique et une activité sociale conservée est très caractéristique du délire paraphrénique.

Il convient de noter que les psychoses délirantes aiguës et les délires chroniques ne résument pas toute la pathologie mentale dans laquelle s’observent des idées délirantes. Celles-ci se rencontrent encore comme symptôme secondaire dans les confusions mentales, où il s’agit davantage d’un onirisme que d’un délire, dans les démences*, dans la schizophrénie et dans certaines formes de dépression mélancolique (v. mélancolie).


Le traitement des délires

Il faut distinguer comme précédemment les psychoses délirantes aiguës, qui sont généralement curables avec restitutio ad integrum, et les psychoses délirantes chroniques, qui ne peuvent être que stabilisées ou améliorées par les traitements. Les premières ont vu leur évolution nettement écourtée par les neuroleptiques à bonne dose et éventuellement par les électrochocs. Les secondes sont d’un abord thérapeutique beaucoup plus difficile. Autrefois, le délire chronique, une fois installé (chez un sujet le plus souvent d’âge mûr), durait toute la vie du malade et entraînait à la longue un internement.

Depuis l’introduction des neuroleptiques en psychiatrie, depuis les efforts psychothérapiques et sociothérapiques, la majorité des délires chroniques sont nettement améliorés et stabilisés. De nombreux malades quittent l’hôpital après leur traitement et peuvent reprendre une vie quasi normale, à condition de suivre un traitement continu et de se plier à la discipline des consultations régulières. Il faut aussi que l’entourage, notamment la famille et les employeurs, fasse preuve de bonne volonté et de compréhension. Ces bons résultats sont dus à l’action des médicaments psychotropes sur l’anxiété, les troubles de l’humeur, les hallucinations et la force des convictions délirantes. Grâce à cette action médicamenteuse puissamment réductrice du délire, les malades prennent une certaine distance à l’égard de leurs idées délirantes et parviennent parfois à les critiquer totalement. Il faut bien savoir néanmoins que la conviction de certains délirants, surtout les paranoïaques et les passionnels, reste intacte malgré le traitement. Ils deviennent simplement plus indifférents, moins passionnés, leur délire tend à s’enkyster, à se limiter à quelques idées assez pauvres et peu actives. L’abord psychothérapique, facilité par la chimiothérapie, a fait de très sensibles progrès ces dernières années. Les méthodes sociothérapiques ou institutionnelles ont aussi beaucoup aidé à la réinsertion socioprofessionnelle des délirants. La plupart des délirants chroniques peuvent actuellement être hospitalisés dans les services de psychiatrie ouverts, ou traités en consultation, et l’on tend à éviter l’internement dans la mesure du possible.

G. R.

 N. T. Koressios, Recherches psychothérapiques sur les délires (Maloine, 1943). / J. et L. Gayral, les Délires de possession diabolique (Vigot, 1944). / P. Guyraud et coll., Psychopathologie des délires (Hermann, 1950). / K. Schneider, Über den Wahn (Stuttgart, 1952). / A. Achaintre, les Délires (les Monographies médicales et scientifiques, 1964 ; 2 vol.). / H. Faure, les Objets dans la folie, t. II : les Appartenances du délirant (P. U. F., 1966).

délit

Au sens large, toute infraction à la loi. En droit pénal, infraction que le législateur punit d’une peine correctionnelle, par opposition au crime* et aux contraventions*.


Le délit pénal, qui est nécessairement assorti d’une peine, est constitué par la violation d’un texte de loi qui l’établit formellement. Il existe aussi un délit civil, qui se confond parfois avec le délit pénal et qui est l’objet d’une disposition très générale du Code civil : « Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer » (art. 1382). Ainsi, en cas de collision entre une automobile et un piéton ayant entraîné la mort de ce dernier, s’il y a eu faute du conducteur, ce dernier a commis un délit civil et, en outre, un délit pénal, le délit d’homicide involontaire prévu par l’art. 319 du Code pénal.

Le délit peut être réalisé par une action qui s’exécute en un instant, tel le vol, la soustraction frauduleuse de la chose d’autrui, ou par une action qui se poursuit dans le temps et qui s’y prolonge par la réitération constante de la volonté coupable de son auteur, tels le port illégal de décorations ou le recel de choses volées ou détournées ; ou encore, il pourra s’agir d’un délit continué, comme ce sera le cas pour le vol d’eau, de gaz ou d’électricité, effectué au moyen d’un branchement direct sur les canalisations. Parfois, le délit, pour être punissable, exige non pas une action unique ou isolée, mais l’accomplissement de plusieurs actes semblables dont chacun, pris isolément, n’est pas répréhensible, tandis que la répétition constitue l’infraction punissable : il en est ainsi de l’exercice illégal de la médecine, qui ne saurait être constitué par la participation à un acte médical unique. Enfin, l’escroquerie est l’exemple type de délit complexe qui suppose plusieurs actes différents, coordonnés et concourant à une fin unique, étapes successives d’une seule entreprise délictueuse tendant à escroquer tout ou partie de la fortune d’autrui.