Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

Alaska (suite)

L’Alaska renferme du gaz naturel, surtout dans la péninsule de Kenai, dont la production est destinée aux centrales de Tōkyō. L’existence du pétrole sur la côte de l’océan Arctique est connue depuis une vingtaine d’années (la marine américaine y possède une réserve stratégique), mais ce n’est qu’en 1969 que l’on a découvert un riche gisement de pétrole dans la baie Prudhoe, sur cette même côte (déjà 10 Mt en 1973). La seule vente aux enchères des concessions a rapporté 900 millions de dollars à l’État d’Alaska (125 fois le prix d’achat de l’ancienne colonie russe).

L’exploitation forestière alimente diverses scieries et fabriques de pâte (Sitka, Ketchikan) ; d’autres usines utilisatrices de bois sont en construction ou en projet. Les forêts nationales, d’où vient la majeure partie du bois, sont soumises à la rotation des coupes et à des mesures de conservation à la fois végétale et animale (gibier, saumon).

L’histoire des tentatives de colonisation agricole est une série d’échecs suivie de demi-succès. Quelques cultures (légumes) et l’élevage laitier sont pratiqués près d’Anchorage (vallée de Matanuska) et de Fairbanks : les sols sont bons, la longueur des jours d’été compense le déficit des températures, mais les gelées tardives ou précoces réduisent la saison de végétation. On tente près d’Anchorage la culture sous serre avec irrigation à l’eau tiède ; les prix de vente sont inférieurs à ceux des denrées importées.

Les richesses hydro-électriques de l’Alaska sont à peine exploitées, sauf dans la Queue-de-Poêle. On projette de construire une centrale géante en aval de Rampart, sur le Yukon.

L’Alaska est relié aux États-Unis proprement dits par terre (grand-route de l’Alaska, d’Edmonton à Fairbanks), par mer (d’Anchorage et des ports de la Queue-de-Poêle à Seattle et San Francisco) et par avion. À l’intérieur de l’État, outre la ligne ferroviaire de Seward à Fairbanks, deux routes principales joignent la péninsule de Kenai et Anchorage à Fairbanks et Valdez à la route de l’Alaska.

C’est avec les autres États de l’Union que l’Alaska entretient les relations économiques les plus étroites (exportation de conserves, bois, pâte, minerais et maintenant pétrole ; revenus du tourisme). Depuis une dizaine d’années, le Japon s’intéresse de plus en plus aux richesses de l’Alaska (charbon, bois, concentrés de cuivre, pétrole, gaz naturel, saumon).

P. B.

 E. Bruet, l’Alaska (Payot, 1945). / E. H. Gruening, The State of Alaska (New York, 1954 ; nouv. éd., 1968). / M. Poniatowski, Histoire de la Russie d’Amérique et de l’Alaska (Horizons de France, 1958). / J.-C. Berrier, Alaska, splendeur sauvage (Nathan, 1970).

Albanie

En albanais Shqipnija ou Shqipëria, État d’Europe, sur l’Adriatique. Capit. Tirana.


L’Albanie est un État exceptionnel par sa position géographique, son isolement politique et son développement économique. Sur une superficie voisine de celle de la Belgique (28 740 km2) vivent environ 2,3 millions d’habitants (80 hab. au km2) entièrement coupés du monde.


Les milieux naturels

Le pays doit avant tout son originalité aux traits hostiles du milieu physique. Les montagnes qui occupent les trois quarts de son territoire lui ont valu le nom de « pays des aigles ». Les chaînes, appartenant à l’ensemble dinarique, dont la direction s’infléchit du nord au sud, n’atteignent jamais 3 000 m, mais leur disposition et leur caractère massif rendent difficile leur pénétration. Au nord, les Alpes albanaises, avec les monts Maudits, dressent leurs crêtes au-dessus de cirques glaciaires. Au centre, une série de chaînes parallèles dominent, vers l’intérieur, le sillon étroit du Drini et les bassins de Korça, d’Ohrid et de Prespa (ces deux derniers étant occupés par des lacs) ainsi que vers la mer, le bassin du Mati et la plaine littorale. Au sud, de hauts plateaux et des sommets décharnés annoncent l’Épire, et la chaîne côtière de la région de Himara se dresse au-dessus des collines de la « riviera » albanaise. Une seule vallée transversale d’importance aère l’ensemble, celle du Shkumbini, empruntée dès l’Antiquité. L’hiver, long et âpre, contribue à l’isolement des hautes vallées. La forêt, entretenue par des précipitations relativement abondantes, a été dégradée par la surcharge pastorale.

La plaine côtière a une largeur maximale de 30 km. Grenier à blé sous les Grecs et les Romains, elle devint marécageuse par négligence et abandon de la population sous l’occupation ottomane (les torrents montagnards, limités dans leur écoulement par un cordon dunaire et des lagunes, l’inondent au printemps). Entre la montagne et la côte, inhospitalière, une frange de collines offre les sites des bourgades de commerce, reliées de tout temps par une voie marchande. La douceur des hivers (la moyenne de janvier à Tirana dépasse 7 °C) permet la culture de la vigne (de l’olivier dans le Sud), et la chaleur des étés celle des plantes subtropicales (mais l’irrigation est nécessaire). Il faut des investissements coûteux.

Les vicissitudes historiques ont contribué à dévaloriser un pays naturellement pauvre. Tandis que les Ottomans développaient l’artisanat et le commerce dans les villes de contact, la montagne devenait le refuge de populations pourchassées. On pouvait y étudier encore, il y a peu d’années, les types de communautés tribale ou patriarcale appelées fis et des coutumes médiévales dont il reste des vestiges : loi du sang, refuge dans des bâtisses fortifiées (les kulla), cérémonials de mariage, légendes et folklore.


Le peuplement

La croissance de la population dépasse encore 3 p. 100 par an : la population totale a ainsi doublé de 1938 à 1969. Dans les districts pastoraux du Nord, les taux de natalité dépassent encore 40 p. 1 000. La disproportion de la sex ratio se fait ici, fait unique en Europe, en faveur de l’élément masculin. Le taux de population agricole reste supérieur à 60 p. 100. L’importance de l’émigration souligne encore ces traits de pays sous-développé ; plus de 1 million et demi d’Albanais ou de descendants vivent à l’étranger : en Yougoslavie (750 000 à 900 000 selon les sources), en Italie du Sud, en Épire grecque, aux États-Unis, etc. D’une histoire troublée sont également demeurés des clivages de civilisation. Au nord, la population guègue parle un dialecte mêlé de termes slaves, et son genre de vie s’apparente à celui des pasteurs monténégrins. Au sud, la population tosque a subi l’influence hellénique, et quelques dizaines de milliers de Grecs peuplent la région de Gjirokastra (Gjirokastër). 70 p. 100 de la population totale sont islamisés, et, bien que les pratiques religieuses soient tombées en désuétude, la secte des bektaşî a fixé son siège mondial à Tirana et entretient de bons rapports avec les autorités. 20 p. 100 se déclarent orthodoxes et 10 p. 100 catholiques romains (dans le district de Shkodra [Shkodër]).