Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

comptabilité nationale (suite)

À quoi sert ce tableau ?

1o C’est une analyse des flux de produits.
On voit tout d’abord que le tableau entrées-sorties constitue un ensemble de comptes de ressources et d’emplois de biens et de services. On peut en effet présenter l’ensemble de la première ligne et de la première colonne de façon suivante :

Bien entendu, en réalité, la colonne « utilisations finales » du T. E. S. est décomposée entre la consommation finale, les investissements (entreprises, ménages, administrations, institutions financières), les exportations et la variation des stocks. Le tableau entrées-sorties donne pour chaque produit l’équilibre entre les ressources et les emplois de ce produit au cours de l’année.

2o C’est un ensemble de comptes de production.
Observons maintenant une colonne : choisissons par exemple la colonne « industrie » ; cette colonne retrace le compte de production de l’ensemble de la branche :

Dans un vrai tableau entrées-sorties, on va même plus loin, puisqu’on donne par branche la répartition de la valeur ajoutée entre la rémunération des salariés, les impôts liés à la production — nets des subventions d’exploitation — et l’excédent brut d’exploitation : on a ainsi le compte d’exploitation de chaque branche.

Le tableau entrées-sorties fournit les comptes de production et d’exploitation des différentes branches.

3o C’est un moyen de calculer la production totale du pays.
Intéressons-nous maintenant à la colonne « utilisations finales » et aux lignes « valeur ajoutée » et « importations ». On voit tout de suite que, au total :

Cette égalité est évidente puisque le total des ressources est égal au total des emplois et que les deux termes de l’égalité ci-dessus s’obtiennent en retranchant de ces totaux la somme des consommations intermédiaires (138).


Mais que signifie-t-elle ?

Elle signifie d’abord que la somme des valeurs ajoutées est bien la production finale, c’est-à-dire l’ensemble de ce qui a été produit au cours de l’année et qui a été mis à la disposition des utilisateurs sans être réintroduit dans le circuit productif. C’est pourquoi on appelle produit intérieur brut (brut, parce que les amortissements ne sont pas déduits) le total des valeurs ajoutées.

Et : utilisations finales = produit intérieur brut + importations.

4o C’est une matrice de coefficients techniques.
Un tel tableau fait apparaître des coefficients techniques. De quoi s’agit-il ? On a vu que, pour produire 154 milliards, l’industrie consommait 18 milliards de produits agricoles, 64 milliards de produits industriels et 5 milliards de services, soit respectivement 20 p. 100, 41,6 p. 100 et 5,5 p. 100 de la production ; ces pourcentages sont les coefficients techniques de la branche industrie. À ce niveau d’agrégation, de tels coefficients n’ont pas grande signification. Mais référons-nous à un tableau en 37 branches. En 1971, par exemple, on lit, dans les cases ad hoc, que la branche « automobiles et autres véhicules de transport terrestre » a produit pour 43 660 millions de francs de véhicules. Au cours de l’année, elle a consommé pour 3 777 millions de métaux ferreux : cela représente un coefficient technique de 8,7 p. 100, qui signifie donc que, pour produire 100 automobiles (en unités monétaires), il faut 8,7 unités de métaux ferreux. L’utilité de tels coefficients est évidente : si l’on suppose le progrès technique négligeable, on saura lors d’une prévision, si l’on compte sur une production de 15 milliards de francs d’automobiles, que l’industrie automobile consommera  millions de francs de produits sidérurgiques, et cela, bien sûr, si l’on raisonne à prix constants. On peut, dans le cas de prévisions à assez long terme, faire intervenir l’évolution des coefficients techniques.

On voit quel parti on peut tirer de la connaissance de ces coefficients techniques pour la prévision : chaque fois que l’on aura prévu une augmentation de la production d’un bien donné, on en déduira immédiatement les répercussions sur les fournisseurs de cette industrie, puis sur les fournisseurs de ces derniers, etc.

5o C’est enfin un ensemble complet et cohérent de statistiques de biens et de services.
Les tableaux entrées-sorties sont établis à partir de nombreuses statistiques de sources très diverses : statistiques de production et d’échanges fournies par des recensements et des enquêtes auprès des ménages, comptabilité publique, statistiques douanières, etc.

La confrontation de toutes ces données et leur insertion dans un cadre complet et soumis à de nombreuses contraintes d’équilibre permettent d’en améliorer la valeur. Dans de multiples cas, les informations sont contradictoires : par exemple, les statistiques de production d’un produit ne concordent pas avec les données sur ses utilisations (consommation, exportation, etc.). Un jugement critique doit être fait sur les statistiques utilisées afin de retenir des résultats cohérents. Nul doute qu’un tel effort n’améliore la qualité des chiffres finalement publiés. Dans d’autres cas, les informations disponibles sont au contraire tout à fait insuffisantes ; les contraintes d’équilibre permettent de remplir les cases sur lesquelles on ne sait rien directement.

Un travail très complet est fait pour les années de base. Pour les comptes de ces années (1951, 1956, 1959, 1962, 1971), un nouveau tableau est mis en chantier, en faisant appel à la totalité des informations disponibles.

Puis les tableaux des autres années sont construits à partir de ce tableau de base en appliquant des indices d’évolution aux différentes cases du tableau. Ces indices doivent évidemment être établis de façon que soient respectées les contraintes d’équilibre. Ils sont tirés de statistiques analogues à celles qui ont permis de construire le tableau de base, mais là on peut être moins exigeant : il n’est pas nécessaire de détenir des informations aussi complètes, la structure des échanges ne se bouleversant pas d’une année à l’autre. On se contente donc d’indices qui doivent être représentatifs, mais qui ne sont pas obligatoirement exhaustifs.