Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

construction navale (suite)

Après la Seconde Guerre mondiale

Les destructions dues aux hostilités entraînent chez les anciens belligérants une intense activité pour les chantiers navals : remise en état des établissements souvent très gravement endommagés, réparation et refonte des anciens navires rescapés, construction de nouvelles unités pour remplacer la flotte détruite, etc. À cette époque sont utilisés en appoint des cargos de guerre américains du type liberty ship, construits très rapidement en grandes séries par tranches préfabriquées et soudées (10 000 t de port en lourd, mais seulement 11 nœuds de vitesse) et propulsés par une machine alternative à vapeur de 2 500 ch.

Les paquebots construits sont de taille et de vitesse modérées, à l’exception de l’United States américain (1952), long de 301,75 m, jaugeant 53 000 tonneaux, qui détient encore aujourd’hui le « ruban bleu » de l’Atlantique Nord avec la vitesse de 35,69 nœuds, après avoir atteint 42 nœuds à ses essais. Cette vitesse considérable ne correspondait pas aux besoins de l’exploitation, mais se justifiait, ainsi que les caractéristiques générales du navire, par son éventuelle utilisation militaire.


L’époque contemporaine

Après cette période de reconstruction commence une nouvelle révolution de la construction navale.

Pour les navires de guerre, les transformations sont la conséquence de l’évolution des moyens et des méthodes de combat : avions, sous-marins, missiles, etc. Leur conception n’est plus orientée vers le combat naval traditionnel, mais davantage en vue de leur défense contre les attaques aériennes et sous-marines, et de leur participation à une action d’ensemble terrestre, aérienne et maritime. Les bâtiments de guerre classiques cèdent la place aux porte-avions, aux porte-hélicoptères, aux navires et aux sous-marins lance-engins, qu’accompagnent les patrouilleurs, les chasseurs de mines, les vedettes lance-torpilles, les bateaux de débarquement, les escorteurs, les transports de troupes, les ravitailleurs de toutes sortes.

Dans la marine marchande, la spécialisation des navires est plus poussée, des trafics nouveaux et de nouvelles techniques de transport apparaissent, la vitesse ou les dimensions s’accroissent considérablement, les procédés de manutention se transforment, la conduite des navires devient automatique, etc. De 100 000 t vers 1960, le port en lourd des plus grands pétroliers en commande en 1971 passe à près de 480 000 t, ce qui correspond à une longueur de 360 m et à un tirant d’eau de 28 m, mais la vitesse courante des navires-citernes reste de l’ordre de 14 à 17 nœuds. Parmi les types de navires nouveaux figurent les navires entièrement conçus pour le transport des gaz liquéfiés, notamment celui du méthane à – 160 °C, et les transporteurs de charges dites « unifiées » : transports de containers et navires porte-barges, pour lesquels les Américains ont ouvert la voie. Les cargos de marchandises générales ont le plus souvent une vitesse de l’ordre de 20 nœuds et sont conçus soit pour la manutention verticale traditionnelle, soit pour la manutention horizontale par roulage direct (roll on - roll off), ou encore pour les deux types de manutention à la fois.

L’essor de l’aviation marchande amène la disparition des grands paquebots de ligne : la construction de la France en 1961 (315,65 m de long, 66 000 tonneaux, 31 nœuds de vitesse en service, plus de 2 000 passagers) fut pourtant une remarquable réussite technique, puisque le navire réalisa le programme de la Normandie avec un déplacement inférieur (57 000 t contre 70 000) et une consommation de combustible réduite de près de la moitié. Ce navire sera désarmé en 1974. Cependant, les chantiers construisent encore des paquebots moyens pour les croisières et surtout de petits paquebots rapides, type « car-ferry », pour les courtes traversées.

L’apparition de nouveaux appareils auxiliaires accompagne l’évolution de la technique maritime : treuils d’amarrage à tension constante, dispositifs antiroulis (installations à citernes ou stabilisateurs à ailerons), propulseurs transversaux, nouveaux engins et dispositifs de manutention, adaptés en particulier à la manutention horizontale, accessoires assurant une plus grande sécurité de la navigation (radars, sondeurs à ultrasons, etc.).

La plupart des unités modernes sont à moteur Diesel, mais les très grands navires, à puissance propulsive élevée (pétroliers, porte-containers, grands paquebots), sont presque toujours à turbines à vapeur. Pour quelques navires et surtout pour les aéroglisseurs, la turbine à gaz a été adoptée. D’autre part, la propulsion nucléaire est d’un emploi fréquent pour les marines militaires américaine et soviétique, ses applications étant encore limitées sur les navires de guerre des autres nations. Dans la marine marchande, elle est encore au stade expérimental. Enfin, l’automatisation de la conduite des navires s’est généralisée. Elle s’est étendue également, sur certaines unités, aux installations de navigation ou de manutention et, sur les navires de guerre, à la conduite du tir.

Corollaire du développement général de l’industrie, les méthodes de construction se transforment profondément. La généralisation de la construction soudée permet la préfabrication en atelier de blocs très importants de la coque, dont la manipulation exige des engins de levage et de transport de grande puissance. Des ordinateurs permettent d’effectuer divers calculs : volumes et stabilité, puissance de propulsion, formes de carène, éléments résistants de la charpente, etc. De nombreuses opérations sont mécanisées et automatisées, comme le traçage et le découpage des tôles, le soudage. En outre, les grandes unités ne sont plus construites sur les cales inclinées traditionnelles, mais dans des formes abritées, analogues aux formes de radoub, dans lesquelles elles sont simplement mises en eau après achèvement de la coque, ce qui évite l’opération du lancement, particulièrement délicate si l’on ne dispose que d’un plan d’eau de faible étendue.

Enfin, dans la marine marchande, la révolution de la technique des transports maritimes et la concurrence étrangère, surtout japonaise, ont entraîné les constructeurs dans des modifications de structure : regroupements, concentrations, modernisation des installations et des équipements, spécialisation des chantiers pour certains types de navires.