Cortone (Pierre de) (suite)
En 1637, le grand-duc de Florence Cosme II demanda à Pietro de peindre à fresque sur les parois de la Stanza della Stufa, au palais Pitti, les allégories des quatre âges de l’humanité. Pietro exécuta aussitôt l’âge d’or et l’âge d’argent ; puis il s’interrompit pour se rendre d’abord à Venise, où il put étudier les maîtres de la couleur, puis à Rome, où il acheva le plafond du palais Barberini. Il revint à Florence en 1640 afin de peindre les deux autres allégories, l’âge d’airain et l’âge dé fer. Mais il entreprit aussi de décorer, dans le grand appartement du même palais, une série de stalles dont chacune devait évoquer la divinité d’une planète, au moyen de sujets peints à fresque dans des encadrements de stuc ; il travailla personnellement dans les salles de Jupiter, de Mars et de Vénus, se contentant de répartir entre ses élèves le reste de la tâche. Ces compositions, surtout celles des quatre âges, sont peut-être ce que Pietro a laissé de plus séduisant. Elles font triompher la virtuosité du peintre, son sens décoratif, la souplesse de son dessin, qui évite de fixer trop franchement les contours, sa palette claire et chatoyante, qui doit beaucoup à Véronèse*. Une lumière très pure baigne ce monde à la fois héroïque et tendre.
Pietro revint à Rome en 1647. Il entreprit aussitôt de peindre à fresque la coupole de l’église des Philippins, Santa Maria in Vallicella, dite Chiesa Nuova. Cet ouvrage, la Trinité dans une gloire céleste, achevé en 1651, Pietro reprit son activité de peintre officiel de la cour pontificale. Le pape Innocent X le chargea de décorer la galerie du palais Pamphili, sur la piazza Navona. Les fresques de l’Énéide qu’il y exécuta de 1651 à 1654 constituent le troisième grand ensemble profane du peintre. Elles prouvent une fois de plus sa science de la perspective verticale, de même que la voûte de la nef de Santa Maria in Vallicella, peinte de 1662 à 1665 et représentant un miracle de saint Philippe. Depuis 1652 jusqu’à sa mort, Pietro donna des modèles pour les mosaïques de Saint-Pierre du Vatican ainsi que des cartons de tapisseries pour les Barberini. C’est aussi pendant sa seconde période romaine qu’il peignit un certain nombre de grands tableaux d’autels : le Martyre de saint Laurent, pour San Lorenzo in Miranda ; Saint Charles Borromée et les pestiférés, pour San Carlo a’ Catinari ; d’autres pour des églises de Pérouse, de Cortona, d’Arezzo, d’Imola et de Venise. Après sa mort, et au-delà de ses disciples immédiats (Ciro Ferri [1634-1689], Giovanni Francesco Romanelli [1610-1662]), l’ampleur de son style décoratif devait inspirer tout un courant de la peinture baroque, représenté à Rome par le Baciccia (1639-1709) et Andrea Pozzo (1642-1709), voire à Venise par Tiepolo*.
Les mérites du peintre ne doivent pas faire oublier la qualité de son œuvre d’architecte. Le faste baroque s’y tempère d’une rare élégance. Pietro éleva l’église Santi Luca e Martina, près du Forum, à partir de 1634, mais l’essentiel date de sa seconde période romaine : le rhabillage, pour le compte d’Alexandre VII, de l’église Santa Maria della Pace, avec un frontispice remarquable par le jeu des surfaces concaves et convexes ; la façade de Santa Maria in Via Lata, aux colonnes très harmonieusement distribuées ; enfin la coupole de San Carlo al Corso.
B. de M.