Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

cuisine (suite)

« Le luxe de la table implique une société policée »
(Pierre Larousse)

Reflet de la production et des progrès techniques, la cuisine représente, en soi, un phénomène social. Élaborée au sein de sociétés hiérarchisées, elle s’est trouvée elle-même hiérarchisée, car, dès l’Antiquité, pour des raisons financières évidentes, elle ne se développera sous sa forme savante que dans les classes riches. Les cuisiniers y feront figure de vedettes : à Rome, certains gagneront davantage qu’un précepteur ; sous l’Ancien Régime, en France, les grands se devaient d’avoir un chef en renom à la tête de leurs fourneaux, et certains, comme Carême, firent connaître la cuisine française dans les cours étrangères. Nombre de ces chefs rédigeront des ouvrages culinaires. Certains mets seront réservés aux riches soit par le fait même de leur rareté (épices, sucre, légumes et fruits importés), soit parce que s’y attachait un certain symbolisme social : le paon et le faisan, considérés comme des volailles nobles au Moyen Âge, figuraient à ce titre sur la table du seigneur. Les produits de la chasse, sport aristocratique, composaient l’essentiel des menus seigneuriaux, alors que les produits de l’agriculture, occupation des serfs et des paysans, furent l’objet d’un certain discrédit. Satisfaction de la gourmandise, la cuisine prit vite rang de symbole social. Seigneurs, princes ou monarques — imités plus tard par la bourgeoisie — chercheront à éblouir par le luxe de leur table : somptuosité des mets, luxe des accessoires, déroulement du service. Le symbolisme religieux a, lui aussi, servi à codifier certains types de cuisine, comme la cuisine juive, fondée sur l’opposition d’aliments purs (kacher) et impurs ; enfin, les fêtes elles-mêmes ou certaines circonstances précises ont inspiré ce qu’il est convenu d’appeler la cuisine calendaire (gâteau des rois, crêpes, omelette pascale, etc.). Notre société industrialisée n’a pas engendré qu’un type de cuisine uniformisé : aujourd’hui, comme jadis, il existe une cuisine de classes ; la grande cuisine, fief de quelques privilégiés, ou la cuisine bourgeoise jouent toujours un rôle de catalyseur social. Ces divers types de cuisine n’échappent pas à l’influence de phénomènes de mode qui se transmettent, avec des modifications, des classes les plus privilégiées à celles qui le sont moins : la cuisson au barbecue, la confection de plats exotiques ont tendance à se généraliser, et cela d’autant plus que des produits autrefois de luxe commencent à se trouver dans les magasins à prix unique.

La cuisine, devenue art gastronomique, n’est plus le simple assouvissement d’un besoin : l’esprit participe à l’appréciation de la sensation, et, à ce titre, on peut dire que « seul l’homme d’esprit sait manger » (Brillat-Savarin).

S. L.

 E. de Pomiane, le Code de la bonne chère (A. Michel, 1948). / Curnonsky, Cuisine et vins de France (Larousse, 1953). / C. Guy, Une histoire de la cuisine française (Productions de Paris, 1962). / E. Loewer, Cuisine, connaissances générales (Dunod, 1962 ; 3e éd., 1967). / R. J. Courtine, la Cuisine (Gérard, Verviers, 1963 ; 2 vol. ; nouv. éd., Centre nat. du livre familial, 1969) ; la Gastronomie (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1970). / F. Lery, Technique de la cuisine (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1963 ; 2e éd., 1972). / M. H. Berthoin, Cuisine moderne et gastronomie (Larousse, 1967). / P. Montagné et R. J. Courtine, Nouveau Larousse gastronomique (Larousse, 1967). / H. Lasnet de Lanty, Dictionnaire de la cuisine française (Larousse, 1970).


Quelques noms et ouvrages célèbres


Guillaume Tirel, dit Taillevant ou Taillevent,

cuisinier des rois de France, notamment de Philippe VI en 1346 († v. 1395). Il est l’auteur du Viandier (qui traite de l’art d’accommoder les viandes), contemporain d’un autre ouvrage d’économie domestique, d’auteur anonyme, le Menagier de Paris (1393).


Anthelme Brillat-Savarin,

magistrat et écrivain français (Belley 1755 - Paris 1826), auteur de la Physiologie du goût (1826), mélange d’anecdotes et de recettes gastronomiques ; il y expose la théorie du goût, montre le rôle social de la table et inaugure la littérature gastronomique.


Marie Antoine Carême,

cuisinier français (Paris 1784 - id. 1833). Il fut chef de bouche du prince de Talleyrand et, ensuite, des empereurs de Russie et d’Autriche. Véritable artiste dans l’art de la pièce montée, il est considéré comme le fondateur de la « grande cuisine » française moderne. Ses principaux ouvrages sont le Pâtissier pittoresque (1815), le Maître d’hôtel français ou Parallèle de la cuisine ancienne et moderne (1822), le Cuisinier parisien ou l’Art de la cuisine au xixe s. (1833).


Laguipière,

cuisinier français († Vilnious 1812). Professeur de Carême, il fut cuisinier de Napoléon Ier, puis de Murat, qu’il accompagna en Russie, où il mourut de froid pendant la retraite.


Alexandre Balthasar Laurent Grimod de La Reynière,

gastronome français (Paris 1758 - Villiers-sur-Orge, Essonne, 1838). De 1803 à 1812, il publia l’Almanach des gourmands ou Calendrier nutritif, qui connut un vif succès (le plus ancien almanach remonte à 1530).


Auteurs culinaires contemporains.

Il nous faut citer entre autres : Auguste Escoffier (1847-1935), cuisinier du Savoy Hotel, puis du Carlton, à Londres, et dont la maison natale à Villeneuve-Loubet est devenue un musée d’art culinaire ; Prosper Montagné (1864-1948) ; Maurice Edmond Sailland, dit Curnonsky (1872-1956), sacré « prince des gastronomes » ; Edouard Pozerski de Pomiane (1875-1964), qui a étudié l’influence des préparations culinaires sur la digestibilité des aliments ; Raymond Oliver (né en 1909), cuisinier restaurateur ; Robert Courtine (né en 1910), auteur de divers ouvrages et de rubriques culinaires dans la presse.

cuisse

Partie du membre inférieur comprise entre la hanche et le genou.



Anatomie

Le squelette de la cuisse est constitué par un seul os long, le fémur, s’articulant en haut avec l’os iliaque et en bas avec le tibia.

Le fémur présente un corps et deux extrémités.