Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

coopération (suite)

L’avènement de la « république coopérative » n’implique pas une révolution violente. En développant, d’une part, leurs magasins de vente et, d’autre part, leurs magasins de gros, en devenant propriétaires d’entrepôts, d’entreprises de transport et de production, les sociétés coopératives, « secteurs témoins privilégiés de la société actuelle », peuvent bâtir leur puissance très progressivement. Après la coopératisation du commerce et de la production s’effectuerait la coopératisation des services publics, « seule susceptible de mettre fin aux abus des bureaucrates de tout genre grâce à une véritable participation des usagers ». Sans doute, le triomphe de la république coopérative, qui supprimerait les revenus sans travail, ne changerait apparemment pas la situation des travailleurs, « véritable armée au service des consommateurs souverains », mais, en fait, chaque producteur, étant consommateur, participerait en cette qualité à la gestion.

Malgré les progrès enregistrés par le mouvement coopératif dans le monde entier, notamment en Grande-Bretagne et dans les pays Scandinaves, la « république coopérative » ne constitue pas encore, et loin de là, une réalité. Néanmoins, les coopératives de consommation paraissent jouer un rôle assez important dans la distribution, tout particulièrement en qualité de secteur témoin.


Les institutions coopératives françaises

Les sociétés locales subsistent ; elles participent à la vie locale et versent encore souvent d’importantes ristournes à leurs membres, tout au moins tant qu’elles affrontent la seule concurrence d’un commerce local isolé. Elles bénéficient d’une gestion directe. Généralement, elles adhèrent aux organismes nationaux.

La grande masse des coopérateurs est affiliée à une des vingt-quatre sociétés régionales, dont les dix principales représentent près de 80 p. 100 de l’activité coopérative. Au cours des dernières années, les petites unités de vente ont été remplacées par des établissements de moyenne ou de grande surface. En 1976, on comptait 29 hypermarchés (portant l’enseigne « Rond-Point »), 295 supermarchés, 1 065 superettes, 2 400 libres-services, 50 magasins à dominante non alimentaire, 2 600 magasins traditionnels sous la marque « Coop ». De 1920 à 1975, le chiffre des ventes des sociétés coopératives a été multiplié par dix en francs constants, alors que le nombre des sociétés s’est réduit de 90 p. 100.

Les sociétés locales et les sociétés régionales sont fédérées dans la Fédération nationale des coopératives de consommation. Le rôle de la F. N. C. C. est d’assurer la défense des intérêts généraux du mouvement, de promouvoir son développement et d’assurer sa représentation tant auprès des pouvoirs publics que des organismes internationaux et des autres formes de la coopération. À la tête de la F. N. C. C. est placé un Conseil d’administration, élu par le Congrès biennal, puis contrôlé et assisté par un Comité national. En principe, la F. N. C. C. n’est qu’un organisme « moral » ; ses services propres sont spécialisés dans l’éducation et la propagande, les études économiques, les études techniques et financières ainsi que l’entraide coopérative.

À côté de la Fédération, on trouve la Société générale des coopératives de consommation, qui joue un rôle de bureau d’achat et d’importateur dans le domaine commercial ainsi qu’un rôle de producteur dans le domaine industriel (conserverie, chocolaterie, torréfaction de café, etc.) ; dans cette dernière fonction, la S. G. C. C. a pris des participations dans certaines entreprises industrielles et, par ailleurs, fait fabriquer certains produits « Coop » par des fournisseurs indépendants. Elle a développé des services techniques pour les sociétés désireuses de moderniser leur équipement commercial.

Les sociétés coopératives peuvent également adhérer à la Banque centrale des coopératives : cette banque de dépôt est l’organisme de financement du mouvement coopératif de consommation. Elle consent des crédits à court terme et, en matière de crédit à moyen terme, intervient comme correspondant de la Caisse centrale de crédit coopératif, organisme de financement à moyen terme de l’ensemble du mouvement coopératif français non agricole. Un second organisme financier, l’Union coopérative de crédit ménager, permet aux coopérateurs d’acheter dans leurs magasins des biens de consommation durables à des conditions de crédit peu onéreuses. Depuis 1961, la « Sauvegarde » est la société d’assurances des coopérateurs.

Il faut souligner que toutes les sociétés coopératives fonctionnant en France n’adhèrent pas nécessairement à ces organismes. La création de toute société coopérative nouvelle reste entièrement libre : c’est ainsi qu’on a vu se multiplier depuis la Seconde Guerre mondiale des coopératives de l’Administration ou d’entreprises privées qui sont complètement en dehors du secteur de la coopération de consommation organisée (leurs ventes représentent environ 18 à 20 p. 100 de celles des sociétés de ce secteur).

Les groupements fédéraux du secteur coopératif organisé font partie du Conseil supérieur de la coopération, qui regroupe toutes les formes de la coopération et qui est un organisme consultatif officiel. Sur le plan international, ils sont membres de l’Alliance coopérative internationale, qui regroupe toutes les formes de coopération dans soixante-trois pays (260 millions d’adhérents, dont 124 millions pour les coopératives de consommateurs).

Les aspects juridiques de la coopération

Les principes essentiels à la loi de la coopération sont : le principe de la double qualité, qui signifie que les associés sont, simultanément, clients de leur société ; le principe de la ristourne proportionnelle, qui implique que, si une marge bénéficiaire a été dégagée, celle-ci fasse l’objet d’une ristourne aux associés ; le principe altruiste, qui fait ouvrir la coopérative à tout candidat et qui, à la dissolution, dévolue les biens de la coopérative à d’autres coopératives (ou à des œuvres poursuivant les mêmes fins) ; le principe démocratique, qui s’exprime par la formule « un homme, une voix » et qui fait de tous les associés des égaux dans la société quel que soit le nombre des parts qu’ils détiennent.

Le nombre des associés est fixé par le droit commun ou par les statuts ; ils doivent souscrire au moins une part sociale, mais rien ne leur interdit d’en détenir davantage. Des apports peuvent être constitués en nature ou en numéraire, mais il ne peut y avoir d’apport en industrie. Les assemblées générales exercent le pouvoir.

Les coopératives ont la possibilité de recevoir des subventions et des avances. Elles bénéficient d’un régime fiscal privilégié, contrepartie du principe de la double qualité.