Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

coopération (suite)

Les coopératives agricoles

Les coopératives agricoles (au nombre de 6 000 en France) se sont créées originellement (vers 1880) pour répondre aux problèmes créés par les carences et la fraude, surtout dans le domaine du commerce des engrais. Par la suite, le mouvement coopératif n’a cessé de s’étendre, notamment dans la commercialisation du lait, des céréales et dans la vinification.

Une mutation s’est produite après la Seconde Guerre mondiale dans le mouvement coopératif, consistant en un renforcement de ses activités transformatrices (produits laitiers, fruits et légumes, produits avicoles) et de ses activités de fabrication (aliments du bétail), et cela d’ailleurs sans préjudice de l’accroissement de ses activités dans le domaine commercial. Mais le mouvement associationniste a débordé largement la coopération de transformation qui se manifeste à la périphérie de l’exploitation agricole. Sous l’influence des bouleversements techniques et économiques qui se sont produits à partir de 1945, les exploitations agricoles ont multiplié entre elles des liens spécifiques afin de s’adapter au changement sans modifier leurs dimensions. Des formules très diverses et souvent très souples ont été mises en œuvre : centres d’études des techniques agricoles, centres de gestion, coopératives d’utilisation en commun du matériel agricole, centres d’insémination artificielle, syndicats et associations. À côté de ces manifestations spectaculaires, on assiste à la naissance d’une multitude d’associations informelles : entraide, copropriété, échanges, chantiers collectifs (concernant par exemple l’élevage industriel de volailles ou de porcs). Tous ces groupements sont voués à des fonctions particulières de l’exploitation. Plus récemment (vers 1965), on a vu apparaître des groupements réalisant la fusion de secteurs entiers et même de la totalité de plusieurs exploitations. Certes, un certain nombre de ces associations existaient déjà entre membres d’une même famille, le plus souvent sans cadre juridique précis ou bien sous forme de sociétés civiles. Mais la possibilité d’adopter à partir de 1965 un statut spécial, celui des groupements agricoles d’exploitation en commun (G. A. E. C.), sociétés civiles distinctes des sociétés coopératives (mais néanmoins à caractère coopératif), a favorisé ce type très spécial d’associations.

C’est surtout dans le domaine de l’organisation de la production agricole que la coopération a joué un rôle tout à fait nouveau et moteur. En effet, de nouvelles formes de coordination verticale entre les activités agricoles proprement dites et les activités périphériques ont permis à certains groupes coopératifs d’intervenir activement dans l’orientation des productions et dans l’organisation interne des exploitations agricoles. La coopérative en vient à participer à l’« intégration* », processus consistant à coordonner la production divisée en une série de tâches mécanisées que l’agriculteur exécute sur les indications de la coopérative. Aussi, l’orientation de la coopérative s’en trouve-t-elle modifiée. Pendant longtemps l’agriculteur livrait à la coopérative ce qu’il voulait, à l’époque qui lui convenait, et souvent la catégorie de produits qui n’avait pas trouvé preneur auprès du négoce privé. Chaque adhérent demeurait libre du choix de ses méthodes de production et des dimensions de ses opérations. Avec l’intégration, la coopérative est amenée à intervenir dans la gestion de l’exploitation intégrée afin de tenir compte de la concurrence du secteur privé et des exigences du marché des produits alimentaires : celui-ci réclame de plus en plus de produits homogènes, livrés en quantités massives et à date régulière. À cet effet, la coopérative doit imposer des disciplines commerciales ou techniques comparables à celles que devrait accepter l’agriculteur s’il se liait à une entreprise privée pratiquant l’intégration.

G. R.


Quelques-uns des initiateurs, théoriciens ou animateurs de la coopération


Édouard de Boyve

(1840-1925). Rentier protestant, il anime une société d’éducation populaire de Nîmes, la Solidarité (fondée en 1870 par un petit artisan mécanicien d’Uzès) ; il crée plusieurs sociétés de consommation et fait connaître les réalités de la coopération à Charles Gide (1880).


Achille Daudé,

dit Daudé-Bancel (Bancel, près de Carnas, Gard, 1870 - Sotteville-lès-Rouen 1963). Pharmacien, mutualiste et coopérateur, il est l’un des signataires du pacte d’unité de 1912 et, la même année, avec Ernest Poisson, le premier secrétaire général de la Fédération nationale des coopératives de consommation.


Arthur De Bonnard.

Disciple de Fourier, il reprend les violentes critiques de ce dernier contre le commerce ; il préconise la fondation de l’« épicerie véridique », dont « les boutiques seront établies dans les quartiers ouvriers affreusement exploités par les marchands qui vendent à des prix exorbitants des denrées de dernière qualité ». Les expériences qu’il tente sont brutalement interrompues par les journées de juin 1848, puis par le coup d’État du 2 décembre 1851.


Michel Derrion

(Lyon 1803 - Rio de Janeiro 1850). Ancien négociant en soie qui a fréquenté les milieux saint-simoniens et fouriéristes lyonnais, il crée en juillet 1835, dans une rue du quartier des tisseurs de Lyon, une boutique d’épicerie sous l’enseigne « le commerce véridique et social », dont les bénéfices doivent faire l’objet de quatre parts : primes d’encouragement au personnel ; dividendes des actionnaires ; œuvres sociales ; ristourne aux consommateurs proportionnellement à la part totale de leurs achats. Très vite, sept autres magasins s’ouvrent dans Lyon, mais, devant les tracasseries des commerçants, obligés de baisser leurs prix, et les ennuis suscités par la municipalité, l’expérience prend fin en 1838.


Georges Fauquet

(Lillebonne, Seine-Maritime, 1873 - † 1953). Après la soutenance de sa thèse sur le Travail en chambre considéré du point de vue sanitaire, il est inspecteur du travail. En 1920, il devient directeur du bureau de la coopération au B. I. T. ; en 1932, il succède à Albert Thomas à la direction du B. I. T. Il a notamment écrit le Secteur coopératif (1935) et Regards sur le mouvement coopératif (1949).


Charles Fourier.

V. l’article.


Charles Gide