Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

conditionnement (suite)

Les modalités de l’extinction sont également identiques pour les deux types de conditionnement : la suppression du renforcement agit de la même manière dans l’un et l’autre cas (la part étant faite aux caractères particuliers, brièvement indiqués plus haut, de la situation d’évitement). La récupération spontanée, qui survient après l’extinction par le seul effet du temps, est également commune aux deux sortes de conditionnement. Il en est de même des effets du renforcement intermittent.

Il faudrait accorder une place particulière aux phénomènes de généralisation du stimulus et de discrimination ou de différenciation tels qu’ils ont été mis en évidence à l’origine par Pavlov et ses collaborateurs. Il y a généralisation si, une réaction conditionnelle ayant été établie en réponse à un stimulus particulier, d’autres stimuli, qui n’ont jamais été antérieurement renforcés, suscitent la même réaction, toutefois avec d’autant moins de force qu’ils sont plus différents du stimulus original.

Si un ou plusieurs de ces stimuli se trouvent, de façon répétée, privés de renforcement, ils cessent peu à peu de susciter la réaction. Le sujet apprend ainsi à se comporter de façon différenciée ou discriminative, en répondant à certains stimuli et non à d’autres.

Les problèmes de la généralisation et de la discrimination ont constitué par eux-mêmes l’objet de nombreuses recherches, qui débordent assez largement le champ du conditionnement. En les rangeant parmi les phénomènes communs aux deux types de conditionnement, on doit donc souligner qu’ils se rencontrent en outre dans des apprentissages plus complexes que le conditionnement proprement dit.


Les prolongements du conditionnement

Indépendamment de son intérêt propre en tant qu’étude d’une classe déterminée de comportements, le conditionnement tient une grande place en psychologie et en psychophysiologie en raison de sa valeur de schéma généralisable. Il ne peut être question ici de porter sur cette valeur une appréciation qui est affaire de choix théorique. Mais on doit noter qu’historiquement le conditionnement a fécondé très tôt la psychologie du comportement en France, où Henri Piéron l’a fait connaître dès 1908, aux États-Unis, où le béhaviorisme naissant en a repris le contenu et l’a, à sa manière, développé et systématisé. Pendant toute une période, le conditionnement a ainsi constitué de fait le principal modèle d’apprentissage animal, tandis que des tentatives importantes étaient faites pour l’étendre aux apprentissages humains, notamment en faisant la synthèse de ses principes et de ceux de l’apprentissage verbal associatif. Puis cette démarche a également été appliquée à des comportements de plus en plus complexes, à l’affectivité, au langage, aux activités intellectuelles, etc. ; elle a incontestablement conduit à de nombreux succès, dans la mesure où l’hypothèse générale de l’existence de caractéristiques communes au conditionnement et à d’autres activités psychologiques a reçu bien des confirmations. Elle a, bien entendu, rencontré également ses limites et fait apparaître tout aussi bien les différences que les identités ; il peut d’autant moins être question de réduire les activités supérieures à des conditionnements élémentaires que l’on voit clairement aujourd’hui, grâce à l’étude approfondie qui en est faite, combien le conditionnement le plus apparemment simple est lui-même fort complexe.


Les applications du conditionnement

Outre ses prolongements sur le plan de la théorie psychologique et de la recherche, le conditionnement a donné lieu à de multiples tentatives d’applications.

Pavlov et son école en avaient déjà cherché sur le terrain de la psychopathologie. Elles se justifient par le fait que les réactions viscérales, les comportements émotifs, l’affectivité en général sont souvent aisément « conditionnables » de façon classique par les événements de la vie courante ; toute une série de traitements psychothérapiques reposent ainsi sur le principe du « déconditionnement ». Les recherches sur les névroses expérimentales et, plus généralement, sur les conflits de motivations sont rattachées au même courant théorique, et elles peuvent, dans certains cas, recouper, compléter, voire même concurrencer les conceptions de la psychanalyse. Enfin, un certain nombre d’applications du conditionnement opérant sont développées par l’école de la « thérapie comportementale » (behavior therapy).

Une autre grande classe de développements se situe dans le domaine pédagogique. Les activités motrices étudiées par la psychologie du travail ou de l’éducation physique trouvent dans le conditionnement des principes d’explication et d’application particulièrement féconds. Les choses sont plus difficiles lorsqu’il s’agit d’acquisitions de connaissances plutôt qu’à proprement parler d’apprentissages de comportements. Mais la doctrine qui fonde les recherches sur l’enseignement programmé est, pour une très large part, fondée sur les conceptions de Skinner concernant le conditionnement opérant ; même si l’on peut faire des réserves sur les aspects théoriques de ces développements, on ne peut sous-estimer leur très grand intérêt et la possibilité qu’ils offrent de mieux élaborer les règles d’une didactique.

J.-F. L. N.

➙ Animal / Apprentissage / Comportement / Enseignement / Motivation / Pavlov (I.) / Psychologie.

 I. P. Pavlov, Œuvres choisies (trad. du russe, Éd. de Moscou, 1955) ; Réflexes conditionnels et inhibitions (trad. du russe, Gonthier, 1963). / A. Fessard et coll., le Conditionnement et l’apprentissage (P. U. F., 1958). / J.-F. Le Ny, le Conditionnement (P. U. F., 1961 ; 3e éd., 1969) ; Apprentissage et Activités psychologiques (P. U. F., 1967). / M. Richelle, le Conditionnement opérant (Delachaux et Niestlé, Neuchâtel, 1966).