Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

convention internationale (suite)

Intégrée par nature dans le droit interne, la convention internationale y occupe, par rapport à la loi, une place privilégiée. Le principe de la subordination de la loi interne au traité régulièrement formé et publié a été proclamé dès 1787 par la Constitution des États-Unis d’Amérique. Il est inscrit, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale et de la décolonisation, dans un grand nombre de Constitutions d’États unitaires (en France, article 26 de la Constitution de 1946 et article 55 de la Constitution de 1958).

La procédure ordinairement suivie à l’époque contemporaine pour l’entrée en vigueur d’une convention régulièrement négociée et signée est l’échange ou le dépôt des ratifications, suivant qu’il s’agit d’un traité bilatéral (à deux parties contractantes), ou d’un accord multilatéral (conclu entre plusieurs États). La ratification est un acte libre du chef de l’État, appelé à confirmer (sans y être tenu) la signature donnée par ses plénipotentiaires (qualification mal fondée depuis l’apparition et le développement d’un contrôle parlementaire du pouvoir de traiter). Une disposition expresse du traité peut seule relever de sa déchéance la signature, qui suffisait à l’origine pour engager définitivement le souverain et ne joue plus de nos jours qu’un rôle d’authentification du texte négocié. L’article 18 de la convention de Vienne prescrit cependant l’obligation pour l’État dont le représentant a signé le traité de s’abstenir de tout acte qui priverait ce traité de son objet et de son but au moment de la ratification. Devenue déterminante pour l’entrée en vigueur du traité, la ratification, une fois donnée, ne peut rétroagir à la date de la signature.

Parallèlement à la procédure normale et en raison même des lenteurs et des aléas de la ratification s’est développée la pratique d’une procédure simplifiée de conclusion des conventions qui fait exception à la règle de la négociation par plénipotentiaires et à la ratification. L’article 52 de la Constitution française de 1958 l’a consacrée, spécifiant que le président de la République est tenu informé de toute négociation tendant à la conclusion d’un accord international non soumis à ratification.

Fréquents dans le domaine des rapports internationaux de services publics pour faciliter par des contacts administratifs directs entre chefs de service l’application des conventions d’union, ces accords ont trouvé, dans des circonstances spéciales, l’occasion d’une application exceptionnelle à des négociations territoriales et politiques qui, dans l’ordre constitutionnel, auraient dû être normalement soumises aux contrôles afférents à la procédure de ratification. On peut citer comme exemples de ce déclassement intentionnel : l’accord de Munich de 1938, l’accord de 1940 entre la Grande-Bretagne et les États-Unis sur l’échange de destroyers américains contre des bases aux Antilles et en Guyane britanniques, les accords intervenus à Évian en 1962 entre les représentants du gouvernement français et les représentants du Front national de libération algérien.

L’importance croissante des conventions multilatérales, ayant pour objet, comme la loi interne, de régler dans l’ordre international des problèmes et des situations d’intérêt commun, d’ordre politique, économique et social, est due en partie à l’influence agissante des organisations internationales, qui ont accrédité la qualification de traités-lois, inventée à la fin du xixe s. par la doctrine. Rentrent plus spécialement dans cette catégorie les conventions multilatérales préparées sous les auspices de l’Assemblée générale de l’O. N. U. par les travaux de sa Commission du droit international, créée en 1947 en application de l’article 13 de la Charte. On doit à son activité laborieuse la réussite des conférences de codification qui ont abouti aux quatre conventions de 1958 de la Conférence diplomatique de Genève sur le droit de la mer (convention sur la mer territoriale et la zone contiguë ; convention sur la haute mer ; convention sur la pêche et la conservation des ressources biologiques de la haute mer ; convention sur le plateau continental), à la convention de Vienne sur les relations diplomatiques de 1961, à la convention de Vienne sur les relations consulaires de 1963, à la convention de Vienne sur le droit des traités de 1969.

D’autres traités-lois importants dans le domaine des relations étatiques afférentes aux droits individuels ont été élaborés ou préparés par des institutions spécialisées. Il convient de citer plus spécialement : les conventions internationales du travail, œuvres de l’O. I. T. (Organisation internationale du travail), la convention de Stockholm (1967) sur la protection des œuvres littéraires et artistiques, élaborée sous les auspices de l’Unesco, de même que, dans le domaine des conventions applicables en temps de conflit armé, la convention de La Haye de mai 1954 sur la protection des œuvres d’art et des centres monumentaux ou bien encore les conventions de Genève de 1949 sur la protection des victimes de la guerre.

La multiplication des conventions est un phénomène constant de notre temps, accru par la prolifération des États consécutive à la décolonisation. On trouve dans le rapport du secrétaire général de l’O. N. U. sur l’activité de l’Organisation des indications numériques probantes à ce sujet, bien qu’elles ne portent que sur les conventions enregistrées par le secrétariat en application de la Charte de 1945 : au cours de l’année terminée le 15 juin 1970, 1 188 traités ont été enregistrés au secrétariat, alors que le nombre des traités inscrits de 1946 à 1970 s’est élevé à 15 073.

P. L.

 Recueil des traités et des engagements internationaux enregistrés par le secrétariat de la S. D. N. (Genève, 1920-1945 ; 205 vol. et 9 vol. d’index). / L. Le Fur et G. Chklaver, Recueil de textes de droit international public (Dalloz, 1928 ; 2e éd., 1934). / J. Chailley, la Nature juridique des traités internationaux (Sirey, 1932). / F. Dehousse, la Ratification des traités (Sirey, 1936). / O. N. U., Recueil des traités (New York ; 600 vol. parus depuis 1946). / P. Reuter et A. Gros, Traités et documents diplomatiques (P. U. F., 1960 ; 3e éd., 1970).