Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

Commonwealth (suite)

Le lien monétaire lui-même s’affaiblit. Un seul grand pays du Commonwealth, le Canada, ne fait pas partie de la zone sterling. Inversement, plusieurs pays qui ont quitté le Commonwealth sont restés dans la zone sterling : l’Irlande, l’Afrique du Sud, le Koweït et les sultanats du golfe Persique ; certains, qui n’ont jamais été membres du Commonwealth, ont place dans la zone monétaire : l’Islande, la Libye, la Jordanie. L’appartenance à la zone sterling donne aux pays membres l’accès aux réserves et aux services financiers de la place de Londres. Mais, si les services restent d’excellente qualité, les réserves s’amenuisent et la dévaluation de la livre, en 1967, a amputé les avoirs des pays créditeurs de la zone. D’ailleurs, la livre n’a plus le rôle monétaire prépondérant qui était le sien au xixe s.

Le Commonwealth apparaît comme une belle réussite dans le domaine des rapports interraciaux et internationaux. Mais c’est une construction fragile et qui, à moyen terme, paraît menacée de dislocation.

C. M.

➙ Empire britannique / Grande-Bretagne.

 P. G. Walker, The Commonwealth (Londres, 1962). / J. Beaujeu-Garnier et A. Delobez, l’Économie du Commonwealth britannique (P. U. F., coll. « Que saïs-je ? », 1967). / L. Landré, le Commonwealth (C. D. U., 1967 ; 3 vol.). / H. Grimal, De l’Empire britannique au Commonwealth (A. Colin, coll. « U 2 », 1971).

communauté

Groupement réel fondé sur une solidarité ou un consensus autres que ceux qui sont voulus par la force du règlement ; le terme désigne également la forme idéale de sociabilité qui caractérise ceux des groupements où les personnes ne se sentent plus isolées et n’aliènent en rien leur liberté.



Sociologie de la communauté

C’est le sociologue allemand Ferdinand Tönnies (1855-1936) qui a rendu célèbre en sociologie cette notion familière aux philosophes de l’Antiquité et aux théologiens de l’époque médiévale. Selon lui, les êtres humains constituent les parties d’un tout, le corps social, mais ce tout ou bien préexiste aux parties ou bien est formé par elles. Dans le premier cas, on parlera de communauté ; dans le second, de société. Celle-là ressemble à un organisme vivant, celle-ci à une machine construite. La communauté forme ainsi un tout homogène, un ensemble de consciences fortement dépendantes les unes des autres, une unité harmonieuse et spontanée où se réalise la fusion des membres, la communauté des traditions s’ajoutant à la communauté de sang. La société, en revanche, est une juxtaposition d’individus différents qui ne peuvent constituer une réelle unité que par suite d’un contrat ou d’un accord réfléchi.

Mais la communauté ne se présente pas seulement chez Tönnies comme un groupement réel, un ensemble objectivé qu’on ne rencontre plus ou pratiquement plus de nos jours (au moins dans les sociétés industrielles) et qui aurait existé dans le passé. Elle se définit également comme une manière d’être dans le groupe social, une forme possible ou souhaitable de sociabilité. Elle exprime alors un certain degré de participation à l’intérieur des groupes sociaux. Et c’est sans doute parce qu’il n’existe pas de réelle « participation » (qui, dans la perspective de Tönnies, ne pourrait se situer qu’au niveau de l’instinctif et de l’affectif pur) dans les groupes sociaux actuels que la communauté existe de moins en moins comme réalité.

Cette conception a marqué profondément la philosophie sociale allemande et elle a également influencé un grand nombre de sociologues anglo-saxons, Robert Morrison Mac-Iver en particulier. Selon ce dernier, l’importance du concept de communauté réside pour une grande part dans le fait qu’il révèle l’existence d’une relation entre la cohésion sociale et l’aire géographique. En fait, dans leur analyse concrète de la réalité sociale, les sociologues anglo-saxons ont appelé communauté tantôt des groupements de localité, tantôt certains groupements à dominante affective et de dimension réduite, famille, classe d’école par exemple.

Tout en retenant l’opposition établie par Tönnies, les auteurs français ont eu, pour la plupart, tendance à considérer la communauté comme un groupement réel plutôt que comme une simple manière d’être dans la société, comme une forme possible de la sociabilité. La nation, la commune, la famille, le métier (d’où l’importance accordée aux corporations) en sont les exemples le plus souvent cités. C’est sans doute François Perroux qui, en France, a fait l’effort le plus sérieux pour clarifier la notion de communauté.

Des relations antérieures à toute volonté de l’agent humain, des situations ou fonctions complémentaires qui se présentent sous forme hiérarchique et constituent un ensemble structuré, une conscience du nous plus ou moins nette, telles sont les trois séries d’éléments que l’on découvre, à ses yeux, au sein d’une communauté.

La première série pose le problème « communauté et nature », mais les communautés doivent être considérées moins comme des groupements naturels que comme des groupements fondamentaux en ce sens que ceux-ci se maintiennent, réapparaissent ou se reconstituent malgré certains bouleversements historiques et les transformations profondes qui surviennent au sein des sociétés. La deuxième série d’éléments pose le problème « communauté et intégration », les communautés formant des ensembles de situations et de fonctions complémentaires et hiérarchisées. La troisième série fait passer de l’étude des conditions objectives à celle des conditions subjectives de l’existence des communautés : elle pose le problème « communauté et adhésion ».

S’orientant dans une voie différente, Georges Gurvitch considère la communauté exclusivement comme une forme de sociabilité. Selon lui, elle exprime uniquement un certain degré de participation à l’intérieur des groupes. C’est la seconde perspective tracée par Tönnies, à laquelle Gurvitch apporte toutefois de sérieuses nuances. La communauté, loin de constituer une étape révolue de l’histoire, réalise la forme de sociabilité qui, de tout temps, est la plus rationnelle.