Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Danemark (suite)

Christian II (1513-1523) mène la lutte sur trois fronts : contre la Hanse, contre l’aristocratie danoise et contre la Suède, où il veut ressaisir une pleine autorité. Ses projets sont trop ambitieux ; en 1520, vainqueur en Suède, il provoque une révolte généralisée par l’exécution massive des adversaires de l’Union (« le bain de sang de Stockholm »). Événement capital qui explique trois siècles difficiles et l’indépendance de la Suède, devenue l’ennemie irréductible du Danemark.

En effet, soutenu par Lübeck, Gustave Vasa (1523-1560) se fait proclamer roi en Suède. La noblesse danoise elle-même se révolte contre son roi, qu’elle dépose (1523).

Frédéric Ier (1523-1533) ne règne plus sur la Suède, mais le Danemark conserve la Norvège et ses dépendances (Islande, Groenland, îles Féroé). Ce qui caractérise cette époque, c’est la toute-puissance économique de la Hanse, l’hégémonie culturelle allemande, que la Réforme ne fera que développer, la prépondérance politique de la noblesse et le conflit permanent entre la Suède et le Danemark, alors que la Norvège passe au second plan. Si le commerce est dominé par les Allemands, les villes des détroits — Copenhague, Elseneur, Malmö, Hälsingborg — profitent des échanges entre Baltique et mer du Nord. La côte méridionale de la Scanie voit se développer la grande pêche du hareng.


L’époque de la Réforme (xvie s.)

Le Danemark, avec ses possessions extérieures, est au début du xvie s. un pays puissant : une bourgeoisie commerçante prospère peuple ses ports (Copenhague, Bergen, Århus, Altona, Flensborg) ; une noblesse terrienne riche et influente fait peser un joug très dur sur une paysannerie proche du servage.

Après l’échec de la tentative absolutiste de Christian II, la Couronne doit compter avec le Rigsråd, conseil où siègent quelques grands, laïques ou ecclésiastiques.

La Réforme luthérienne, qui s’impose au Danemark dès 1530, triomphe sous le fils de Frédéric Ier, Christian III (1534-1559) ; ce dernier, après avoir battu Lübeck et le roi détrôné Christian II, sécularise les biens du clergé en 1536. Cette année-là, le luthéranisme devient religion d’État. L’année suivante, l’opposition catholique en Norvège s’effondre.

Christian III établit une monarchie puissante, riche des douanes levées dans l’Øresund sur tous les navires, principalement sur ceux des Hanséates et des Hollandais. La noblesse, qui tient toute l’administration, est docile, mais la paysannerie voit son sort empirer et ses terres passer peu à peu entre les mains du roi ou de l’aristocratie. Le pays se couvre de châteaux.

Sous Frédéric II (1559-1588), la lutte reprend avec la Suède d’Erik XIV (guerre de Sept Ans, 1563-1570) : l’enjeu en est la possession des détroits, et la paix de Stettin consacre la position du Danemark comme gardien de la Baltique. C’est la fin de la domination hanséatique ; la marine danoise devient puissante. Le pays joue aussi un rôle important dans l’humanisme européen grâce à ses savants, dont l’astronome Tycho Brahe* est le plus célèbre.


La lutte avec la Suède pour l’hégémonie en Scandinavie (xviie s.)

Sous Christian IV (1588-1648), le Danemark participe à la guerre de Trente Ans, de 1625 à 1629 : c’est un échec. Cependant, le commerce maritime est passé des mains des Hanséates en celles des Hollandais, qui sont alors les grands courtiers entre l’Europe de l’Ouest et les pays riverains de la Baltique. Pour les contrer, Christian IV élève les tarifs de l’Øresund ; aussi les Provinces-Unies s’allient-elles avec la Suède contre le Danemark, qui, battu par Lennart Torstensson (1603-1651), signe la paix de Brömsebro (1645) ; il perd les îles d’Ösel (Saaremaa) et de Gotland, la province de Halland et les territoires norvégiens de Jämtland et de Härjedalen. La paix de Brömsebro consacre la prééminence suédoise.

Ces échecs successifs affaiblissent la Couronne. Aussi le nouveau roi Frédéric III (1648-1670) est-il obligé d’accepter de l’aristocratie une charte qui lui défend de prendre aucune décision importante sans l’approbation du Rigsråd.

En 1657, le roi, qui veut effacer la paix de Brömsebro, déclare la guerre à la Suède. Le roi de Suède Charles X Gustave fait audacieusement passer ses troupes sur la Baltique gelée et vient assiéger Copenhague. La paix de Roskilde (1658) consacre définitivement la prépondérance de la Suède en Scandinavie et sur la Baltique. Le Danemark, qui perd notamment la riche Scanie, cesse d’être une grande puissance.

Mais, par contrecoup, ces épreuves extérieures modifient à l’intérieur le rapport des forces politiques. La noblesse, atteinte par la perte de la Scanie, est en butte aux attaques du clergé et de la bourgeoisie. Aux états de 1660, ces deux derniers ordres forcent les nobles à capituler. L’hérédité de la Couronne est proclamée, et le roi est rétabli dans son pouvoir absolu. En 1665, la loi royale, promulguée par Frédéric III, consacre cet état de fait. Cependant, les villes gardent leurs franchises.

Christian V (1670-1699) et son ministre Griffenfeld, grands admirateurs de Louis XIV, uniformisent le droit (loi danoise de 1683) et s’efforcent de créer une noblesse de fonctionnaires pour l’opposer à l’ancienne. Des donations de terres fournissent à l’aristocratie nouvelle une forte assise économique.

De 1675 à 1679, Danemark et Suède se livrent de nouveau une guerre dont la Scanie est l’enjeu. À la paix de 1679, Louis XIV oblige les deux États à se restituer leurs conquêtes.

Sous Frédéric IV (1699-1730), le Danemark croit le moment venu de se venger de la Suède. Au cours de la grande Guerre du Nord, dominée par le génie stratégique de Charles* XII, succès et revers alternent. La paix de Frederiksborg (1720) donne finalement le Slesvig au Danemark. Par ailleurs, le Danemark tirera largement profit du renouvellement en 1756 de la ligue de neutralité scandinave.


Ombres et lumières du xviiie siècle