Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

cycle de reproduction (suite)

Alternance de phases chromosomiques et alternance d’individus dans un même cycle

Le cas de l’Homme, que nous avons choisi pour aborder le problème, nous a permis de mettre en évidence deux coupures importantes dans le cycle reproductif de l’espèce : la réduction chromatique et la fécondation.

Ces deux coupures sont très générales dans le monde vivant, aussi bien végétal qu’animal, chez les Protozoaires et même chez les Bactéries. Elles séparent des phases très distinctes du cycle reproductif d’un être vivant. Le cas de la Fougère « mâle », par exemple, le montre bien (fig. 2).


Cycle reproductif de la Fougère « mâle »

Cette Fougère, très improprement nommée, car elle est bisexuée comme les autres Fougères, pousse dans les bois sur sol siliceux (fig. 2). À la face inférieure de la fronde, cachés par des indusies, se trouvent les sporanges générateurs de spores. Alors que les cellules des pieds de Fougère « mâle » possèdent un nombre diploïde de chromosomes, les spores, cellules munies d’une double enveloppe protectrice, n’en contiennent qu’un nombre haploïde. C’est qu’à l’intérieur du sporange s’est produite la réduction chromatique, qui, par le jeu de la méiose* et de ses deux mitoses successives, a fait passer d’une cellule, dite « cellule mère », des spores de 2n chromosomes à quatre cellules à n chromosomes, qui sont devenues les spores.

Ces spores peuvent germer sur le sol. Elles donnent alors naissance à un prothalle. Cette petite lame verte ne possède que des cellules haploïdes. Celles-ci constituent donc un individu différent de l’individu « pied de Fougère », par sa morphologie, son anatomie, sa constitution chromosomique. De surcroît, elle s’en distingue du fait qu’on voit apparaître, à sa face inférieure, des archégones et des anthéridies, c’est-à-dire des organes sexuels, et non des sporanges. Ainsi, c’est au niveau du prothalle qu’on voit apparaître les gamètes mâles (anthérozoïdes) et les gamètes femelles (oosphères). La fécondation, qui se produit dans l’archégone, est à l’origine de la formation d’un nouveau pied de Fougère diploïde à partir d’un œuf, puis d’une plantule, qui se développe sur le prothalle et à ses dépens, tandis que celui-ci dégénère et disparaît.

On le voit, dans le cas du cycle de reproduction de la Fougère, la phase haploïde, ou haplophase, et la phase diploïde, ou diplophase, sont représentées par des individus distincts. L’un, le pied de Fougère, issu de la fécondation et conduisant aux spores, sera dit « sporophyte » ; l’autre, le prothalle, issu de la réduction chromatique et conduisant aux gamètes, « gamétophyte ».

À l’alternance cytologique de phases (haplophase, diplophase) que nous avions étudiée dans le cas de l’Homme, il convient donc d’ajouter ici une alternance d’individus (gamétophyte, sporophyte).


Les types de cycles reproductifs et les problèmes qu’ils posent

Il existe trois types de cycles cytologiques : les cycles haplophasique, haplodiplophasique et diplophasique.


Cycle diplophasique

Nous avons déjà décrit deux types de cycles cytologiques. Celui de l’Homme, à diplophase nettement dominante, sera dit diplophasique. Se rattachent à ce cas certains végétaux comme l’Algue Fucus, et, chez les animaux, les Infusoires et tous les Métazoaires.


Cycle haplodiplophasique

Le cycle de la Fougère, au cours duquel alternent haplophase et diplophase, sera dit « haplodiplophasique ». Les exemples ne manquent pas : Ulva lactuca, Laminaria, Dictyota dichotoma parmi les Algues ; Pyronema confluens, Puccinia graminis, Coprin et autres Basidiomycètes parmi les Champignons ; les Mousses, les Hépatiques, les Prêles, les Lycopodes et les Sélaginelles.

Dans le cas des végétaux supérieurs que sont les Phanérogames, l’haplophase n’est plus individualisée ; elle n’en existe pas moins. C’est, en particulier, très net dans le cas des Gymnospermes tels que le Pin (fig. 3). Les sacs polliniques constituent les sporanges où se produit la réduction chromatique, donnant ainsi les spores qui, en germant, formeront les grains de pollen, ou prothalles mâles haploïdes, qui ne portent plus d’anthéridies typiques mais qui donnent naissance à des anthérozoïdes très particuliers (adaptation à la vie terrestre). Cette adaptation ne s’observe pas chez tous les Gymnospermes : chez le Ginkgo, par exemple, il existe des anthérozoïdes typiques, nageurs et ciliés. Quant aux ovules, ils contiennent un tissu, le nucelle, dont une cellule subissant la réduction chromatique donnera une spore, et celle-ci, en se divisant, formera un prothalle femelle, ou endosperme, au sein duquel on verra se développer des archégones et des oosphères typiques. La fécondation des oosphères ayant eu lieu, l’œuf donnera l’embryon, qui, comme chez la Fougère, se développe pendant un certain temps à l’intérieur même du prothalle femelle, ou endosperme, lui-même porté par le sporophyte et non pas indépendant comme chez la Fougère. Bien entendu, dans ce cas, l’embryon au sein de l’endosperme voit son développement interrompu au moment de la formation de la graine.

Chez les Angiospermes (fig. 4), la simplification du prothalle mâle devient extrême, et l’endosperme du Pin est remplacé par le sac embryonnaire, prothalle encore plus réduit. Notons, en outre, l’existence d’une double fécondation. Nous venons de dire que le sac embryonnaire provient de la division d’une macrospore, cellule issue de la réduction chromatique ; normalement, donc, toutes ses cellules devraient être haploïdes. Cependant, sur les huit noyaux issus des trois divisions successives de la macrospore, deux sont fusionnés (ainsi s’explique que le sac embryonnaire ne contienne que sept cellules : l’oosphère, deux synergides, trois antipodes haploïdes et la cellule secondaire diploïde). En soi, cette fusion pose déjà un problème. Pourquoi a-t-elle lieu ? À quoi correspond-elle ? De surcroît, elle est suivie d’une fécondation, car ce sont deux gamètes mâles qui sont apportés par le grain de pollen germé, l’un servant à féconder l’oosphère, l’autre, la cellule secondaire, qui devient ainsi un œuf à 3n chromosomes. Cet œuf, en se divisant, donnera l’albumen*, qui aidera au développement de l’embryon issu de l’oosphère fécondé, pendant tout ou partie de l’existence de la graine. Ainsi, en son début, le tronçon sporophytique du cycle est représenté par deux individus, l’un diploïde, l’autre triploïde.