défense (suite)
Autres formes de menace et de défense
Quelle que soit l’importance du fait atomique, elle ne suffit pas à rendre compte de toutes les formes de menaces qui s’exercent sur la liberté des peuples. Si l’image apocalyptique de la guerre nucléaire a contribué à faire reculer la probabilité d’une guerre mondiale, elle a aussi communiqué une impulsion nouvelle aux autres formes de pression par lesquelles s’exprime la politique des nations. Que ces pressions soient d’ordre politique, économique ou idéologique, elles s’appliquent aussi bien aux nations atomiques qu’aux autres ; toutes, en outre, continuent à courir le risque d’agressions militaires de type classique. Toutefois, la politique de défense des nations de second rang ne saurait ignorer les intérêts et les exigences des « grands », entre lesquels elles ne peuvent que manœuvrer en marchandant la valeur de leur position géopolitique ou de leurs richesses économiques. Cette relative indépendance du fait nucléaire éclaire l’existence des conflits limités qui, en Indochine, au Moyen-Orient ou à l’occasion de la décolonisation, n’ont guère cessé depuis 1945. Ainsi s’explique que, même pour les puissances atomiques, les systèmes de défense comprennent encore des forces militaires de type classique, destinées à répondre à toute menace non atomique ou à permettre des interventions limitées à l’extérieur, et des troupes dites « territoriales », directement chargées à l’intérieur de la sécurité des personnes et des biens. Enfin, aux systèmes de défense se rattachent, dans la plupart des pays, les organisations de protection des populations civiles (v. protection civile), dont la mission recouvre la sauvegarde à l’égard des sinistres occasionnés par la guerre ou par les calamités naturelles (incendie, inondation, etc.). Les structures de la défense, particulières à chaque pays, distinguent partout désormais le domaine de la mise sur pied et de l’équipement des forces de celui de leur emploi. Ce dernier, lorsqu’il s’agit de l’arme nucléaire, relève de la décision du seul chef de l’État, responsable devant la nation de son existence et de sa continuité.
Vers une extension de la notion de défense ?
Au terme de cette longue histoire, le problème originel de la défense apparaît aujourd’hui chargé d’une singulière complexité et semble réservé désormais — ne serait-ce que par le vocabulaire souvent hermétique de la stratégie* moderne — à un nombre restreint de techniciens. Mais, privé de sa finalité qui demeure essentiellement humaine, tout système de défense s’effondre s’il ne repose sur une volonté commune. Il lui faut « le support de l’approbation populaire, massive, profonde [...], du ressort moral, de la résolution, de la volonté de vivre qui anime un peuple » (G. Pompidou, 1969). C’est dans cet esprit que, tenant compte de la très grande vulnérabilité du monde actuel, la défense tend à s’orienter vers un domaine plus vaste que la seule perspective de résistance à un conflit armé. Traduisant la capacité physique et morale d’une nation de résister aux pressions de tous ordres qui pèsent sur son existence, la politique de défense n’a-t-elle pas pour but d’instaurer, de maintenir, voire de rétablir un état d’équilibre et de paix conforme aux besoins comme aux aspirations de la communauté nationale ?
B. de B.
➙ Armée / Armement / Aviation / Bombe nucléaire / Désarmement / Guerre mondiale (Première et Seconde) / Marine / Missile / Nucléaire (arme) / Protection civile / Stratégie.
E. J. Valluy, Se défendre ? Contre qui ? contre quoi ? et comment ? (Plon, 1960). / R. Aron, Paix et guerre entre les nations (Calmann-Lévy, 1962). / X. Sallantin, Essai sur la défense (Desclée De Brouwer, 1962). / Demain l’armée française (l’Esprit nouveau, 1963). / A. Beaufre, Dissuasion et stratégie (A. Colin, 1964). / B. Chantebout, l’Organisation de la défense nationale en France depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale (L. G. D. J., 1967) ; la Défense nationale (P. U. F., 1972). / R. Girardet, Problèmes contemporains de défense nationale (Dalloz, 1974).