Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

cuisine (suite)

L’influence de l’Italie, prédominante à la Renaissance, touchera également la cuisine française, et cela d’autant plus que Catherine de Médicis emmènera nombre de cuisiniers italiens dans sa suite. La reine contribue au développement des sucreries : c’est à son intention qu’aurait été créée la frangipane. L’association aigre-doux va disparaître de la cuisine française, mais elle subsistera jusqu’à nos jours en Europe du Nord. On découvre les béatilles (cervelle, foie, crêtes de coq) apprêtées en ragoûts ; on abandonne, du moins chez les riches, les fèves et les pois chiches du Moyen Âge au profit des légumes italiens ; enfin, on délaisse les grosses pièces de venaison pour le veau et les volailles, que l’on sert farcies et enrobées d’une croûte faite de pain aromatisé. Le goût des épices et des condiments, notamment de l’ail, demeurera jusqu’à la mort d’Henri IV.

Malgré l’opulence des menus à Versailles, la cuisine, au xviie s., annonce la cuisine moderne. Le tournant s’opère avec le Cuisinier français (1651) de Pierre François, sieur de La Varenne (1618-1678), qui témoigne d’un désir de simplification : les légumes font l’objet de préparations spéciales (carottes à la crème, laitues farcies), et l’on y trouve des recettes modernes ; daube, civet, etc. Nicolas de Bonnefons, lui aussi, dans Délices de la campagne, où est enseigné à préparer pour l’usage de la vie tout ce qui croît sur la terre et dans les eaux (1654), s’insurge contre « l’entassement confus de diverses espèces »... Les rôtis sont, enfin, servis séparément et, fait très nouveau, avec un assortiment de salades.

La simplification prônée par La Varenne se développe au xviiie s., et l’art culinaire cesse d’être cet amalgame incohérent de saveurs disparates pour devenir l’art de « quintessencier [...] de façon que rien ne domine et que tout se fasse sentir ». La grande innovation culinaire est l’apparition des fonds, élément de base de toutes les grandes sauces modernes, et une théorie des sauces s’élabore ; l’intérêt porté à la cuisine est tel que les grands vont jusqu’à mettre la main à la pâte et qu’on assiste à une floraison de recettes nouvelles : bouchées à la reine, bœuf à la Villeroi, sauce Béchameil ou Béchamel, etc.

L’industrialisation, amorcée au xixe s., ne fera qu’accentuer le caractère de plus en plus rationnel de la cuisine. Pierre Larousse s’inquiète de l’immixtion de l’industrie dans ce domaine : « Hélas un danger, un grave danger est né de ce progrès : la médecine, la chimie elle-même ont tenté d’enrichir la cuisine et de la transformer en laboratoire. » La rationalisation va de pair avec la vulgarisation. Le xixe s. voit l’épanouissement de la cuisine bourgeoise : recettes simplifiées, moins coûteuses et plus rapides ; menu allégé, tendant au plat unique.

Les xviiie et xixe s. verront l’épanouissement de restaurants célèbres : les Frères Provençaux, Véry, le café Riche, le café Hardy, etc.

Aujourd’hui, les méthodes culinaires sont le produit à la fois de la tradition et de l’industrialisation. Une haute technicité continue à présider à l’élaboration de la « grande cuisine », alors que les traditions régionalistes et familiales ont façonné la cuisine bourgeoise. La cuisine rapide, typique de notre époque et dont les matières premières sont déjà prétraitées, est rejetée par la plupart des gastronomes en raison de son caractère artificiel. Peut-être se développe-t-il, par opposition, un retour à la cuisine campagnarde au feu de bois et un, goût pour l’insolite des recettes exotiques.

Quelques termes de base

abaisse, pâte amincie au rouleau.

appareil, toute préparation, simple ou composée, entrant dans la préparation d’un mets.

barder, recouvrir d’une mince tranche de lard, ou barde, une pièce de viande, de volaille ou un gibier.

beurre clarifié, beurre fondu et décanté.

bouquet garni, herbes ou plantes aromatiques liées ensemble et destinées à parfumer les aliments en train de cuire.

brider, ficeler à l’aide d’une aiguille à brider les membres d’une volaille ou d’un gibier pour éviter sa déformation durant la cuisson. On dit aussi trousser.

chiffonnade, toute plante herbacée détaillée en fines lanières, et, par extension, toute chair détaillée finement.

coulis, jus d’une substance que l’on a fait cuire lentement.

court-bouillon, liquide aromatisé dans lequel on fait cuire des poissons et certains légumes.

déglacer, dissoudre avec un liquide quelconque (fond, vin) le jus caramélisé qui s’est formé en cours de cuisson d’une viande.

étouffée (à l’), cuisson très lente en vase clos.

flamber, passer à la flamme une volaille pour la débarrasser de ses duvets ; arroser d’alcool enflammé un plat sur le point d’être servi.

foncer, tapisser un moule de pâte ou le fond d’un récipient de couenne de lard et de légumes détaillés.

glacer, enrober un aliment d’un jus de viande ou d’une gelée, ou un gâteau d’un sirop.

jardinière, garniture composée de divers légumes.

julienne, légumes émincés destinés à un potage de même nom.

larder, enfoncer des lardons à l’aide d’une aiguille dans une pièce de viande. On dit aussi piquer.

macérer, faire tremper, plus ou moins longtemps, dans un mélange aromatique des substances diverses.

mirepoix, préparation à base de légumes et de lard que l’on ajoute aux préparations de poissons et de crustacés pour en augmenter la saveur.

mouiller, ajouter un liquide à une préparation en cours de cuisson.

paner, enrober de chapelure un aliment trempé dans de la farine ou de l’œuf avant de le frire.

parer, enlever la graisse et les tendons d’une viande.

réduire, faire épaissir sur le feu un liquide par évaporation pour en condenser la saveur.

revenir (faire), faire colorer des articles divers en les passant rapidement dans une matière grasse.

saisir, commencer la cuisson d’un aliment à feu vif.

travailler, remuer une préparation culinaire (sauce, farce, pâte) pour en assurer l’homogénéité.