Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

cristallographie (suite)

Macles par mériédrie

(A. Bravais.) Le motif cristallin, moins symétrique que le réseau, peut avoir dans la maille deux orientations dans le cas d’une hémiédrie et quatre dans celui d’une tétartoédrie. Les individus cristallins de la macle peuvent prendre ces orientations par une rotation autour d’un axe ou par symétrie par rapport à un plan ou à un point, qui sont des éléments de symétrie du réseau que ne possède pas le cristal homogène ; ce sont les éléments de symétrie de la macle. La surface d’accolement ou de composition des individus macles peut être quelconque ou plane. Si le cristal est limité par une forme mérièdre, la macle se manifeste par des angles rentrants. Ex. macle de la croix de fer de la pyrite FeS2, constituée par deux cristaux ; l’axe de la macle est un axe A4 du réseau ; les atomes Fe forment un même réseau cubique F (fig. 35).

Le quartz SiO2, de symétrie A33A2, de réseau hexagonal, donc tétartoédrique, est le plus souvent maclé, avec l’association de quatre individus cristallins ; les macles le rendent impropre aux usages piézo-électriques ou optiques.


Macles par mériédrie réticulaire

(Georges Friedel [1865-1933].) Un multiple simple du réseau possède un élément de symétrie que ne possède pas le réseau et qui devient élément de macle. C’est le cas des cristaux à axe ternaire, qui devient axe sénaire de macle. Ex. fluorine CaF2 (fig. 36).


Macles par pseudo-symétrie

(Ernest Mallard [1833-1894].) Quand le réseau (ou un multiple simple de ce réseau) possède soit un plan réticulaire, soit une rangée cristalline, qui sont des éléments de symétrie approchée, ce plan ou cette rangée peuvent être plan ou axe de macle. L’obliquité de la macle est l’angle de la normale au plan réticulaire avec la rangée qui est lui presque perpendiculaire. Cet angle est le plus souvent inférieur à 4°. Si le plan réticulaire est plan de macle, il constitue en même temps la surface de composition ; si la rangée est axe de macle (d’ordre 2, 3, 4 ou 6), la surface de composition passe par cet axe. Les macles par pseudo-symétrie sont fréquentes.


Épitaxie

C’est le phénomène d’orientation mutuelle de cristaux d’espèces chimiques différentes, que l’on observe au cours de la croissance d’un cristal sur une face d’un cristal servant de support. Un réseau plan, simple ou multiple de la face d’accolement, est commun aux deux cristaux. Ce phénomène s’observe sur des minéraux. Le rutile TiO2, quadratique, s’oriente par une face (100) sur la face normale à l’axe ternaire de l’oligiste. La croissance épitaxique est utilisée industriellement, par exemple pour l’obtention de couches minces monocristallines de semi-conducteurs.

J. W.

 H. Metzger, la Genèse de la science des cristaux (Alcan, 1918 ; rééd. Blanchard, 1970). / R. Gay, Cours de cristallographie (Gauthier-Villars, 1959-1961 ; 3 vol.). / R. W. G. Wyckoff (sous la dir. de), Crystal Structures (Londres, 1963-1970 ; 6 vol.). / R. Hocart, les Cristaux (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1968). / C. Delépine, Introduction à la cristallographie (Dunod, 1971).

critique


La critique littéraire

La critique littéraire est essentiellement « littéraire ». Elle l’est au sens plein du terme : elle est littéraire parce que son objet est l’étude de la littérature ; elle est littéraire, parce que ses propres discours font eux-mêmes partie de la littérature. Ambiguïté fondamentale : le sujet et l’objet sont confondus ; la littérature se regarde elle-même dans sa critique, sans parvenir pour cela à se mieux découvrir. Pourtant, le critique ne doute guère de son pouvoir. Il croit à l’objectivité du regard qu’il pose sur les œuvres : à distance, il les juge et décèle leurs défauts ; ou bien il reconnaît en elles de belles formes qu’il analyse, désigne et regroupe par espèces et par genres ; ou bien encore il les parcourt et les traverse comme des signes d’une présence à retrouver, présence d’un autre, qui est l’auteur avec ses mystères et ses secrets, qui peut être aussi toute une société dans un moment de son devenir. Telles sont les démarches possibles de toute critique : apprécier l’œuvre en la comparant à un modèle idéal, observer ses formes ou dévoiler son contenu. Selon les siècles, l’une ou l’autre de ces attitudes devient prédominante, et le critique se conduit tour à tour en juge, en professeur d’esthétique, en nomenclateur, en psychologue, en historien... Ainsi, non seulement la critique risque d’être inopérante, parce qu’elle est elle-même littérature, mais encore elle s’éparpille en de multiples techniques : contrairement à ce que croyait pouvoir affirmer Albert Thibaudet (1874-1936), il n’y a pas « la critique », il n’y a toujours que « des critiques ».

Pendant les siècles où se sont imposés les canons de l’esthétique classique, les critiques ont inlassablement répété que l’œuvre appartient au public : le public peut en juger à sa guise, quelles que soient les récriminations des auteurs contre l’incompréhension et la sottise. Qu’il s’appelle Horace ou Boileau, le critique exerce les droits de ce public-là et rend ses arrêts au nom du bon sens et du bon goût. Sa tâche consiste à décider si l’œuvre examinée mérite de prendre place au rang des belles œuvres qui sont proposées à l’admiration du lecteur et offertes à son plaisir. Elle consiste aussi à classer l’œuvre auprès de ses pareilles en reconnaissant qu’elle répond bien aux lois de tel ou tel genre consacré et n’est point indigne des modèles du genre. Une telle critique est surtout soucieuse de saluer les chefs-d’œuvre autour desquels s’organisent des écoles ou des chapelles littéraires. Elle ne se pique d’aucune prétention scientifique. Aisément portée à la polémique et à la satire, elle apparaît souvent comme une critique d’humeur et, en ce sens, elle a fort bien survécu à la mise en question de l’esthétique classique elle-même. Quand il n’y a plus de code universel à faire respecter, le critique peut s’arroger le droit de légiférer selon son propre code. Sans doute n’est-il plus alors l’interprète d’un public d’« honnêtes gens » habitué à recevoir comme belles les œuvres conformes à certains usages. Mais il s’efforce de faire partager à son public le plaisir qu’a pu lui procurer telle ou telle lecture. Ne disons pas trop vite qu’une telle critique a fait long feu. Beaucoup d’auteurs s’intitulent critiques (et sont tenus pour tels), qui s’interdisent la démarche principale de la critique traditionnelle : le jugement de valeur. Mais il en est encore qui, sans tenir constamment ni bruyamment l’estrade, continuent de veiller, selon leur humeur, leur goût, leur morale, leur religion ou leur politique, à ce qu’ils considèrent comme la bonne hygiène des lettres. Apparaissent, à des titres divers, comme les mainteneurs de cette tradition critique Roger Nimier dans ses Journées de lecture (publié en 1965), Paul Morand dans Mon plaisir... en littérature (1967), Claude Roy, Étiemble et les chroniqueurs des quelques grands journaux qui font encore une place à la vie littéraire (Pierre-Henri Simon, André Wurmser, etc.).