Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
D

Davis (Miles) (suite)

Un monde entre les modes

En 1963, Miles Davis présente un nouveau quintette, dont les musiciens les plus remarquables sont le batteur Tony Williams et le pianiste Herbie Hancock. Au contact de ces très jeunes jazzmen, et bien qu’il méprise ostensiblement toute référence à la mode ou à une quelconque « avant-garde », le trompettiste va une fois de plus renouveler, actualiser son univers sonore. Son jeu donne désormais — et quel que soit le tempo — une impression de statisme rythmique que viennent pallier et souligner la puissance, la complexité (ruptures de tempo, accents irréguliers, superposition de rythmes secondaires) du percussionniste qu’il s’est choisi. Apparemment indifférent aux excès du free jazz et peu soucieux de participer à la course au succès effrénée des orchestres pop, Davis continue son aventure solitaire, ne retenant des musiques voisines que ce qui lui permet d’aller chaque fois un peu plus loin dans sa propre direction. Un percussionniste latino-américain (Airto Moreira), de jeunes musiciens anglais issus des milieux « pop » (le guitariste John McLaughlin, les bassistes Dave Holland et Jack Bruce), un virtuose du piano électrique (Chick Corea) ou un pianiste-saxophoniste (Keith Jarrett), les polyrythmies les plus raffinées alternant avec le pouvoir quasi hypnogène d’un martèlement très simple (Tony Williams, puis Jack DeJohnette à la batterie) : autant d’innovations qui indiquent que Miles Davis se veut partisan de la révolution-création permanente. « Tout cela, explique-t-il, est affaire d’imagination. Charlie Parker en avait. Pour jouer, il faut à la fois de l’imagination et des connaissances. »

P. C.

Moments et lieux

1926

Alton (Illinois). Naissance de Miles Dewey Davis junior.

1927

Saint Louis (Missouri). La famille Davis s’installe à Saint Louis.

1939

Comme cadeau d’anniversaire, Miles reçoit de son père une trompette.

1941-1943

Il fait partie de l’orchestre d’Eddie Randall.

1945

New York. Miles suit les cours de l’académie de musique Juilliard.

1946

Il joue avec Charlie Parker, Coleman Hawkins, part en tournée avec Benny Carter puis avec le grand orchestre de Billy Eckstine.

1948

Premières apparitions, au Royal Roost, d’un orchestre dirigé par Davis.

1949

Paris. Il joue à Paris, salle Pleyel.

1950

New York. Derniers enregistrements pour Capitol de la série « Birth of The Cool ».

1952

Tournées avec Zoot Sims et Milt Jackson.

1955

Création du quintette avec John Coltrane.

1957

Premières œuvres « concertantes », en collaboration avec l’arrangeur Gil Evans.
Paris. Enregistrement de la musique du film Ascenseur pour l’échafaud.

1961

New York. Concert Davis-Evans à Carnegie Hall.

1963

Antibes. Au programme du quatrième festival de jazz : le nouveau Miles Davis Quintet.

1970

New York. Triomphe au Fillmore East.

1971

New York. Enregistrement de la musique d’un film consacré au champion de boxe noir américain Jack Johnson.

Davy (sir Humphry)

Chimiste et physicien anglais (Penzance, Cornouailles, 1778 - Genève 1829).


Le jeune Davy, éduqué à l’école de son village, est surtout attiré par la campagne, les bois, les eaux claires, et confie ses rêveries à un carnet qui ne le quitte jamais. Son père est sculpteur et doreur sur bois ; il ne réussit guère dans ce métier et tente, sans plus de succès, de faire valoir une petite ferme qu’il possède. Mais il meurt en 1794. Sa veuve, restée presque sans ressources avec cinq enfants, ouvre un petit magasin de modes et tient une pension de famille.

Humphry, son fils aîné, est mis en apprentissage à quinze ans chez un apothicaire et chirurgien de Penzance. Dès ce moment, il sent naître en lui un goût profond pour la chimie. Une circonstance fortuite va le confirmer : le fils de l’illustre Watt est logé chez sa mère, et, pour se faire valoir auprès de lui, Davy se procure le Traité élémentaire de chimie de Lavoisier*, qu’il assimile en deux jours.

Cette manœuvre est couronnée de succès, Watt le recommande au docteur Thomas Beddoes, qui l’appelle à Bristol, dans l’établissement médical où il applique l’action des gaz au traitement des maladies pulmonaires. C’est là que Davy reconnaît, en 1799, l’effet sur l’organisme du protoxyde d’azote, qu’il baptise gaz hilarant ; il tente d’ailleurs sur lui-même diverses expériences en respirant les gaz les plus divers.

La publication de ces essais le fait connaître. Le comte Rumford, qui vient de créer à Londres la Royal Institution, destinée à propager les découvertes scientifiques applicables à l’industrie et aux arts utiles, lui offre en 1802 la chaire de chimie. Malgré son jeune âge, il s’y révèle un professeur brillant et devient le conférencier à la mode. Il est nommé membre de la Royal Society en 1803, puis président de cette société ; en 1813, il est accueilli par l’Académie des sciences de Paris. En 1818, il sera créé baronnet.


L’œuvre de Davy

Pendant vingt-cinq ans, Davy travaille sans interruption, et la découverte du courant électrique va lui fournir un moyen d’action puissant en chimie. Grâce à une pile de deux mille éléments installée à l’Institution royale à la suite d’une souscription, il réalise de nombreuses décompositions chimiques. C’est ainsi qu’il isole successivement le sodium et le potassium en 1807 et, l’année suivante, le baryum, le strontium et le calcium ; il reconnaît le caractère métallique de ces éléments. Ce sont également ses travaux sur l’électrolyse qui lui font envisager que les propriétés acides tiennent à la présence de l’hydrogène ; il est alors amené à distinguer entre acides et anhydrides. Il effectue aussi des mesures sur les produits de l’électrolyse et découvre, vers 1811, le phénomène de l’arc électrique. On lui doit encore des travaux, avec Faraday*, qu’il a accueilli auprès de lui, sur la liquéfaction des gaz et la découverte, en 1817, des propriétés catalytiques du platine divisé.

À la suite d’une grave explosion de grisou, qui provoque la mort de nombreux ouvriers dans une mine de Cornouailles, il invente, à la demande des propriétaires de charbonnages, la lampe de sûreté à toile métallique (1815) qui sauvera la vie de centaines de mineurs. On lui commande d’ailleurs une découverte comme on commande à d’autres des fournitures et il trouve en 1823, à la requête de l’Amirauté, un moyen d’éviter la rapide corrosion des doublages en cuivre des coques de navires.

Pendant les hivers de 1827 et 1828, il participe aux fouilles d’Herculanum, où l’envoie le prince régent, pour y procéder au déroulement des manuscrits. Il écrit, sous le titre de Salmonia (1828), le récit de ses observations, ainsi que les Consolations en voyage ou les Derniers Jours d’un philosophe (1830), que Cuvier appellera l’œuvre d’un Platon mourant.

R. T.

 J. C. Gregory, The Scientific Achievements of Sir Humphry Davy (Londres, 1930). / W. Prandtl, Davy und Berzelius (Stuttgart, 1948). / E. O. Carrier, Humphry Davy and Chemical Discovery (Londres, 1967).