Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

communisme (suite)

La contre-offensive de l’armée rouge est stoppée à Varsovie (août 1920), après une nouvelle défaite des forces révolutionnaires en Allemagne (mars 1920). Surtout, la première action entreprise sous la direction exclusive du parti communiste allemand et avec l’appui direct du Comité exécutif du Komintern se solde par une écrasante défaite. Enfin, les grèves en Italie, en Tchécoslovaquie et en France sont réduites à néant.


Les partis communistes nouveaux

La révolution russe et l’Internationale communiste provoquent l’apparition des partis communistes, les uns issus de la social-démocratie, les autres absolument neufs, comme le parti chinois. Malgré le rattachement à l’Internationale et la sévérité des « 21 conditions » d’adhésion, qui imposent un filtrage très sélectif, les partis qui la composent sont très divers.

La majorité de l’ancien parti social-démocrate ou socialiste va former un parti communiste. C’est ainsi que le parti social-démocrate tchécoslovaque se scinde au mois de décembre 1920, et sa fraction majoritaire adhère à l’Internationale communiste. De même, la majorité du parti social-démocrate allemand fusionne avec le groupe spartakiste. En France, au congrès de Tours (déc. 1920), la majorité de la S. F. I. O. adhère à l’Internationale communiste et constitue le parti communiste, Section française de l’Internationale communiste (S. F. I. C.).

Le parti socialiste italien, en revanche, ne voit qu’une minorité de ses membres adhérer à l’Internationale communiste.

En 1921, la IIIe Internationale comprend plus de 60 sections et près de 3 millions de membres, avec 700 journaux quotidiens.

Toute une série de partis désertent la IIe Internationale, mais certains, se refusant à entrer dans la IIIe Internationale, constituent l’Internationale II et demie.


L’organisation de l’Internationale communiste : la tactique du front unique

« Il faut en finir avec les assauts et passer au siège. » Telle est la leçon que tire Lénine des premières défaites de l’Internationale communiste. Il faut définir une nouvelle tactique, capable d’entamer à long terme la résistance acharnée dont la bourgeoisie faisait preuve. En juin 1921, le IIIe Congrès de l’Internationale communiste lance le mot d’ordre « allez aux masses », concluant que le prolétariat seul ne peut vaincre. L’accent est mis sur les tâches communes à tout le prolétariat pour faire face dans l’immédiat au péril réactionnaire. L’Internationale communiste lance un appel « aux prolétaires de tous les pays pour l’unité du front prolétarien afin d’obtenir plus de pain et la paix ».

Cette nouvelle tactique n’a pas que des partisans. Les partis italien et français, notamment, après avoir exprimé leur désapprobation devant un tel revirement et malgré les promesses de s’y tenir, la sabotent dans les faits. Le 2 avril 1922, pour la première fois depuis 1914 et pour la dernière, l’Internationale communiste se réunit à Berlin avec la IIe Internationale et l’Internationale II et demie. Un programme de lutte y est adopté : pour la journée de huit heures, pour la lutte contre le chômage, pour l’action unie du prolétariat contre l’offensive capitaliste, pour la reprise des relations avec l’Union soviétique, pour l’établissement d’un front unique prolétarien national et international. Cette tentative reste sans lendemain. Le front unique au sommet a vécu.

Une nouvelle réunion du Comité exécutif de l’Internationale communiste préfère la poursuite du front unique à la base. On y saisit l’occasion de réprimander les délégués italiens et français pour leur dérogation aux ordres de l’Internationale. Ils promettent de s’amender. On lance alors la directive de construire un bloc ouvrier en gagnant à la cause bolchevique les masses influencées par le réformisme. L’effet de ce revirement est le départ définitif des derniers tenants du socialisme d’avant la guerre qui figuraient encore dans les partis communistes européens.


La bolchevisation : 1923-24

Après l’écrasement des derniers soulèvements communistes en Allemagne (en Rhénanie, à Berlin, à Munich et à Hambourg), en Bulgarie (sept. 1923) et en Pologne (nov. 1923), l’ensemble des partis vont s’engager dans la consolidation organisationnelle. Sous le nom de bolchevisation, ils éliminent tout libéralisme « réformiste » pour adopter les rigueurs du « centralisme démocratique ». Le mécanisme d’épuration mis en marche dans le parti russe après la mort de Lénine en janvier 1924, qui va rejeter Trotski*, puis. Zinoviev et Boukharine*, a son parallèle dans les partis européens : le groupe brandlérien dans le parti allemand, le groupe des trois W. dans le parti polonais, le groupe Bubuik du parti tchèque, le groupe d’Alfred Rosmer et Pierre Monatte dans le parti français. À gauche, les dissidents sont aussi frappés : le « groupe anarcho-syndicaliste » d’Amadeo Bordiga en Italie, le groupe « ultra-gauche » de Ruth Fischer en Allemagne ou celui d’Albert Treint et Suzanne Girault en France.


Classe contre classe (1928-1933)

L’opposition de gauche une fois battue, l’Internationale communiste s’oriente vers une politique nettement plus à gauche. Les mots d’ordre visant à dissocier les ouvriers social-démocrates de leurs leaders « social-fascistes » sont remis à l’honneur. La tactique « classe contre classe », inaugurée par le parti communiste français, qui se présente seul aux élections législatives de 1928, est appliquée avec la plus grande rigidité en Allemagne. La direction de l’Internationale communiste déclare que « la social-démocratie, en soutenant que le danger fasciste exige un bloc de la classe ouvrière avec la fraction « démocratique » de la bourgeoisie, constitue le principal obstacle au passage des larges masses ouvrières sur une position révolutionnaire. Le combat contre la social-démocratie pour arracher les ouvriers socialistes à son influence et organiser, sous la direction du parti communiste, le front unique des travailleurs, communistes et socialistes, est donc la condition préalable d’une victoire sur la bourgeoisie et le fascisme [...]. Il est absurde de s’inquiéter du fait que l’affaiblissement des socialistes renforce les chances de l’entreprise fasciste : le fascisme liquidera la social-démocratie, ce qui laissera la voie libre à la révolution prolétarienne, dont l’heure sonnera quand le fascisme se sera écroulé ».