Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

crédit-bail (suite)

Le développement des activités des sociétés de crédit-bail en France est important ; la progression de leur chiffre d’affaires a été de 40 p. 100 entre 1965 et 1967, et de 61 p. 100 entre 1967 et 1968. Mais le crédit-bail reste un mode de financement d’appoint qui ne s’appliquait qu’à 1,5 p. 100 des investissements productifs français en 1968 ; à la même date, les opérations de crédit-bail mobilier fournissaient 96 p. 100 du chiffre d’affaires des sociétés spécialisées.

A. B.

 Chambre nationale des conseillers financiers, le Leasing. Nouvelles formules d’équipement (Éd. économiques et financières, 1965). / J. Coillot, Initiation au leasing, ou crédit-bail (Delmas, 1968). / S. Rolin, le Leasing, nouvelle technique de financement (Gérard, Verviers, 1970). / G. Pace, Pratique et technique financière du crédit-bail (Delmas, 1974).

Cressent (Charles)

Ébéniste français (Amiens 1685 - Paris 1768).


Le Louvre, le musée des Arts décoratifs, la Bibliothèque nationale, la Wallace Collection de Londres exposent des meubles d’une ébénisterie parfaite, rehaussée de bronzes ciselés et dorés de toute beauté, qui sont dus à Charles Cressent, ébéniste de Philippe d’Orléans, régent de France. Fils et petit-fils de menuisiers-sculpteurs picards, Cressent vint s’établir à Paris et se fit admettre en 1714 à l’académie de Saint-Luc. En 1719, il épousait la veuve de Joseph Poitou, ébéniste du Régent, qui lui apportait en dot, avec une entreprise prospère, le titre envié qu’avait porté son premier mari.

La société française était lasse de l’académisme imposé, jusque dans l’ameublement, par le cérémonial. Boulle* avait, avec Le Brun, donné son style à l’époque de Louis XIV. Cressent donna le sien au xviiie s., avec un rayonnement dans le public que le grand Antoine Gaudreaux (1680-1751), ébéniste de la Couronne, semble n’avoir pas ambitionné.

La marqueterie d’écaille et de cuivre se démodait, et avec elle les formes octoédriques des grands meubles. Cressent adopta les galbes curvilignes et les placages de « bois des îles », conservant l’emploi des bronzes ciselés dorés « à l’or moulu ». Comme Boulle, qui avait fait exécuter ses bronzes dans son atelier, encore qu’il ne possédât point la maîtrise de fondeur-ciseleur, Cressent, pratiquant son premier métier de sculpteur, modela ses bronzes et les fit fondre par un assistant : ces contraventions aux statuts corporatifs attirèrent sur lui les rigueurs correctionnelles, mais le maître ne paraît pas s’en être amendé. Il produisit même des flambeaux, des cartels — témoin le célèbre Amour vainqueur du temps de la Wallace Collection —, des médaillons et aussi le buste de Louis d’Orléans, fils du Régent, surmontant un médaillier d’un goût parfait (cabinet des Médailles, Bibl. nat.).

Les souverains étrangers, les amateurs fastueux s’adressaient à Cressent. C’est pour l’un de ceux-ci qu’il exécuta vers 1738, sur un projet des frères Slodtz*, la commode passée dans la Wallace Collection, dont les deux tiroirs ont pour poignées des queues de dragons chinois, mis en vogue depuis peu d’années ; au milieu de la façade sourit un mascaron féminin sortant d’une collerette godronnée empruntée à la commedia dell’arte. Cette commode est l’archétype du meuble dit « Régence », encore que ses premiers spécimens soient apparus vers 1728, cinq ans après la mort du prince. On ne connaît d’ailleurs, de Cressent, aucun meuble qu’on puisse tenir avec certitude pour avoir été fait pour Philippe d’Orléans. On incline à considérer comme une de ses premières œuvres la grande armoire plaquée de bois violet appartenant au musée des Arts décoratifs. Mais elle ne paraît pas antérieure à 1725. À cette époque, le maître était encore sous l’influence du style Louis XIV. Sa commode du musée de Meaux est encore loin de la maîtrise qu’il manifestera ensuite, et jusqu’à la fin de sa longue vie, avec une fertilité d’invention et une sûreté de goût, dans le maniement du style rocaille*, égales à son sens de la forme pleine et riche.

Le meuble est sous le Roi-Soleil un élément de pur décorum. Le xviiie s. en fait le témoin et l’instrument usuel de la vie de compagnie. Il invente des modèles dont le Grand Siècle n’eut jamais l’idée : les tables de toilette et de chevet, les secrétaires et les chiffonnières. Cressent se plaît à créer des types originaux par leur apparence et leur aménagement. Ainsi, le Louvre, qui possède sa splendide table à écrire, a reçu en legs un exemple caractéristique de cette évolution du meuble, la petite commode à la façade barrée d’un motif de bronze doré représentant une sorte d’escarpolette maintenue par deux enfants qui balancent un singe. Cette commode est d’une structure alors exceptionnelle : ses flancs comportent deux étroits corps d’armoire. C’est là le premier meuble combiné du xviiie s.

Ces novations, Cressent les multipliera. Rédigeant à deux reprises le catalogue des ouvrages qu’il mettait en vente publique, il en décrit les mérites en un langage dont les obscurités mêmes révèlent le caractère inédit. Tel est le « Secrétaire servant de commode » ainsi présenté : « le dessus se tire et sert de bureau ; il se lève au rase (sic) de la table à écrire et il s’y trouve toutes sortes de commodités ».

À la fin de sa vie, Cressent, collectionneur impénitent comme l’avait été Boulle, se trouvait, par la gêne financière, réduit à remplacer les belles dorures à l’or moulu par une « mise en couleur », c’est-à-dire un vernis appliqué sur le bronze. D’autre part, aux placages nus, sur la monochromie foncée desquels éclatait l’or de ses bronzes ciselés, il substituait une marqueterie à fleurs. Le maître dut quitter l’établi plusieurs années avant de s’éteindre, à quatre-vingt-deux ans, pauvre parmi ses collections, qu’incorrigible il accroissait dès qu’une vente lui en donnait les moyens.

G. J.

➙ Louis XV (styles Régence et).

 M.-J. Ballot, Charles Cressent, sculpteur, ébéniste, collectionneur (Champion, 1920 ; nouv. éd., F. de Nobèle, 1969).