(Constantinople 1056 - id. 1118), empereur de Constantinople (1081-1118) et fondateur de la dynastie des Comnènes.
Devançant son concurrent au trône, Nicéphore Milissênos, qui occupait la côte asiatique, Alexis Comnène s’empara de Constantinople, à la faveur d’une trahison, le 1er avril 1081 : la soldatesque qui composait son armée mit la ville à sac, le vieil empereur Nicéphore Botaneiatês ayant préféré à la résistance le calme d’un cloître. L’usurpateur, qui avait à peine vingt-cinq ans, comptait déjà de brillants succès militaires ; il avait combattu les Turcs en Asie Mineure et vaincu des généraux byzantins révoltés.
Désireux de restaurer l’autorité de l’État et d’arrêter le démembrement de l’Empire, Alexis, à peine installé au pouvoir, se heurta à des difficultés considérables. Manquant d’argent et de troupes, il se trouva simultanément attaqué sur deux fronts, à l’est et à l’ouest. Après avoir conclu un traité de paix avec l’émir de Nicée, Sulaymān ibn Kutulmich (Süleyman), il se porta au-devant de Robert Guiscard, qui assiégeait Durazzo (Durrësi). Des succès militaires et la prise de cette ville (févr. 1082) ouvrirent au chef normand, secondé par son fils Bohémond, l’accès de l’Épire, de la Macédoine et de la Thessalie. Seule la mort inopinée de Robert Guiscard, le 17 juillet 1085, mit un terme à cette guerre si dommageable pour l’Empire. Pour se procurer des ressources indispensables à de continuelles levées, le basileus dut faire main basse sur des biens sacrés, s’attirant la colère d’une partie du haut clergé ; pour se faire des alliés, il distribua en Occident, sans le moindre résultat, des sommes considérables. Quant aux Vénitiens, ils lui firent payer au plus haut prix le concours de leur flotte et obtinrent un privilège incomparable : celui de commercer en franchise sur tout le territoire byzantin.
Le danger normand écarté, il fallut affronter le péril turc, la mort de Sulaymān (juin 1086) ayant été suivie de la révolte des petits émirs, qui violèrent le traité de 1081 et tentèrent d’agrandir leurs fiefs au détriment de l’Empire. Mais, presque au même moment, les provinces européennes étaient submergées par les Petchenègues et leurs alliés Coumans. Poussés à la guerre par les manichéens de Philippopoli (Plovdiv), ils avaient franchi le Danube et les passes des Balkans, et débouché en Thrace, où ils écrasèrent les forces du général Pakourianos (printemps 1086). Jamais découragés par les revers, ces Barbares nomades reprenaient leurs invasions à chaque printemps et s’en retournaient avant l’hiver avec leur cortège de prisonniers et leurs chariots de butin. La situation fut particulièrement critique en février-mars 1091 : Constantinople se trouva bloquée du côté de la mer par l’émir de Smyrne, Tzachas, et sur le continent par les Petchenègues, qui campaient à quelques milles des murailles. Mais Alexis parvint à redresser la situation : le 29 avril 1091, secondé par les Coumans, il infligea aux Petchenègues, au mont Lébounion, une déroute complète, qui s’acheva par un massacre effroyable.
De nouvelles menaces se firent bientôt jour : tandis que ses généraux réoccupaient les îles de la mer Égée, Chypre et la Crète, Alexis se portait sur la frontière occidentale, constamment violée par les chefs serbes Constantin Bodin et Bolkan (1092-1094), et, aussitôt après, contre les Coumans, qui, à l’instigation d’un imposteur qui se prétendait le fils de l’ancien basileus Romain Diogène, avaient, à leur tour, franchi le Danube et envahi la Thrace (1095).
Après ces quatorze ans de luttes incessantes, l’Empire connut à ses frontières une relative tranquillité. Mais ce répit ne fut pas de longue durée ; les Byzantins virent bientôt les croisés déferler sur leur pays : d’abord les bandes populaires et indisciplinées de Gautier Sans Avoir et de Pierre l’Ermite (juill.-août 1096), qui seront massacrées par les Turcs, puis, l’année suivante, les armées régulières des barons francs et normands. L’impression produite par les croisés sur les Grecs fut désastreuse ; d’ailleurs, tout contribuait à les dresser les uns contre les autres.