Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

Alexandrie (suite)

Le Phare

Le Phare d’Alexandrie, qui a tiré son nom de son île et l’a transmis à tous les autres phares, était une des sept merveilles du monde antique. Il fut bâti vers 280 par Sostratos de Cnide, sur la commande de Ptolémée II. Les monnaies sur lesquelles il figure le montrent carré à sa base, puis octogonal, et enfin cylindrique dans sa partie supérieure. Il était orné au sommet d’une grande statue et de Tritons soufflant dans des trompettes. Les auteurs arabes lui ont attribué toutes sortes de mécanismes merveilleux, mais on sait, grâce à eux, qu’il contenait une rampe hélicoïdale desservant les innombrables locaux aménagés en son cœur. Il y avait aussi une machine élévatoire pour monter le combustible. En haut, on entretenait un grand feu. La hauteur totale devait être d’une centaine de mètres. Abandonné à l’époque arabe et condamné à la ruine, il fut remplacé au xve siècle par le fort Qā’itbey, construit avec ses matériaux.


Canope

Canope était une petite ville de la banlieue d’Alexandrie, à la fois centre religieux et lieu de plaisir. Son sanctuaire de Sérapis était très renommé : il s’y faisait des guérisons miraculeuses. On y venait en barque, sur un canal, les jours de fête ; les embarcations chargées de musiciens et de danseurs défilaient entre des rives où s’alignaient les guinguettes et les tonnelles. Selon Sénèque, c’était un repaire de vices. On y dégustait des poissons, des coquillages et des pâtisseries. La parfumerie et les chapeaux de Canope étaient renommés. Hadrien garda un si bon souvenir de ces lieux qu’il fit bâtir un ensemble dénommé Canope dans sa villa de Tibur. À l’époque chrétienne, le Serapeum de Canope fut dévasté et des moines s’établirent dans la région, surtout à Ménouthis, à l’ouest, où la tradition des guérisons miraculeuses se poursuivit grâce aux saints locaux, Cyr et Jean.

Alexis Ier Comnène

(Constantinople 1056 - id. 1118), empereur de Constantinople (1081-1118) et fondateur de la dynastie des Comnènes.


Devançant son concurrent au trône, Nicéphore Milissênos, qui occupait la côte asiatique, Alexis Comnène s’empara de Constantinople, à la faveur d’une trahison, le 1er avril 1081 : la soldatesque qui composait son armée mit la ville à sac, le vieil empereur Nicéphore Botaneiatês ayant préféré à la résistance le calme d’un cloître. L’usurpateur, qui avait à peine vingt-cinq ans, comptait déjà de brillants succès militaires ; il avait combattu les Turcs en Asie Mineure et vaincu des généraux byzantins révoltés.

Désireux de restaurer l’autorité de l’État et d’arrêter le démembrement de l’Empire, Alexis, à peine installé au pouvoir, se heurta à des difficultés considérables. Manquant d’argent et de troupes, il se trouva simultanément attaqué sur deux fronts, à l’est et à l’ouest. Après avoir conclu un traité de paix avec l’émir de Nicée, Sulaymān ibn Kutulmich (Süleyman), il se porta au-devant de Robert Guiscard, qui assiégeait Durazzo (Durrësi). Des succès militaires et la prise de cette ville (févr. 1082) ouvrirent au chef normand, secondé par son fils Bohémond, l’accès de l’Épire, de la Macédoine et de la Thessalie. Seule la mort inopinée de Robert Guiscard, le 17 juillet 1085, mit un terme à cette guerre si dommageable pour l’Empire. Pour se procurer des ressources indispensables à de continuelles levées, le basileus dut faire main basse sur des biens sacrés, s’attirant la colère d’une partie du haut clergé ; pour se faire des alliés, il distribua en Occident, sans le moindre résultat, des sommes considérables. Quant aux Vénitiens, ils lui firent payer au plus haut prix le concours de leur flotte et obtinrent un privilège incomparable : celui de commercer en franchise sur tout le territoire byzantin.

Le danger normand écarté, il fallut affronter le péril turc, la mort de Sulaymān (juin 1086) ayant été suivie de la révolte des petits émirs, qui violèrent le traité de 1081 et tentèrent d’agrandir leurs fiefs au détriment de l’Empire. Mais, presque au même moment, les provinces européennes étaient submergées par les Petchenègues et leurs alliés Coumans. Poussés à la guerre par les manichéens de Philippopoli (Plovdiv), ils avaient franchi le Danube et les passes des Balkans, et débouché en Thrace, où ils écrasèrent les forces du général Pakourianos (printemps 1086). Jamais découragés par les revers, ces Barbares nomades reprenaient leurs invasions à chaque printemps et s’en retournaient avant l’hiver avec leur cortège de prisonniers et leurs chariots de butin. La situation fut particulièrement critique en février-mars 1091 : Constantinople se trouva bloquée du côté de la mer par l’émir de Smyrne, Tzachas, et sur le continent par les Petchenègues, qui campaient à quelques milles des murailles. Mais Alexis parvint à redresser la situation : le 29 avril 1091, secondé par les Coumans, il infligea aux Petchenègues, au mont Lébounion, une déroute complète, qui s’acheva par un massacre effroyable.

De nouvelles menaces se firent bientôt jour : tandis que ses généraux réoccupaient les îles de la mer Égée, Chypre et la Crète, Alexis se portait sur la frontière occidentale, constamment violée par les chefs serbes Constantin Bodin et Bolkan (1092-1094), et, aussitôt après, contre les Coumans, qui, à l’instigation d’un imposteur qui se prétendait le fils de l’ancien basileus Romain Diogène, avaient, à leur tour, franchi le Danube et envahi la Thrace (1095).

Après ces quatorze ans de luttes incessantes, l’Empire connut à ses frontières une relative tranquillité. Mais ce répit ne fut pas de longue durée ; les Byzantins virent bientôt les croisés déferler sur leur pays : d’abord les bandes populaires et indisciplinées de Gautier Sans Avoir et de Pierre l’Ermite (juill.-août 1096), qui seront massacrées par les Turcs, puis, l’année suivante, les armées régulières des barons francs et normands. L’impression produite par les croisés sur les Grecs fut désastreuse ; d’ailleurs, tout contribuait à les dresser les uns contre les autres.